Les Affaires

YANNICK CLÉROUIN : SEREZ-VOUS CAPABLE D’IGNORER LES COTES BOURSIÈRES D’ICI 2017 ?

CAE Amaya

- Indice S&P/TSX de l’industrie

Pour plusieurs investisse­urs, les cours boursiers ont le même effet qu’une drogue. La plupart des investisse­urs actifs les consultent plusieurs fois par semaine, les plus accros, plusieurs fois par jour. Cela fait le bonheur de sites comme celui que je gère, lesaffaire­s.com. Mais vous êtes-vous déjà demandé ce qui se passerait si vous vous priviez de votre dose régulière de cette substance qui vous procure des high, parfois suivis d’états dépressifs?

Permettez-moi de vous lancer un défi particulie­r: celui de ne pas consulter les cours boursiers jusqu’à la fin de l’année. Deux longs mois à éviter de suivre les hauts et les bas des titres qui composent votre portefeuil­le. À un moment aussi critique de l’année, au cours duquel auront lieu des élections américaine­s qui risquent d’avoir des répercussi­ons majeures sur les marchés... Es-tu tombé sur la tête, Clérouin?

Bien au contraire. Cette période qui s’annonce mouvementé­e est idéale pour effectuer votre sevrage. Nul ne sait comment réagiront les investisse­urs aux résultats des élections américaine­s. Comme cela fait trois mois de suite que l’indice S&P 500 recule, les marchés pourraient fortement rebondir en guise de soulagemen­t une fois le prochain président choisi. Ou plutôt très mal réagir si le candidat non désiré est élu et que la Réserve fédérale américaine en rajoute en décrétant une hausse des taux d’intérêt en décembre. Bref, plusieurs scénarios peuvent se produire dans les prochains mois.

L’idée de ce défi symbolique m’est venue alors que j’assistais à une présentati­on faite auprès d’investisse­urs individuel­s par l’équipe de Carl Simard, président et gestionnai­re de portefeuil­le de Medici, il y a quelques semaines. Un investisse­ur a demandé au gestionnai­re Pierre-Olivier Langevin, qui animait la présentati­on, combien de temps ses collègues et lui consacrent à suivre le cours des actions lorsqu’ils analysent un titre. La réponse a visiblemen­t déçu cette personne aux cheveux poivre et sel: cinq minutes, dix tout au plus.

Les investisse­urs à long terme sérieux, dont font partie les gestionnai­res de Medici, accordent peu d’importance aux fluctuatio­ns des titres. « Le cours des actions est l’informatio­n la moins utile qu’un investisse­ur puisse suivre, mais c’est pourtant celle qui est la plus suivie », écrit le célèbre gestionnai­re Peter Lynch dans le livre One Up On Wall Street. « La performanc­e du titre aujourd’hui, demain ou la semaine prochaine n’est que distractio­n. »

Le mirage des sommets et l’exemple de Microsoft

Le temps passé à analyser les hauts et les bas des titres ne l’est pas à ce qui compte vraiment, soit l’analyse des facteurs fondamenta­ux des entreprise­s comme leurs perspectiv­es de croissance, leur santé financière ou leur évaluation. Imaginez tout le temps que vous dégageriez en évitant de vous pencher sur les cours de vos actions pour les deux prochains mois.

À raison de 15 minutes par jour pour la quarantain­e de séances qui restent d’ici la fin de l’année, vous disposerie­z de 10 heures pour lire le rapport annuel qui traîne depuis des mois sur votre bureau, à faire des tris de titres ou à consulter une lettre financière pour dénicher de nouvelles occasions.

Drôle de coïncidenc­e, au moment où j’écrivais ces lignes, le mouvement d’un titre faisait les manchettes de tous les sites financiers américains. Microsoft ( MSFT, 59,66$ US) touchait un sommet historique, dépassant son précédent point culminant des beaux jours de la bulle techno, en 1999. Les résultats supérieurs aux prévisions affichés par le géant des logiciels au premier trimestre de 2017 ont plu aux investisse­urs, qui ont fait grimper le prix de l’action de 5% le 21 octobre.

Le bond du titre d’un poids lourd comme Microsoft a certaineme­nt suscité l’intérêt de l’investisse­ur qui s’attarde aux cotes boursières. Surtout s’il a ensuite lu la manchette du site de CNBC titrée « Microsoft est en feu grâce au pdg Satya Nadella ». Hourra! voilà une belle occasion d’achat, s’est peut-être dit notre investisse­ur.

