À la recherche de nouveaux débouchés
« Tout l’effort de recherche chez FPInnovations vise à sortir l’industrie de l’économie du “deux par quatre” », lance Pierre Lapointe, président et chef de la direction de FPInnovations, qui dispose d’un budget annuel de 75 millions de dollars et d’un bassin de 500 chercheurs planchant uniquement sur les avancées dans les technologies du bois.
L’entreprise est une des pièces maîtresses d’un vaste réseau de centres de recherche consacrés au bois. S’y ajoutent sept centres collégiaux de transfert technologique (CCTT) destinés aux recherches sur le bois et une demi-douzaine de groupes de recherche disséminés dans les universités, notamment à l’Université Laval et dans les antennes régionales de l’Université du Québec.
L’arbre, puits de carbone
Les possibilités pour ouvrir de nouveaux débouchés à l’industrie du bois sont finalement assez nombreuses. Ainsi, il serait possible d’en faire des adhésifs. « Pour ce faire, on extrait des phénols des tannins contenus dans l’écorce, notamment dans celle des épinettes, explique Alain Cloutier, professeur à l’Université Laval et directeur du Centre de recherche sur les matériaux renouvelables. C’est un gain majeur parce que, dans l’industrie du bois, l’écorce doit souvent être enfouie ou brûlée. »
Un autre développement vise à tirer une matière isolante de la fibre des résineux. « Ça ressemble à de la laine minérale, mais c’est à base de fibre de bois », note le chercheur. Le nouveau produit affiche un facteur d’isolation équivalent à celui de la laine minérale. Toutefois, il présente au départ une vulnérabilité à l’humidité et à la condensation, faiblesse qu’on peut contrer en faisant subir au bois un traitement à la chaleur pour qu’il absorbe moins l’eau. « On n’y est pas tout à fait encore, mais on n’est pas loin de la commercialisation », affirme M. Cloutier.
Une voie particulièrement prometteuse consiste à perfectionner les bois plastiques, des mélanges de plastique et de fibre de bois qui s’apparentent aux composites de carbone. « On peut mouler un tel matériau, fait ressortir Alain Cloutier, notamment pour en faire des panneaux de porte d’automobile ou des pare-chocs. »
Chez FPInnovations, une grande partie des avancées touchent la traditionnelle pâte à papier, mais utilisée à d’autres fins. Rappelons que l’organisme est issu de l’ancien Paprican, centre de recherche détenu par l’ensemble des grandes entreprises de pâtes et papiers.
On se trouve ici au coeur même de l’industrie du bois du Québec, qui a été dominée de tout temps par les papetières et dont l’avenir est en détresse à cause du déclin du papier. « On a perdu la moitié des papetières au cours des 15 dernières années, et l’emploi a baissé énormément depuis la crise de 2008 : on n’a plus que 60 000 travailleurs », rappelle Patrick Dallain, directeur général du SEREX, CCTT consacré à la transformation des produits forestiers.
« C’est la filière de l’avenir, dit Pierre Lapointe : utiliser certaines caractéristiques des pâtes de bois pour en tirer d’autres produits que le papier. » Une de ces caractéristiques tient à la fibre même du bois, qu’on oriente vers une toute nouvelle application, le textile, comme on le fait déjà avec les fibres du bambou. La cellulose, autre composante de la pâte, peut quant à elle être utilisée pour nombre d’applications inédites, notamment dans le secteur des caoutchoucs synthétiques, une initiative d’une des usines de Résolu, à Thunder Bay.