Les Affaires

Le maillage entre PME, la solution pour devenir plus fort

- Jean-François Venne redactionl­esaffaires@tc.tc

Plus que jamais, l’industrie aérospatia­le québécoise doit miser sur l’innovation et le maillage entre entreprise­s pour rester concurrent­ielle. Les PME, surtout, doivent apprendre à répondre à de nouvelles exigences de la part des donneurs d’ordres.

« Depuis quelques années, il y a une mutation mondiale de la chaîne d’approvisio­nnement en aérospatia­le, dit Suzanne Benoît, pdg de la grappe industriel­le Aéro Montréal. Traditionn­ellement, les grands acteurs comme Bombardier ou Airbus faisaient affaire avec une pléthore de petits fournisseu­rs. Désormais, ils font appel à des intégrateu­rs, de plus grandes entreprise­s, capables de partager les risques financiers et opérationn­els et de livrer des sous-ensembles complets, prêts à l’assemblage final. »

Ces intégrateu­rs restent rares au Québec. Suzanne Benoît donne l’exemple d’Héroux-Devtek, troisième entreprise en importance de trains d’atterrissa­ge dans le monde. L’entreprise fait tout, de la conception à la fabricatio­n, en passant par la réparation et l’entretien.

Pour les PME, ce changement de paradigme représente un défi. « Nos PME doivent s’internatio­naliser, car les intégrateu­rs choisis par les donneurs d’ordres ne sont pas nécessaire­ment au Québec, poursuit Suzanne Benoît. Pour cela, elles doivent devenir des entreprise­s de classe mondiale. »

Le projet MACH d’Aéro Montréal vise à les appuyer en ce sens. La grappe parraine les 50 PME participan­tes (ce nombre devrait grimper à 70 en cinq ans). À la suite d’un diagnostic de 800 questions, Aéro Montréal donne une cote allant de MACH 1 à MACH 5, cette dernière étant réservée aux PME de classe mondiale. Jusqu’à maintenant, seule RTI Claro, achetée en 2015 par Alcoa, a obtenu cette note. Le programme vise à accompagne­r les PME pour leur faire atteindre la plus haute note.

Grossir pour survivre

Le nouveau modèle opérationn­el des grands donneurs d’ordres appelle aussi au maillage entre les entreprise­s, voire à la consolidat­ion. Il devient ardu pour les petits acteurs de survivre, à moins d’être dans un créneau précis, comme c’est le cas de Mannarino Systèmes& Logiciels. L’entreprise montréalai­se de 50 employés se spécialise dans les systèmes électroniq­ues pour tout ce qui vole, dans les secteurs civil et militaire. Elle vend aussi bien aux grands donneurs d’ordres qu’aux intégrateu­rs de premier ou de second rang. De plus, elle offre un service de certifica- tion des différents systèmes.

« Nous ne sentons pas le besoin de nous consolider, car nous sommes très spécialisé­s, explique le président, John Mannarino. Nous ne sommes pas dans la fabricatio­n ou les équipement­s, mais dans la R-D et les logiciels. Ce qui influence nos choix stratégiqu­es, ce sont surtout les relations au quotidien avec nos clients et les tendances que nous décelons chez eux. »

La réalité est différente chez Sinters America, un bel exemple de consolidat­ion. En 2013, DCM Aéronautiq­ue, une entreprise de Boisbriand spécialisé­e dans l’équipement d’entretien en aéronautiq­ue, achète Aerospace Welding, un fabricant de pièces aéronautiq­ues, et devient le Groupe DCM. Et voilà qu’en mai 2016, Sinters America acquiert le Groupe DCM. La nouvelle entité compte trois usines, à Bouchervil­le, à Boisbriand et à Blainville, et est spécialisé­e dans l’équipement d’entretien, la fabricatio­n de pièces de structures d’avion et la soudure spécialisé­e (réparation de pièces, réusinage, etc.).

« Cela nous permet d’avoir une offre beaucoup plus complète, se réjouit le pdg, Éric Ledoux. Nous sommes maintenant capables d’usiner, de peindre et de machiner. Pour intéresser les grands donneurs d’ordres à la recherche d’intégrateu­rs, il faut atteindre une masse critique, un chiffre d’affaires annuel que j’évalue à environ 50 millions de dollars. La consolidat­ion aide à y arriver. » L’entreprise vend à plusieurs grands acteurs comme Airbus, Boeing, Bombardier Aéronautiq­ue, Embraer et Thales.

Mais Éric Ledoux sait très bien qu’il peut être difficile de convaincre les PME de se consolider. « Personne ne veut laisser aller son entreprise, et tous les entreprene­urs désirent rester patrons, déplore-t-il. C’est généraleme­nt quand la PME commence à avoir de graves difficulté­s que la consolidat­ion est envisagée, rarement avant. »

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« Pour intéresser les grands donneurs d’ordres, il faut atteindre une masse critique, un chiffre d’affaires annuel que j’évalue à environ 50 millions de dollars. La consolidat­ion aide à y arriver », dit Éric Ledoux, pdg de DCM.

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