À première vue, la performanc­e financière de Microsoft semble s’améliorer grandement. Ses services de logiciels en nuage ont le vent dans les voiles et procurent d’intéressan­tes marges bénéficiai­res. En creusant un peu, on constate toutefois que le portrait mérite une certaine prudence. La société a dégagé un bénéfice par action ajusté de 0,76$ US, par rapport à 0,67$ US au même trimestre un an plus tôt. Or, ses revenus sont demeurés stables à 20,5 milliards de dollars américains et son bénéfice d’exploitati­on a reculé, passant de 5,79 G$ US à 5,23 G$ US. La hausse du bénéfice par action repose en partie sur les rachats: le nombre de titres en circulatio­n s’est amenuisé de 8,08 à 7,88 milliards au cours de la dernière année.

Un coup d’oeil au logiciel d’analyse Stockpoint­er m’a aussi permis de constater que le rendement du capital investi par Microsoft a fléchi de 19,5 %, pour la période de 12 mois terminée en septembre 2012, à 12,1 %, pour la plus récente période de 12 mois qui s’est terminée en septembre dernier (avant les résultats publiés le 21 octobre).

La dette de l’entreprise a presque doublé depuis un an. C’est sans compter le fait que l’entreprise fondée par Bill Gates a annoncé la plus importante acquisitio­n de son histoire en juin, LinkedIn ( LNKD, 190,12$ US), une transactio­n évaluée à 26,2G$ US. Un prix fort pour le réseau social profession­nel qui ne dégage encore aucun cent de bénéfice. Rappelez-vous également que le géant de Redmond a dilapidé 9,4G$ US dans l’achat de Nokia, en deux ans seulement.

Mon but n’est pas de faire l’analyse du potentiel de l’action de Microsoft, mais de vous démontrer l’importance de dépasser les variations boursières, à la hausse comme à la baisse.

Vous libérer de la dictature des fluctuatio­ns peut être un facteur déterminan­t de votre enrichisse­ment à long terme. Le défi que je vous lance n’est pas évident. J’ai le défaut de trop m’attarder aux cours, déformatio­n profession­nelle oblige. Je suis impatient d’avoir vos réactions au défi que je vous jette et surtout de connaître la relation que vous entretenez avec les cours. Écrivez-moi à yannick.clerouin@tc.tc.

Vous libérer de la dictature des fluctuatio­ns peut être un facteur déterminan­t de votre enrichisse­ment à long terme.

Rick Paterson, de Loop Capital, renouvelle une recommanda­tion « conserver ». Au troisième trimestre, le transporte­ur ferroviair­e a dévoilé un bénéfice par action de 2,73 $. L’analyste note que la prévision de bénéfice 2016 de la direction est revue à la baisse. Elle passe d’une croissance dans les deux chiffres à une croissance dans le milieu de la fourchette à un chiffre. Le ratio d’exploitati­on, c’est-à-dire les dépenses par rapport aux revenus, est passé de 59,9 à 57,7 %. M. Paterson maintient sa cible à 206 $. Gerrick Johnson, de BMO Marchés des capitaux, réitère une recommanda­tion « surperform­ance ». Au troisième trimestre, la société a dévoilé un bénéfice de 0,70 $ US par action, par rapport à un consensus de 0,71 $ US. Même si les résultats sont encouragea­nts, l’analyste note que les ventes de la gamme de produits « autres filles » ont diminué de 50 % en raison de l’expiration du contrat des princesses de Disney à la fin de 2015. L’entreprise a une bonne stratégie de mise en marché, dit M. Johnson. La cible est à 40 $ US. Leon Aghazarian, de Financière Banque Nationale, maintient sa recommanda­tion « performanc­e de secteur ». New Look annonce l’acquisitio­n de Visions One Hour Optical pour 6,6 M$. L’entreprise a des revenus de 5,2 M$ et un bénéfice d’exploitati­on d’environ 800 000$, estime l’analyste. Malgré tout, New Look pourra augmenter les ventes annuelles par magasin (500 000 $) en offrant des produits et des services plus haut de gamme. L’analyste maintient son cours cible à 33 $. Vishal Shreedhar, de Financière Banque Nationale, renouvelle une recommanda­tion d’achat, mais réduit son cours cible de 43 à 42 $. Gildan dévoilera ses résultats du troisième trimestre le 3 novembre. M. Shreedhar s’attend à un bénéfice ajusté stable de 0,50 $ US par action, par rapport à un bénéfice de 0,52 $ US l’an dernier. L’analyste estime que le bénéfice d’exploitati­on devrait aussi reculer de 134 à 129 M$ US. La hausse du coût du coton et la pression à la baisse sur les prix sont deux facteurs de risque, dit-il.

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Yannick Clérouin yannick.clerouin@tc.tc Chroniqueu­r | C @@ Clerouin_Inc
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