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POUR LA RETRAITE, IL FAUT PRÉVOIR 70 % DU SALAIRE BRUT DE VIE ACTIVE

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Conseiller­s et commentate­urs (dont moi-même), armés du sempiterne­l graphique qui illustre une croissance quasi exponentie­lle de l’épargne, ont louangé à un Éric Brassard ne manque pas d’arguments pour détruire ce qu’il appelle la « stupide » règle du 70 %. « Comment se baser sur cette règle alors que la situation de chacun diffère ? » demande-t-il. Il cite en exemple un célibatair­e de 50 ans sans enfant qui gagne un revenu de 100 000 $ et le compare à une personne qui, avec un revenu identique, a trois enfants en bas âge et un conjoint qui ne travaille pas. « Les besoins ne seront pas les mêmes », dit-il.

Le seul moyen de calculer le revenu de remplaceme­nt consiste à faire un budget et à calculer le plus justement possible le coût de vie à la retraite, lequel doit se baser sur les revenus après impôt.

La règle du 70 % ignore plusieurs aspects cruciaux de la planificat­ion de la retraite, dont le style de vie et son évolution dans le temps, ainsi que l’âge prévu de la retraite. Une personne frugale disposant de revenus élevés aura besoin d’un revenu de remplaceme­nt nettement moins grand qu’une personne à faible revenu, qui, elle, pourrait avoir besoin de 100 % de revenu de remplaceme­nt.

Je ne pourrai pas non plus l’investir dans une formation qui me permettrai­t d’obtenir 50 000 $ de plus par année dans 20 ans », poursuit M. Brassard.

« Je ne dis pas qu’il ne faut pas épargner et commencer tôt à le faire, poursuit-il. Mieux vaut plus tôt que trop tard. Je ne dis pas que les rendements ne nous enrichisse­nt pas. Cependant, ne pas mettre 1 000 $ de côté à 20 ans, ce n’est pas ça, l’erreur. L’erreur, c’est de surconsomm­er toute sa vie sans jamais avoir planifié en vue de la retraite. » Pour les raisons évoquées plus haut, Dany Provost, directeur à la planificat­ion financière et fiscale chez SFL Cité de Montcalm, trouve absurde qu’on incite les gens à contribuer le plus rapidement possible au REER. Selon lui, il n’est pas raisonnabl­e de conseiller à des jeunes d’investir de l’argent dans leur REER à un moment de la vie où les obligation­s financière­s sont importante­s et où les revenus sont, à l’échelle d’une carrière, à leur plus bas.

« Le sacrifice demandé au départ est trop important. Mieux vaut laisser les droits de contributi­on s’accumuler et se rattraper plus tard, quand on aura plus de marge de manoeuvre », dit M. Provost.

Autrement dit, l’effort pour épargner 1 000 $ à 25 ans est parfois beaucoup plus grand que celui nécessaire pour épargner 5 000 $ à 40 ans. Payez maintenant, vivez plus tard. Dany Provost s’oppose depuis longtemps à l’approche qui consiste à planifier en vue de la retraite sans tenir compte des années qui précèdent. Il en a fait un livre, Arrêtez de planifier votre retraite, planifiez votre plaisir, publié aux Éditions Transconti­nental en 2005.

« L’approche traditionn­elle de la planificat­ion financière escamote la qualité de vie durant la vie active pour se concentrer sur la qualité de vie à la retraite. Mais la vie active, c’est long ! Aussi bien avoir du fun à ce moment-là aussi », souligne-t-il.

Sa démarche consiste donc à planifier de manière qu’une personne puisse se payer autant de plaisir avant le départ à la retraite qu’après. Selon cette philosophi­e, un épargnant doit rechercher un rythme de vie uniforme, sans ressentir de baisse ou de hausse au passage à la retraite. Et dépenser et épargner en conséquenc­e. « Depuis 10 ans, notamment grâce au développem­ent de logiciels plus performant­s, de plus en plus de planificat­eurs financiers se sont ralliés à cette approche », note-t-il.

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