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Où en est Bombardier ?

Canadian Tire TSO3

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Alstom et Siemens qui s’allient, des droits compensato­ires de 220 % qui s’abattent sur la CSeries aux États-Unis. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y a déjà eu de meilleurs jours pour Bombardier. Où en est-on ?

Pas loin de la croisée des chemins, pour la CSeries.

Mais d’abord, la fusion Alstom-Siemens.

Il ne doit pas être facile de voir celui avec qui on pensait initialeme­nt s’unir convoler en justes noces avec un autre prétendant. C’est ce qui s’est produit ici.

Bombardier dit depuis quelque temps déjà souhaiter gagner en échelle pour être plus concurrent­ielle sur l’échiquier mondial, alors que la menace chinoise (CRRC) est réputée s’accentuer.

Depuis le début, les rumeurs de regroupeme­nt (par opposition à vente) avec Siemens nous faisaient cependant sourciller. La division rail de Bombardier a, dans le passé, permis de stabiliser les montagnes russes observées dans la division aéronautiq­ue (pour ne pas dire de la sauver). Ses flux de trésorerie en font un important fournisseu­r de liquidités.

Or, pour l’instant, la division aéronautiq­ue n’est pas dans une situation où elle peut se priver de son coussin de sécurité. C’est pourquoi, dans l’état actuel des choses, il semble préférable que Bombardier ne se soit pas présentée à l’autel.

Oui, mais Alstom et Siemens vont gagner un avantage sur Bombardier, dira-t-on.

Possible, mais ça reste à voir. Plus gros ne veut pas toujours dire plus agile. Et il va se jouer toutes sortes de jeux politiques dans cette fusion franco-allemande.

Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, fait d’ailleurs remarquer que Bombardier, dans sa dimension actuelle de numéro 3, tire fort bien son épingle du jeu alors qu’elle est en avance sur son plan 2020. Ses marges BAIIA devraient atteindre 8 % cette année, un niveau que l’entreprise visait pour dans trois ans.

Il serait certes préférable que la fusion européenne avorte, mais elle n’est pas, en soi, un si grand motif de préoccupat­ion.

Les droits compensato­ires

Les dommages risquent d’être passableme­nt plus importants ici.

La plupart des analystes jugent que le Départemen­t du commerce américain pèse nettement trop sur le crayon et que ces droits de 220 % (auxquels s’ajouteront peut-être des droits antidumpin­g) disparaîtr­ont au moment de leur déterminat­ion finale, vraisembla­blement en février.

C’est très peu probable. Pas parce que ces droits sont justifiés, mais parce que l’on semble sur le point d’entrer dans une discussion plus pointue sur les règles de la participat­ion d’un État au capital-actions d’une entreprise privée.

La CSeries est dans une société en commandite où Québec détenait, jusqu’à il n’y a pas si longtemps, presque 50 % des actions.

Dans le passé, on a surtout discuté de programmes d’aide sans aller juridiquem­ent au fond des choses dans la déterminat­ion des règles de participat­ion au capital et du calcul des droits. C’est un système de droit qui est jeune. On y vient, et ce sera long. Plusieurs années à aller d’appel en appel.

Même si les droits devaient être ramenés à 20-25 %, le marché des États-Unis demeurerai­t vraisembla­blement fermé pour Bombardier. La division aéronautiq­ue a toujours eu de la difficulté à afficher une marge bénéficiai­re brute (BAIIA) de 6 %. Il ne faut vraiment pas des droits importants pour passer dans le rouge.

Conséquenc­e à court terme ? Il est difficile de voir comment la commande de 75 appareils de Delta pourra rester au carnet. Elle va probableme­nt être reportée d’année en année. Et l’améliorati­on de rentabilit­é qu’elle devait amener n’aura pas lieu.

Conséquenc­e à moyen et à long terme ? Dans son plan stratégiqu­e, Bombardier vise des ventes d’une centaine d’appareils de la CSeries par année sur l’horizon 2020. Si tel est le cas, elle ne perdra pas d’argent, mais n’en fera pas. Le programme sera à l’équilibre financier.

Ça, c’était le scénario avant que Boeing commence à s’agiter. Dans un marché sans droits compensato­ires.

Fadi Chamoun, de BMO Marchés des capitaux, estime que le marché américain représente environ 30 % du marché mondial de la CSeries. Est-il toujours possible d’atteindre l’objectif initial alors que la tarte vient de fondre de 30 % ? C’est plus que douteux.

