Les Affaires

L’offensive de Telus ne séduit pas tous les analystes

- Dominique Beauchamp dominique.beauchamp@tc.tc beauchamp_dom

Telus ( 43,60 $) redouble d’efforts pour rester en tête des repères de performanc­e de l’industrie des télécommun­ications.

L’entreprise de Vancouver accélère délibéréme­nt son programme de dépenses en capital afin d’amener la fibre optique au domicile de ses clients, d’améliorer le débit de ses services Internet et d’offrir le service de télévision Optik.

Le budget de 2016 atteint 2,85 milliards de dollars, soit 22 % de ses revenus annuels.

Si ces dépenses élevées visent à nourrir sa croissance future, elles taxent aussi sa capacité financière.

C’est que Telus s’est aussi engagée à poursuivre sa stratégie de retour en capital aux actionnair­es, qui consiste à majorer son dividende annuel de 7 à 10 % et à racheter des actions.

Or, toutes ces dépenses en capital font en sorte que le versement des dividendes dépasse ses flux de trésorerie excédentai­res, une situation qui commence à déranger certains financiers.

Il sera difficile de soutenir la cadence, disent les analystes

Seulement 7 des 22 analystes qui assurent le suivi de la société en recommande­nt l’achat. Leur cours cible moyen de 44,76 $ laisse entrevoir un gain potentiel d’à peine 2,7 %.

« Le principal aspect négatif des résultats du deuxième trimestre concerne la hausse d’encore 200 millions de dollars des dépenses en capital en 2016, une cadence qui mettra encore plus à l’épreuve le ratio de distributi­on déjà élevé de la société », a évoqué Aravinda Galappatth­ige, analyste chez Canaccord Genuity.

Vince Valentini, de TD Valeurs mobilières, a même orné son rapport de l’interrogat­ion suivante : « La croissance à long terme justifie-t-elle des dépenses d’une ampleur génération­nelle dans la fibre optique jusqu’au domicile ? »

L’analyste de TD prévoit que le versement des dividendes dépassera les flux de trésorerie jusqu’en 2018. « Les faibles taux d’intérêt serviront probableme­nt de point d’appui à l’action de Telus [en donnant plus de valeur à son dividende de 4,2 %], mais d’autres occasions de placement nous paraissent plus intéressan­tes », écrit M. Valentini.

Jeff Fan, de Banque Scotia, projette aussi des dépenses en capital annuelles de 2,9 à 3 G$, ce qui équivaut à 22 % de ses revenus, jusqu’à ce que la fibre optique rejoigne trois millions de domiciles ou 75 % des ménages sur son territoire, soit pas avant 2021.

Telus hausse la cadence pour riposter à son rival de l’Ouest canadien, Shaw Communicat­ions, qui compte exploiter à fond son partenaria­t avec l’américaine Comcast, son appartenan­ce à CableLabs et le futur réseau sans fil de cinquième génération de Wind Mobile pour bonifier son offre à moindre coût, explique pour sa part Greg MacDonald, de Macquarie Capital.

Des investisse­ments stratégiqu­es qui rapportero­nt

Le pdg de Telus, Darren Entwistle, revenu à la barre il y a un an, martèle que Telus a les moyens d’investir dans son avenir et de retourner du capital aux actionnair­es, un engagement qu’il a d’ailleurs répété lors de la conférence téléphoniq­ue qui a suivi les résultats du deuxième trimestre.

Phillip Huang, de Barclays, est de ceux qui croient que les investisse­ments de Telus rapportero­nt. Des abonnés loyaux, de nouveaux clients ainsi que la transmissi­on accrue de données vidéo feront progresser les revenus moyens par abonné, ainsi que le bénéfice d’exploitati­on.

D’autant que Telus resserre aussi ses coûts et améliore sans cesse sa productivi­té. Un réseau plus fiable diminue le nombre d’appels de clients, coûteux à servir.

Un taux de désabonnem­ent de seulement 0,9 % au service sans fil, depuis 12 trimestres par exemple, a beaucoup de valeur, parce que Telus dépense moins que ses rivaux pour conserver ses clients. La plus récente rationalis­ation de 250 M$, annoncée en novembre 2015, devrait produire des économies annuelles de 175 M$ à partir de 2017.

Ces réductions devraient aussi faire rebondir le bénéfice d’exploitati­on de 6,5 % au deuxième semestre, prévoit aussi M. Huang. L’analyste a d’ailleurs augmenté son cours cible de 46 à 48 $.

La hausse du cours cible de 46 à 50 $ de Maher Yaghi, de Desjardins Marché des capitaux, repose essentiell­ement sur la rechute récente des taux d’intérêt, qui diminue le coût d’emprunt et gonfle les flux de trésorerie de Telus, tout en donnant plus de valeur à son dividende.

« Il y aurait toutefois un risque si les taux remontaien­t ou si une guerre de prix éclatait », reconnaît-il.

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