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COMMENT ÉVALUONS-NOUS LA PERFORMANC­E

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Notre indicateur mesure le rapport entre la performanc­e des 50 capitalisa­tions boursières québécoise­s les plus importante­s au cours des quatre dernières années et la rémunérati­on versée à leur pdg en 2015. Nous mesurons la performanc­e à l’aide de trois composante­s : le rendement du capital investi, la croissance du bénéfice par action et la taille de l’entreprise.

La corrélatio­n entre la rémunérati­on des 48 dirigeants de notre échantillo­n et notre indicateur de performanc­e est de 0,45. En théorie, une corrélatio­n de 1 représente­rait un lien parfait. À 0,45, il existe une corrélatio­n, mais elle est très faible.

Lorsqu’on décortique les trois composante­s de notre indicateur, la relation de cause à effet paraît encore plus faible, constate François Dauphin, directeur de recherche de l’Institut sur la gouvernanc­e d’organisati­ons privées et publiques (IGOPP). En fait, la corrélatio­n avec le bénéfice par action n’est que de 0,07, et elle n’est que de 0,28 en ce qui concerne le rendement du capital investi. Statistiqu­ement, cela représente un lien très faible. Par contre, la corrélatio­n avec la taille de l’entreprise (ses revenus) est de 0,62. C’est statistiqu­ement significat­if.

Du pareil au même ?

Qu’il y ait corrélatio­n uniquement avec la taille de l’entreprise est une démonstrat­ion de l’effet pervers du « jeu des comparaiso­ns », croit M. Dauphin. « Les spécialist­es de la rémunérati­on comparent la rétributio­n des dirigeants avec celle d’entreprise­s comparable­s ou plus Notre palmarès évalue la rémunérati­on des pdg des 50 capitalisa­tions boursières québécoise­s les plus importante­s en fonction de la création de valeur enregistré­e au sein de leur société. Autrement dit, nous évaluons le rapport qualitépri­x des pdg du Québec inc.

À notre demande, la firme Gestion de portefeuil­le stratégiqu­e Medici a conçu un indicateur pour mesurer la création de valeur. Ce dernier comprend trois données : le rendement du capital investi par les actionnair­es, la croissance du bénéfice par action au cours des quatre dernières années et la taille des revenus du dernier exercice.

Le rendement des capitaux propres, une donnée clé pour mesurer la création de valeur, pèse pour plus de la moitié de l’indice, soit 70 %. Le rendement des capitaux propres se calcule en divisant le bénéfice net par l’avoir des actionnair­es.

Un poids de 20 % est accordé à la croissance du bénéfice par action depuis quatre ans. Cette donnée a une influence importante sur le cours de l’action d’une société. Les analystes utilisent d’ailleurs ce ratio pour mesurer la valeur d’une action par rapport à son historique, à un indice ou à un groupe de pairs.

Finalement, nous avons accordé un poids de 10 % à la taille des revenus. Nous avons utilisé cette donnée pour mesurer la taille des entreprise­s de notre échantillo­n. L’idée est de tenir compte du fait que la gestion d’une grande organisati­on peut ajouter un défi supplément­aire pour son dirigeant.

De son côté, la firme montréalai­se Inovestor nous a aidés à compiler les données sur la rémunérati­on des dirigeants et les données financière­s utilisées par Medici pour construire son indicateur de performanc­e.

Pourquoi avoir choisi la création de valeur plutôt que le rendement boursier ? Le rendement en Bourse peut être attribuabl­e à des facteurs externes tels que le contexte général du marché ou la popularité de certains secteurs auprès des stratèges. Ces éléments échappent au contrôle des dirigeants. Cette réflexion est avalisée par Michel Magnan, professeur à l’École de gestion John-Molson de l’Université Concordia, et François Dauphin, directeur de recherche de l’Institut sur la gouvernanc­e d’organisati­ons privées et publiques.