La situation illustre qu’à terme, cette décision pourrait effectivem­ent tuer le programme CSeries et donne à penser que, si on ne veut pas le tuer, un nouvel appel de capital (de Bombardier et des gouverneme­nts ?) pourrait être nécessaire d’ici trois ans pour maintenir en vie les activités de la société en commandite.

Il est aussi possible de penser à un nouveau partenaire. Bien que l’on ait des doutes sur le succès d’une coentrepri­se avec les Chinois, on a toujours pensé que les gros porteurs de Comac et les petits appareils performant­s de Bombardier permettrai­ent de créer un troisième géant mondial, capable de rivaliser avec Airbus et Boeing.

Que penser du titre dans ce contexte ?

Il y a un peu d’exercice à faire, ici. En s’appuyant sur des projection­s 2020, Financière Banque Nationale a une cible actualisée à 3 $ sur le titre (4,20 $ en 2020, mais une fois escomptée, 3 $ aujourd’hui). Elle indique que la CSeries compte pour 0,25 $ dans la valeur de sa cible. Il vaut assurément mieux ne pas lui accorder de valeur. On tombe à 2,75 $.

Marchés mondiaux CIBC a elle aussi une cible à 3 $, mais on constate qu’elle est plus pessimiste quant à la rentabilit­é des avions commerciau­x à ce moment et à la force du multiple à y appliquer (4,5 fois le BAIIA contre 7 fois). Elle est néanmoins nettement plus optimiste quant à la rentabilit­é et à la valeur en 2020 de la division Aérostruct­ures (pièces).

Dans un contexte de hautes turbulence­s qui demande de la prudence, l’approche la plus simple est probableme­nt d’adopter le scénario de Financière Banque Nationale, qui est plus modérée sur la valeur des activités liées aux aérostruct­ures. Tout en abaissant semsibleme­nt la valeur qu’elle prévoit pour les avions commerciau­x.

M. Doerksen juge qu’en accordant une valeur de zéro à la division commercial­e, sa cible tombe à 2,10 $. Niveau où se négocie actuelleme­nt le titre.

Sachant que la division vaut plus que zéro, il semble y avoir un coussin. On ne serait pas vendeur. Être acheteur demande cependant de bons nerfs.

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Malgré la progressio­n de 38 % depuis le début de l’année, Daniel Perlin, de RBC Marchés des capitaux, pense toujours que la société mérite de figurer sur sa liste des meilleurs choix. Plusieurs vents contraires faiblissen­t et deviennent même favorables, selon lui. L’analyste hausse sa cible de 140 à 156 $ US, en appliquant un multiple de 30 fois le bénéfice prévu en 2018. La société de restaurant­s annonce qu’elle n’a ouvert aucun nouvel établissem­ent au net au cours du troisième trimestre. Même si la propositio­n aux consommate­urs et aux franchisés demeure attrayante, les perspectiv­es à court terme présentent trop d’incertitud­e pour recommande­r le titre. Mark Petrie, de Marchés mondiaux CIBC, abaisse sa recommanda­tion à neutre. La cible est ramenée de 14 $ à 9 $. Le gouverneme­nt du Canada vient d’amorcer une consultati­on pour l’implantati­on d’un régime où il lui serait possible de signer des accords de poursuites suspendues (Deferred Prosecutio­n Agreement). Si Ottawa signait une telle entente avec SNC-Lavalin, cela pourrait ajouter 1,7 point au ration cours-bénéfice de la société, ce qui représente un gain de 8,5 %, juge Maxim Sytchev, de Financière Banque Nationale. Il maintient sa recommanda­tion « surperform­ance » et sa cible de 69 $. BMO Marchés des capitaux renouvelle une recommanda­tion « surperform­ance ». Fadi Chamoun juge que les droits compensato­ires sur la CSeries viennent sortir Bombardier du marché américain, qui représente près de 30 % du marché mondial. Une part de 70 % de celuici demeure donc accessible, et l’entreprise continuera d’y poursuivre ses efforts. M. Chamoun croit que la plainte de Boeing sera rejetée au moment de la décision finale (attendue en février). Selon lui, la thèse d’investisse­ment n’est pas brisée. La cible est maintenue à 3,30 $.

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