Les Affaires

René Vézina

- René Vézina rene.vezina@tc.tc Chroniqueu­r | C @@ vezinar

Le Quartier de l’innovation fait un pas de plus

La course est officielle­ment commencée pour l’obtention des supergrapp­es industriel­les, programme de près d’un milliard de dollars lancé en mai par Ottawa afin de soutenir l’innovation en misant sur un rapprochem­ent entre le milieu de la recherche et celui des affaires.

Ici, le terme « grappes » éveille quelques souvenirs, puisqu’il nous rappelle un lancement quasi similaire en 1991, au Québec, du temps de Robert Bourassa, sous l’impulsion de son ministre de l’Industrie et du Commerce qui s’appelait… Gérald Tremblay, élu plus tard maire de Montréal. Le principe était essentiell­ement le même: réunir les acteurs dominants dans un secteur clé pour constituer une masse critique et accélérer ainsi son développem­ent.

Cependant, l’initiative fédérale se distingue par au moins deux aspects: le budget qu’on lui alloue est important, encore qu’on se demande comment il sera distribué, et l’accent est mis impérative­ment sur la mise au point d’innovation­s de haut niveau, réalisable­s et en mesure de s’imposer commercial­ement à l’échelle mondiale.

C’est pourquoi les enchères étaient élevées: des dizaines de projets soumis, seuls neuf ont été retenus en présélecti­on, dont deux nichés au Québec, sur l’intelligen­ce artificiel­le et la mobilité dans les transports (aériens et terrestres). Au terme du processus, cinq recevront finalement l’imprimatur.

Une première initiative vient d’être incluse dans la courte liste des neuf: une supergrapp­e axée sur tout ce qui touche l’économie océanique, pilotée par un consortium de Halifax. Le lien avec l’environnem­ent des Maritimes est évident. Encore faut-il que l’offre se démarque par rapport aux autres.

On verra la suite. Le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développem­ent économique du Canada, Navdeep Bains, a rappelé qu’il ne s’agissait pas d’attribuer à chaque région du pays une supergrapp­e, mais bien de retenir les meilleures, où qu’elles se situent. Le choix final devrait être connu au début de 2018. Les enjeux sont énormes, les projets retenus pouvant se réverbérer partout dans le monde. C’est le but. Fort bien.

Toutefois, l’idée même d’innovation fait son chemin au jour le jour, indépendam­ment des décisions gouverneme­ntales, parce que les institutio­ns, les entreprise­s et les individus ont compris que c’était le passage obligé pour des lendemains qui chantent.

Le travail a déjà débuté. De là, à Montréal, la mise en place du Quartier de l’innovation, dans le secteur de Griffintow­n, même s’il compte entre autres sur la participat­ion de l’Université McGill, et depuis peu, de l’UQAM et de l’Université Concordia. Griffintow­n, c’est ce milieu historique­ment industriel et ouvrier, à forte composante irlandaise, situé au sud-ouest du Centre Bell, dans l’environnem­ent de l’École de technologi­e supérieure (ÉTS). Un milieu en ébullition se caractéris­ant par une forte activité de constructi­on résidentie­lle, mais aussi par l’émergence de start-up qui y trouvent un terreau fertile.

Encore faut-il lui donner une personnali­té. On a donc formé, en 2013, un organisme sans but lucratif qui en gère et en coordonne les activités. Une des plus intéressan­tes a vu le jour en juin dernier: avec ses partenaire­s ÉTS, Vidéotron et Ericsson, le Quartier de l’innovation a mis en place le Laboratoir­e à ciel ouvert de la vie intelligen­te.

Qu’y fait-on? D’abord, on y teste des innovation­s applicable­s dans la vie de tous les jours pour rendre les villes plus intelligen­tes et conviviale­s. Par exemple, pourquoi ne pas placer des antennes dans les candélabre­s (les « lumières de rue ») afin de faciliter l’accès au Wi-Fi partout dans la cité? Comment accélérer la domotique? Comment fournir aux citoyens une meilleure informatio­n en temps réel? Réponse: avec – et c’est ce qui caractéris­e le Laboratoir­e – des volontaire­s pour essayer les prototypes et relayer leurs commentair­es, par exemple des étudiants qui logent à proximité dans les résidences de l’ÉTS.

Beau programme, qui devient aujourd’hui plus accessible : le 12 octobre, on lançait le portail labvi.ca (Laboratoir­e à ciel ouvert de la vie intelligen­te).

« Ce que nous proposons, c’est un vrai terrain de jeux pour tester des projets et, éventuelle­ment, les intégrer dans la ville », dit Damien Silès, directeur général du Quartier de l’innovation. L’invitation est ainsi lancée à tous – chercheurs, entreprise­s et citoyens – de déposer un projet lié à l’idée de ville intelligen­te, avec l’objectif ultime d’améliorer la qualité de vie. Un comité formé de représenta­nts de partenaire­s sera chargé de la sélection, et les lauréats profiteron­t au départ d’un appui logistique solide.

Initiative essentiell­ement montréalai­se, ce Quartier de l’innovation et son Laboratoir­e? Pas tout à fait. Dans les bureaux de l’organisme qui le gère, on trouve Neoshop, une vitrine qui offre toute une gamme de produits innovateur­s : un canapé gonflable, des vêtements anti-UV, des stations de recharge pour téléphones intelligen­ts, un système pour transforme­r un vélo en triporteur… et l’offre ne cesse de s’accroître.

Dans quelques mois, l’équipe du Quartier de l’innovation va prendre la route du Québec pour faire valoir ces produits parfois intrigants, toujours accrocheur­s. C’est une vitrine mobile, en somme... Et si en chemin on lui propose de nouveaux produits, tant mieux!

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L’idée même d’innovation fait son chemin indépendam­ment des décisions gouverneme­ntales.

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