DBbabies : naître à Dubaï et conquérir le Canada
Il est rare qu’on mette sur pied une entreprise à l’étranger pour ensuite tenter de l’implanter dans son pays d’origine. C’est pourtant le parcours atypique de Danny B. Haddad, un Montréalais en exil depuis 20 ans revenu récemment de Dubaï avec le projet d’ouvrir des boutiques partout au Canada.
« J’ai toujours voulu revenir vivre à Montréal, avoue M. Haddad, depuis les Émirats arabes unis. Cependant, jamais je n’aurais cru que je reviendrais marié, avec deux enfants et propriétaire de ma propre chaîne de magasins! »
L’enseigne qu’il a mise sur pied en 2007 avec son épouse, Jenny Haddad, se nomme DBbabies. Elle se spécialise dans la vente d’articles à l’intention des parents de nouveaux-nés, un marché alors mal servi dans les pays du golfe Persique.
« Comme nous ne trouvions pas ce que nous cherchions pour notre nouveau-né à Dubaï, nous avons décidé de tenter de créer un magasin qui répondrait à nos besoins. De fil en aiguille, nous avons connu du succès! »
Une réussite qu’il espère répéter au Québec, puis dans le reste du pays. Contrairement à la plupart des détaillants concurrents, DBbabies ne se limite pas à la vente de pyjamas, de chapeaux et de vêtements pour bébés. Bien qu’il en vende aussi, le détaillant se spécialise dans la vente d’accessoires et de produits pour bébés « de la naissance à l’âge de huit ans », souligne M. Haddad. Cela va de la poussette à la chaise haute, en passant par le sac à langer, la literie et les produits de bain ou d’entretien biologiques. Profiter de la crise Compte tenu du parcours professionnel de M. Haddad, la décision de se lancer dans le commerce de détail était audacieuse. Jusque-là, il avait surtout oeuvré dans le développement hôtelier, notamment au sein d’entreprises comme Zabeel Investments, Essque Hotels & Resorts et WL Hospitality Group.
Le risque était d’autant plus élevé qu’à l’époque, l’industrie du commerce de détail vacillait. Le commerce en ligne commençait à faire sa place. Surtout, la crise économique de 2008 frappait de plein fouet les centres commerciaux de la région.
Celui qui a vécu au Canada, aux États-Unis et en Suisse avant de s’établir dans la région du Golfe a profité de l’occasion pour négocier à petit prix des baux à long terme dans les meilleurs centres commerciaux de la région. C’est ainsi que, tout en voyant au développement de sa plateforme web, DBbabies est rapidement parvenue à ouvrir sept boutiques à Dubaï, à Abu Dhabi et à Oman.
M. Haddad arrive aujourd’hui au Canada dans un contexte similaire. On ne parle ni de crise économique ni de récession, mais le commerce de détail connaît une telle transformation, avec la montée du commerce électronique, que les propriétaires de centres commerciaux se montrent particulièrement réceptifs à la venue du nouveau détaillant.
C’est ainsi qu’après avoir ouvert une première boutique en juin aux Promenades St-Bruno, sur la Rive-Sud de Montréal, DBbabies prépare l’ouverture d’une deuxième boutique cet automne, cette fois au Carrefour Laval, également propriété de Cadillac Fairview. L’entreprise entend poursuivre avec l’implantation progressive de boutiques dans les principales villes et provinces du pays, à commencer par l’Ontario à compter de 2018. Cette croissance se fera surtout sentir dans les grands centres commerciaux, mais M. Haddad ne ferme pas la porte à l’ouverture de magasins sur rue et dans les mégacentres. Chaque espace, laisse-t-il entendre, sera évalué au mérite.
Pas question pour l’instant d’ouvrir la porte au franchisage, un moyen par lequel plusieurs autres, comme Sports Experts ou Harvey’s, sont parvenus à financer leur expansion dans différents territoires.
« Pour moi, le système de franchisage reflète une façon ancienne de faire des affaires. Le risque de perte de contrôle est trop grand. En anglais, on parle de short term gain, but long term loss. »
Les fermetures nombreuses de magasins et la baisse notable de fréquentation des centres commerciaux en général n’effraient pas M. Haddad outre mesure. Au contraire, les hauts taux d’inoccupation actuels pourraient bien le servir.
En plus de la négociation de tarifs avantageux, le mix des centres commerciaux est en changement, explique-t-il. « Davantage d’espaces sont réservés au divertissement, à de nouveaux concepts de restaurants, à des cliniques de soins de beauté, tous des commerces qui ne se seraient jamais trouvés là par le passé. Je suis persuadé que ces changements parviendront éventuellement à susciter un plus grand achalandage. »
Et pendant ce temps, en raison de la notoriété gagnée jusqu’à maintenant surtout dans les centres commerciaux du golfe Persique, ses ventes Internet vont en augmentant. Pour l’heure, son commerce en ligne compte pour moins de 20% de ses ventes, mais les ventes en ligne doublent en volume chaque année, assure M. Haddad.
Aleva Naturals, AppleCheeks, Bugaboo, Noodle& Boo et Phil & Teds sont autant de marques que tient DBbabies. L’enseigne offre aussi la préparation de paniers-cadeaux et la livraison gratuite. Au besoin, elle vous prêtera une poussette le temps que la vôtre se fasse réparer. « Nous ne nous battons pas sur le prix, reconnaît M. Haddad, peu préoccupé par la concurrence que pourraient représenter Walmart et Toys‘R’Us dans ce créneau. Ce n’est pas ce qui nous démarque. Ce que nous vendons d’abord, c’est la qualité de nos produits et de notre service à la clientèle. »
la Vous exportez ou vous comptez exporter dans l’Union européenne (UE) ? Eh bien, malgré le libre-échange, les entreprises canadiennes feront encore face à plusieurs obstacles pour vendre leurs biens et leurs services en Europe.
