Mentorat, coaching et... un salaire annuel
Cinq pdg s’engagent à prendre sous leur aile un jeune entrepreneur prometteur pour lui permettre d’atteindre plus rapidement le marché.
Fin 2009, Nicolas Duvernois remporte le World Vodka Masters, à Londres. Le président fondateur de PUR Vodka détient alors la meilleure vodka du monde. Pourtant, la nuit, il doit encore laver des planchers pour gagner sa vie. Le jour levé, il travaille pour son entreprise. Semaine après semaine, le manège recommence.
Heureusement pour lui, il a eu la chance de se faire « adopter » pendant cette traversée du désert. Après avoir été lauréat d’une des saisons de la série VoirGRAND.tv, il se lie d’amitié avec la productrice, Anne Marcotte. Elle lui présente Philippe de Gaspé Beaubien III, philanthrope et entrepreneur. À partir de cette rencontre, il a deux mentors à ses côtés, qui l’aident à engager son entreprise sur la bonne voie.
Son histoire l’amène aujourd’hui à lancer Adopte inc. avec ses deux parrains. Objectif : changer la vie de 25 entrepreneurs au moment clé de la commercialisation. À l’étape où Nicolas Duvernois en aurait eu lui-même bien besoin.
L’initiative est portée par cinq « adopteurs » : Guy Cormier du Mouvement Desjardins, Alain Bouchard d’Alimentation Couche-Tard, Eric Boyko de Stingray, Pierre Pomerleau de la firme de construction Pomerleau ainsi que Philippe de Gaspé Beaubien III. Chacun d’entre eux s’engage à « adopter » un entrepreneur québécois de 18 à 39 ans pendant un an et à lui verser 24 000 $, sous forme de versements toutes les deux semaines. « Si j’avais eu accès à 24 000 $ à ce moment – mon salaire annuel de l’époque –, j’aurais sûrement gagné 18 mois pour faire avancer mon entreprise. Bien sûr, on ne vit pas riche avec 24 000 $, mais c’est juste assez pour pouvoir se concentrer à 100 % sur son entreprise », dit Nicolas Duvernois.
L’adopté recevra aussi des formations, du mentorat, l’accès à des réunions stratégiques – une rencontre avec le conseil d’administration, par exemple – ainsi qu’au réseau de relations du mentor.
Vingt autres jeunes entrepreneurs seront sélectionnés et profiteront des mêmes avantages, hormis le salaire. Pour la partie conseil, les adoptés bénéficieront de l’expertise de partenaires tels que le cabinet d’avocats Norton Rose Fulbright, le cabinet-conseil Deloitte et l’agence Lg2, spécialisée en stratégies d’affaires, qui donneront un coup de main dans leurs champs de compétence.
Une sélection au peigne fin
Les entrepreneurs peuvent soumettre leur candidature accompagnée d’une courte vidéo sur le site Web d’Adopte inc. Les cofondateurs promettent un processus convivial, élaboré par Lg2, où les intéressés n’auront qu’à suivre les étapes afin de soumettre leur dossier. Le dépôt des candidatures s’étendra jusqu’au 2 août. Les dossiers de candidature seront d’abord épluchés par des représentants de l’École de technologie supérieure (ÉTS), qui en retiendra 75. Par la suite, les partenaires d’Adopte inc. sélectionneront 25 candidats. Ceuxci seront présentés aux adopteurs qui choisiront chacun un coup de coeur. L’annonce des 25 adoptés est prévue en septembre, lors d’une soirée qui se déroulera à la tour Deloitte. Aux antipodes d’un stage Il ne s’agit pas d’un stage rémunéré. Même si les jeunes entrepreneurs seront soutenus par leur adopteur et son organisation, ils resteront responsables de la réussite de leur entreprise. L’idée, c’est qu’ils puissent se consacrer à faire décoller celle-ci plutôt qu’être prisonnier d’un horaire surchargé. D’où le premier critère de sélection : être parvenus à l’étape de la commercialisation. Autrement dit, ils doivent avoir réalisé au moins une vente, peu importe sa valeur, un dollar ou un million de dollars.
« Idéalement, nous ne prendrons pas de startup afin d’être certains que ces jeunes sont prêts à prendre des risques. Qu’ils ont déjà échoué, pleuré, été “en beau fusil”, qu’ils se sont tués à l’ouvrage », raconte Nicolas Duvernois.
« Nous allons sélectionner les gagnants parmi ceux qui sont déjà passés par le “filtre de la vie”, ajoute-t-il. Ceux qui ont commencé à vendre, mais qui ont besoin d’un élan. Je veux les aider à accélérer cette période-là, pour ne pas qu’ils échouent », ajoute-t-il.
C’est aussi de la « sueur » que recherche Anne Marcotte, cofondatrice de l’initiative et pdg du Groupe Vivemtia, firme de conception et de production média de Québec. « On ne cherche pas des gens qui ne vivent qu’à travers une idée, qui en sont à leurs balbutiements. On veut des gens pour qui être adoptés changerait tout. Oui, par de l’aide financière, mais surtout par des relations. Souvent, en affaires, ce n’est pas qu’on connaît qui importe le plus, mais bien on connaît. » Donner au suivant « Nos adoptés redonneront une fois leur tour venu. Nous voulons qu’Adopte inc. se propage partout et fasse rayonner le Québec dans le monde. D’ailleurs, je sais que notre projet est étudié par le gouvernement du Québec. Il pourrait faire partie d’une politique entrepreneuriale », soutient Anne Marcotte.
Pour les trois cofondateurs, cette première cohorte n’est qu’un premier pas. Après tout, si cinq adopteurs s’embarquent dans l’aventure, pourquoi pas 500, ou 1 000 ? se disent-ils.