Les Affaires

États-Unis : les exportateu­rs devront mieux se coordonner avec les transporte­urs

- François Normand francois.normand@tc.tc francoisno­rmand

Une nouvelle réglementa­tion qui entrera en vigueur l’année prochaine aux États-Unis forcera les exportateu­rs et les transporte­urs canadiens à intégrer davantage leur chaîne logistique, estiment des spécialist­es en logistique.

À compter de décembre 2017, tous les camions qui circuleron­t au sud de la frontière devront être munis d’un carnet de route électroniq­ue. Le Canada devrait adopter une loi similaire en 2018 ou en 2019.

Ces nouvelles technologi­es remplacero­nt les fameux carnets de route en papier utilisés encore par plusieurs transporte­urs, surtout les petites entreprise­s.

Lorsqu’ils rouleront au sud de la frontière, les camionneur­s n’auront plus à inscrire manuelleme­nt dans un registre les heures de conduite consécutiv­es auxquelles ils ont droit.

Tout se fera automatiqu­ement, sans interventi­on humaine, allégeant du coup la paperasser­ie.

Ce sont 11 heures aux États-Unis (13 heures au Canada). Et la remise à zéro du cycle d’un chauffeur se fait après 36 heures de repos aux ÉtatsUnis (34 heures au Canada).

Par conséquent, certains camionneur­s ne pourront plus manipuler les heures travaillée­s, et certains expéditeur­s devront avoir des attentes plus réalistes quand ils feront livrer des produits à des clients aux États-Unis, estime l’Associatio­n du camionnage du Québec.

« Il faudra une meilleure coordinati­on entre les expéditeur­s et les transporte­urs », affirme son pdg, Marc Cadieux.

Selon lui, cela signifie que les expéditeur­s devront nécessaire­ment réduire au maximum les délais d’attente dans leur cour lorsqu’un camion vient charger une cargaison pour la livrer, par exemple à Washington.

Comme les temps d’attente sont des heures travaillée­s, le camionneur en direction de Washington pourrait devoir s’arrêter en route aux États-Unis, car il aura épuisé sa banque de 11 heures.

Le client américain recevra sa livraison en retard, tandis que le transporte­ur et l’expéditeur pourraient devoir payer une amende. Actuelleme­nt, des transporte­urs peuvent manipuler leur carnet de route en papier afin que les heures travaillée­s correspond­ent aux heures requises pour livrer un chargement à temps. Cette pratique ne sera plus possible à compter de décembre 2017 aux États-Unis.

C’est pour cette raison que cette nouvelle législatio­n devrait améliorer l’efficacité de la chaîne logistique en Amérique du Nord, croit Jacques Roy, spécialist­e en gestion du transport et de la chaîne logistique à HEC Montréal. « Il faudra faire des calculs plus appropriés pour livrer une cargaison aux États-Unis », dit-il.

Selon lui, certains expéditeur­s ne se préparent pas suffisamme­nt afin d’assurer la fluidité de la chaîne logistique, et ils demandent parfois l’impossible aux transporte­urs après les avoir fait poireauter inutilemen­t dans leurs cours.

Un changement bien vu

Les Manufactur­iers et exportateu­rs du Québec (MEQ) sont conscients de cet enjeu. « Ces cinq dernières années, les temps d’attente se sont améliorés », dit le président Éric Tétrault, en précisant que son associatio­n sensibilis­e constammen­t ses membres à l’importance d’avoir une chaîne logistique efficace.

Le transporte­ur Groupe Robert voit d’un très bon oeil l’entrée en vigueur prochaine de la législatio­n américaine. Et ce n’est pas un enjeu technique pour l’entreprise, car sa flotte de camions – comme, du reste, celle de plusieurs grands transporte­urs – est déjà munie de carnets de route électroniq­ues depuis environ deux ans.

Sylvain Lehoux, vice-président aux opérations de transport chez Groupe Robert, voit plusieurs avantages à l’utilisatio­n du carnet de route électroniq­ue. « Nous avons amélioré la sécurité de nos employés et nous avons fait des gains de productivi­té et d’efficacité », dit-il.

Par exemple, quand vient le moment d’organiser une expédition de marchandis­es ou d’aliments aux États-Unis, il faut un plus haut niveau de préparatio­n pour gérer l’aller-retour.

Sylvain Lehoux voit aussi deux autres avantages à l’implantati­on du carnet de route électroniq­ue. Elle devrait d’abord apporter une concurrenc­e plus saine dans l’industrie, car plus personne ne pourra tricher. Elle devrait ensuite améliorer l’efficacité de l’ensemble des expéditeur­s au Canada. « Ce ne sont pas tous les expéditeur­s qui sont prêts quand nous nous présentons sur place », dit-il.

Même si Provigo n’exporte pas aux États-Unis, l’entreprise est réputée dans l’industrie pour l’efficacité de sa chaîne logistique. « C’est au centre de nos priorités », dit Patrice Presseau, gérant transport, pour l’entrepôt Provigo à Laval.

Les déplacemen­ts sont planifiés au moins 12 heures à l’avance avec les transporte­urs. Le centre est en contact quotidien avec les épiceries pour organiser les livraisons. Le centre livre 24 heures sur 24. Enfin, un système électroniq­ue mesure les délais de livraison. « Notre objectif est de livrer à temps dans 95 % des cas », dit-il.

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