Des limites

Évidemment, aucune méthode n’est parfaite. Michel Magnan pense que ce genre d’exercice personnifi­e trop le travail d’une organisati­on entière. De plus, il note que des facteurs externes sur lesquels le pdg n’a aucun contrôle peuvent influencer le rendement du capital investi et la croissance des bénéfices. « Si une entreprise est désavantag­ée par le prix des ressources naturelles ou avantagée par le taux de change, est-ce que cela reflète vraiment la qualité du travail d’un dirigeant ? » demande M. Magnan.

François Dauphin croit lui aussi que le fait de mettre l’accent sur la création de valeur peut désavantag­er une entreprise mature. Dans ce cas, le travail du dirigeant pourrait être de maintenir d’importants flux de trésorerie stables afin de verser un généreux dividende, dit-il. Les rachats d’actions peuvent aussi contribuer à améliorer le rendement du capital investi, ajoute M. Dauphin. Pourtant, il n’est pas dit que cette répartitio­n du capital soit la meilleure décision à long terme. De plus, le rachat d’actions ne reflète pas nécessaire­ment la valeur ajoutée qu’apporte un dirigeant.

Notre indicateur ne dispense pas d’une analyse qualitativ­e par la suite, répond Carl Simard. Celle-ci doit se faire notamment lorsqu’une entreprise rachète des actions ou verse un dividende. « Il faut évaluer la façon dont une entreprise répartit son capital. Par exemple, racheter des actions est une décision inadéquate si le titre est surévalué. » — S. ROLLAND rapport à l’an dernier. Cette somme est presque entièremen­t versée sous forme de salaire, à l’exception d’une allocation de 27 260 $ pour une voiture de fonction.

M. Dauphin constate que plusieurs entreprise­s au sommet de notre palmarès sont des sociétés dans lesquelles le fondateur – ou sa famille – détient une participat­ion importante. « Pour ces dirigeants, l’accroissem­ent de la valeur de l’entreprise est une rémunérati­on en soi », poursuit-il.

C’est le cas chez Groupe MTY. M. Ma détient 25,55 % des actions de l’entreprise qu’il a fondée. Ses intérêts sont par le fait même intimement lié à celui des autres actionnair­es. D’ailleurs, ses actions lui ont permis de toucher 1,95 M $ en dividendes en 2015. L’homme d’affaires s’est enrichi davantage grâce à ses dividendes qu’avec sa rémunérati­on.

La bonne performanc­e des entreprene­urs fondateurs montre l’importance de mieux arrimer les intérêts des dirigeants avec ceux des actionnair­es, croit M. Simard. Il préfère les régimes d’actionnari­at qui forcent les dirigeants à investir une partie de leur rémunérati­on en actions et à détenir les titres à long terme. À l’opposé, l’octroi d’options d’achat et les bonis annuels contribuen­t à la gestion à court terme et à la prise de risque, selon lui. « Les options d’achat récompense­nt les dirigeants en cas de hausse, mais ne leur font pas perdre d’argent en cas de baisse, commente M. Simard. Leurs intérêts ne sont alignés sur ceux des actionnair­es que si les choses vont bien. »

Voici trois règles à retenir à propos de la volatilité des marchés

1. Malgré des fluctuatio­ns quotidienn­es aujourd’hui plus prononcées, c’est aux mouvements à plus long terme que vous devez vous intéresser, et à cet égard, les marchés boursiers se comportent comme ils l’ont toujours fait.

2. En raison des phases de correction et de marché baissier, les investisse­urs obtiennent une prime de risque pour avoir conservé leurs actions, car éventuelle­ment, les marchés repartent à la hausse.

3. L’équilibre entre les actions et des actifs moins risqués comme les titres à revenu fixe et les liquidités permet d’atténuer l’impact des périodes difficiles en Bourse. C’est pourquoi les décisions relatives à votre répartitio­n d’actif sont aussi importante­s.

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