L’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’UE est entré en vigueur le 21 septembre. De nombreuses entraves au commerce seront supprimées, dont la quasitotalité des tarifs douaniers sur les produits non agricoles, souligne Exportation et développement Canada (EDC) dans une analyse récente.
Par contre, plusieurs obstacles resteront en place. En entretien avec Les Affaires, Christian Sivière, fondateur et président de Solimpex, un spécialiste en logistique et en commerce international, explique quels sont les principaux éléments à surveiller pour les exportateurs.
1.Les tarifs Dès le 21 septembre, 98,4 % des tarifs sur les marchandises exportées dans l’UE seront abolis. Et d’ici 2024, cette proportion augmentera légèrement, à 98,8 %. Cela dit, certains produits continueront d’être soumis à des tarifs. Sont-ce les vôtres ?
Pour le savoir, il faut d’abord repérer le code SH du bien ou de la marchandise, selon Christian Sivière. Vous pouvez le trouver en consultant le site de Postes Canada. Une fois le code en main, vous pourrez vérifier si vous devez payer ou non un tarif douanier, et ce, à l’aide du site Info-Tarif Canada.
2.La réglementation Les différentes réglementations dans un marché peuvent représenter des barrières non tarifaires. Dans l’Union européenne, la plus importante est le fameux marquage CE. Il doit être apposé sur tous les produits vendus sur le marché européen. Ce marquage certifie qu’un produit – fabriqué en Europe ou ailleurs – est conforme aux règles de l’UE.
Les exigences concernant le CE varient toutefois d’un produit à un autre, précise Christian Sivière. « Ces exigences sont par exemple plus grandes dans le domaine médical et dans le secteur des jouets », dit-il.
L’AECG ne soustrait pas les entreprises canadiennes à cette réglementation. Par contre, il permet désormais d’obtenir le marquage CE au Canada. Nul besoin d’aller en Europe comme c’était le cas auparavant, ce qui représentait du temps et de l’argent, surtout pour les PME.
Des organisations canadiennes seront bientôt accréditées pour founir ce marquage dans les principales villes du pays, selon M. Sivière.
3.Les seuils des contrats gouvernementaux Le marché des contrats gouvernementaux (ou de l’approvisionnement public) de l’UE est le plus vaste du monde. Il est évalué à 3 300 milliards de dollars par année (incluant le Royaume-Uni), soit deux fois la taille du PIB canadien, selon le ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation du Québec.
Ce marché inclut les principales institutions de l’UE, les gouvernements des 28 États membres (et du Royaume-Uni) et des milliers de gouvernements régionaux et locaux. Aussi vastes soient-ils, les marchés publics euro- péens ne sont pas totalement ouverts aux entreprises canadiennes. Il y a des seuils sous lesquels elles ne peuvent pas soumissionner, précise Christian Sivière.
Par exemple, dans les services publics (eau, électricité, aéroports, ports, transport urbain), les exportateurs peuvent uniquement soumissionner sur des appels d’offres quand la valeur des achats est supérieure à 418 000 euros pour les biens et les services, et à 5,2 millions d’euros dans la construction.
4.Les quotas Malgré le libre-échange, les quotas sur certains produits resteront en place pour les exportateurs canadiens en Europe. L’industrie porcine en est un bel exemple, souligne Christian Sivière. Le quota canadien dans l’UE passera de 6 000 à 75 000 tonnes de porc par année. Ainsi, quand les producteurs auront atteint cette limite, ils ne pourront plus vendre leur viande de porc en Europe, même s’il y a toujours une demande pour celle-ci. L’enjeu est de taille pour le Québec, car l’industrie porcine du pays est concentrée dans cette province.
Le quota canadien de boeuf sur le marché européen augmentera aussi, passant de 15 000 à 65 000 tonnes par année. Au Canada, l’industrie bovine est concentrée dans l’Ouest.
5.La taxe sur la valeur ajoutée Si l’AECG supprime la plupart des tarifs douaniers, il n’élimine pas la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans l’UE, dont le niveau varie d’un pays à un autre. Plusieurs organisations européennes donnent de l’information à ce sujet, dont la Commission européenne. Dans la plupart des cas, les exportateurs canadiens doivent payer la TVA. Par exemple, si votre contrat d’exportation avec votre client européen a un incoterm DDP ( Delivered Duty Paid), vous devrez payer cette taxe, selon Christian Sivière.
Cet incoterm précise que l’exportateur doit assumer tous les coûts de livraison (logistique, taxes, etc.) d’une marchandise. « Cette approche coûte plus cher, mais c’est un avantage concurrentiel », dit M. Sivière.
6.Les règles d’origine Les règles d’origine sont au coeur de l’AECG, comme de tous les accords de libre-échange. Pour les entreprises canadiennes, elles déterminent si le produit que vous exportez ou que vous voulez exporter en Europe a été fabriqué au Canada. Ce processus est compliqué, car des entreprises importent souvent des matières premières ou des composants.
L’accord avec l’UE exige un seuil moyen de 50 %. Cela signifie qu’au moins 50 % de la valeur des produits canadiens exportés dans l’UE doit avoir été fabriquée ici afin de profiter de l’abolition des tarifs.
« Les exportateurs doivent donc toujours bien documenter leur approvisionnement et leur processus de production », dit Christian Sivière.
Les règles d’origine avec l’UE sont moins exigentes que celles de l’Accord de libreéchange nord-américain (ALÉNA), qui imposent actuellement un seuil minimal de 60 %. Par exemple, pour les pièces automobiles, le pourcentage d’origine canadienne à respecter dans l’AECG est de 50 %, comparativement à 62,5 % dans l’ALÉNA.
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