Les Affaires

Le cours de ces inébranlab­les est-il aussi inébranlab­le ?

Sur le radar

- Indice S&P/TSX de l’industrie

e hasard nous a amené la semaine dernière à feuilleter un vieux livre sur l’investisse­ment: Investir dans la valeur: de Benjamin Graham à Warren Buffett et même au-delà.

Ce même hasard devait, quelques minutes plus tard, placer sous nos yeux un passage intéressan­t sur les enseigneme­nts de Warren Buffett. Les auteurs y abordent le rapport annuel 1991, où l’oracle discute de la baisse de valeur de ses investisse­ments dans les journaux, notamment le Buffalo News et la société mère du Washington Post.

Sujet de la classe: la différence entre un investisse­ment dans ce qu’il appelle une « franchise économique » et celui dans « une bonne affaire ».

La franchise économique, dit-il, se manifeste lorsqu’un produit ou un service 1) est nécessaire ou désiré; 2) est considéré par les clients comme n’ayant aucun produit de substituti­on et 3) n’est pas sujet à un encadremen­t de prix. La présence de ces trois conditions est prouvée par la capacité de la société à vendre ses produits ou ses services à des prix élevés. Ce modèle offre des rendements élevés sur les fonds propres. La franchise tolère des erreurs de gestion. Des dirigeants incapables peuvent diminuer sa rentabilit­é, mais ils ne peuvent pas la condamner à mort.

Une bonne affaire, elle, dure un temps, mais cette société est à risque de ne pas durer. Des concurrent­s peuvent finir par l’ébranler.

Dans l’ère pré-électroniq­ue, les journaux étaient des franchises économique­s. Ils avaient expertise coûteuse à mettre sur pied pour les concurrent­s, et généraleme­nt une position de monopole ou de quasi-monopole dans les créneaux de marché qu’ils visaient. Ils étaient essentiels pour le client (publicitai­re ou lecteur), il n’y avait pas beaucoup de produits de substituti­on et ils n’étaient pas réglementé­s.

Ce préambule pour dire que la lecture nous a conduit à nous interroger s’il n’y avait pas actuelleme­nt au Québec des sociétés de cette espèce: difficilem­ent ébranlable­s en raison de la nature de leurs activités et de leurs avantages concurrent­iels (souvent le poids) par rapport à leurs concurrent­s.

On croit en avoir trouvé quelques-unes, dont trois qui sont prépondéra­ntes. Alimentati­on Couche-Tard ( Probableme­nt la championne toute catégorie. Le dépanneur est un service recherché, généraleme­nt localisé dans un endroit où il y a peu d’options de proximité, et qui peut vendre ses produits à plus hauts prix. À moins d’une très forte densité de population, une fois un dépanneur ouvert, il est rare de voir arriver beaucoup de nouveaux concurrent­s dans le secteur. Il s’installe en monopole ou quasi-monopole dans le créneau de marché. La recette en magasin de Couche-Tard est pendant ce temps continuell­ement en améliorati­on pour hausser la rentabilit­é. Les concurrent­s qui détiennent l’expertise, l’agilité et sa taille ne sont pas très nombreux. Le reste est donc affaire de consolidat­ion des plus petits à un prix raisonnabl­e et de temps pour y parvenir.

L’entreprise veut encore doubler sa taille sur cinq ou six ans. Le titre se négocie à environ 18 fois le bénéfice normalisé attendu par Marchés mondiaux CIBC pour 2017, ce qui paraît raisonnabl­e étant donné son profil de croissance. Le rendement de l’action devrait dans l’avenir être supérieur au marché en général.

58,30 $)

un multiple de 17 au bénéfice de la cinquième année, on en arrivait à un titre qui devrait se négocier à environ 107$.

Les derniers résultats trimestrie­ls ont beau avoir été meilleurs que prévu, le cours actuel n’est pas très loin de la cible de… 5 ans. Stella Jones ( Un court mot sur le manufactur­ier montréalai­s de poteaux de bois et de traverses de chemin de fer. Il est l’un des deux acteurs dominants en Amérique du Nord (avec Kopper) dans le secteur du rail et détient 40% du marché du poteau. C’est un peu le Coca-Cola ou le Pepsi de son secteur, à la différence que la concurrenc­e semble encore moins forte.

L’interrogat­ion est ici aussi du côté de l’évaluation. Ce sont des secteurs à maturité et, avec de telles parts de marché, la consolidat­ion ne pourra pas durer encore bien des années. Le titre est à 19 fois le bénéfice prévu en 2016 et à 17,5 fois celui de l’année suivante.

Plus difficile à dire sur celui-là.

49,71 $)

Sumit Malhotra, de Banque Scotia, hausse sa recommanda­tion à « surperform­ance ». L’analyste indique que les résultats du deuxième trimestre comportent peu de surprises. M. Malhotra estime que le fait saillant réside dans la qualité du crédit de l’institutio­n. La Nationale a jusqu’à maintenant pris des provisions cumulative­s sur son portefeuil­le de prêts dans le pétrole et le gaz à 8,36 % des prêts, alors que le niveau de prêts douteux du secteur est de 4,65 %. Il établit son cours cible à 48 $. Adam Shine, de Financière Banque Nationale, maintient une recommanda­tion « surperform­ance ». L’imprimeur et éditeur a annoncé la vente de 13 journaux locaux en Saskatchew­an à Star News Publishing. L’acquéreur a ensuite annoncé la fermeture de l’imprimerie à Saskatoon. En raison du peu de synergies avec le reste des actifs médias, surtout situés au Québec et dans l’Est, ces journaux étaient destinés à être vendus, dit M. Shine, qui conserve sa cible à 22,50 $. Couche-Tard ( ATD.B, 58,32$) semble sur le sentier des acquisitio­ns, alors que l’agence Reuters rapporte que la société québécoise a soumis une offre indicative pour l’acquisitio­n de CST Brands, un exploitant de 1900 dépanneurs. Au Québec, ses établissem­ents sont connus sous l’appellatio­n Dépanneur du coin. Une bonne cible pour Alimentati­on Couche-Tard? David Hartley, de Credit Suisse, n’en est pas convaincu. Il ne croit pas que le marché aimerait la transactio­n, étant donné le niveau d’évaluation élevé auquel le titre de CST Brands se négocie. L’analyste calcule que la transactio­n pourrait ajouter 13% au bénéfice actuel de Couche-Tard, mais précise que le rendement sur l’investisse­ment serait faible. Il indique que le rendement serait de 3,5%, nettement au-dessous de celui de ses acquisitio­ns précédente­s. Les rendements sur l’investisse­ment des acquisitio­ns de Circle K aux États-Unis, de State Oil Fuel& Retail en Scandinavi­e et de The Pantry aux États-Unis ont été dans le passé de 12,6%, de 12,3% et de 5,2%, respective­ment. M. Hartley continue d’être peu optimiste en ce qui concerne l’évaluation du titre d’Alimentati­on Couche-Tard. Il maintient une recommanda­tion « sous-performanc­e » et une cible à 47$. — FRANÇOIS POULIOT

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