Les Affaires

La tentation du repli

- Julie Cailliau Rédactrice en chef, Groupe Les Affaires julie.cailliau@tc.tc @julie140c

À l’heure où j’écris ces lignes, l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne est aux soins intensifs. La Wallonie, avec ses insécurité­s de dernière minute, grippe l’engrenage de la ratificati­on. Difficile de prévoir si les derniers jours auront suffi à nous sortir de l’impasse, mais une chose est d’ores et déjà certaine : cette crise est une preuve de plus que le protection­nisme est en pleine forme.

« Si les dirigeants des pays du G20 se sont constammen­t engagés depuis 2009 à éviter les mesures protection­nistes, cette résolution n’en a pas moins perdu en fermeté au fil du temps, observait la Banque du Canada dans son Rapport sur la politique monétaire ce mois-ci. D’après l’Organisati­on mondiale du commerce, les pays du G20 ont imposé au total 1 583 mesures de restrictio­n des échanges depuis 2009, et ont pris 145 nouvelles mesures du genre rien que pendant les six mois écoulés entre octobre 2015 et la mi-mai 2016. »

Pourquoi la Banque prend-elle l’année 2009 comme référence ? Parce que la mondialisa­tion des échanges a été coupée net dans son élan par la crise financière de 20072008. Elle a rebondi depuis, mais s’est stabilisée vers 2010.

C’est inquiétant pour l’économie canadienne, très « tributaire des échanges commerciau­x ». Ce l’est aussi pour celle de la planète. Selon le Fonds monétaire internatio­nal et la Banque mondiale, le repli protection­niste est un mauvais réflexe face au ralentisse­ment de l’économie mondiale, il ne fera que l’aggraver.

Le message ne passe pas auprès des citoyens des pays concernés, qui jugent que les effets secondaire­s et pervers de la mondialisa­tion, sur l’emploi par exemple, annulent son action sur la productivi­té et le PIB. Et que font les dirigeants politiques ? Ils disent aux citoyens ce que ces derniers souhaitent entendre. Ainsi, Donald Trump promet qu’une fois élu à la Maison-Blanche, il renégocier­a l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), tandis que Hillary Clinton dit qu’elle ne ratifiera pas le Partenaria­t transpacif­ique (PTP). Le protection­nisme est un des enjeux de l’élection américaine pour l’économie canadienne, que nous expliquons en manchette cette semaine.

Si l’ALÉNA ne peut pas être tenu pour acquis et que le PTP est compromis, vers quel partenaire le Canada pourra-t-il se tourner ? Tous les espoirs reposent (reposaient?) sur l’Union européenne, le plus grand marché du monde. Ces attentes très élevées combinées au fait que les négociatio­ns de l’AECG ont été conclues le 5 août 2014, il y a plus de deux ans, expliquent l’exaspérati­on de la ministre canadienne du Commerce internatio­nal, Chrystia Freeland, la semaine dernière. Pourrait-on passer à l’action, s’il vous plaît ?

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