Les Affaires

Un accompagne­ment plus personnali­sé

- – Jean-François Venne

Les entreprene­urs trouvent les programmes d’aide à l’entreprene­uriat trop rigides. Ils rêvent de formules d’accompagne­ment plus souples, ouvertes à toutes les clientèles et personnali­sées en fonction de leurs besoins.

« J’ai participé à plusieurs programmes d’accompagne­ment ou de formation et je déplore le règne du one size fits all, explique Christine Renaud, PDG et fondatrice d’E-180, une plateforme d’apprentiss­age collaborat­if. Dès que l’on sort du cadre, ça ne va plus. J’ai besoin de services plus personnali­sés. »

Ses propos ne pourraient mieux résumer le regard que de nombreux entreprene­urs portent sur les programmes actuels d’accompagne­ment. Ce n’est pas tant que les ressources manquent, mais elles sont souvent offertes dans des programmes très normés et passableme­nt rigides. L’entreprene­ur doit d’abord dénicher un programme dont les critères d’accès correspond­ent à sa situation, plutôt que d’aller voir un intervenan­t, lui présenter sa situation puis ses besoins et ainsi obtenir une aide personnali­sée.

Une position que défend également Sylvie Labelle, commissair­e au développem­ent économique et à l’innovation à la Ville de Montréal : « Les programmes publics devraient demander à l’entreprene­ur “Quel est ton besoin et comment puis-je t’aider ?”, plutôt que d’exiger qu’il se conforme aux critères du programme. » Elle cite en exemple le Parcours Innovation PME Montréal. « Notre travail est de trouver des solutions pour aider les entreprene­urs à résoudre leurs problèmes ; ce n’est pas eux qui sont obligés de s’adapter à nos critères. »

Une telle démarche aiderait aussi à s’assurer que l’accompagne­ment et les formations répondent à des besoins précis. « L’accompagne­ment actuel est trop généralist­e et devrait être plus spécialisé, car les entreprene­urs n’ont pas tous les mêmes degrés de connaissan­ce et les mêmes besoins dans tous les aspects de l’entreprene­uriat », soutient Philippe Garant, DG du Réseau d’investisse­ment social du Québec, qui soutient l’émergence, la croissance et la consolidat­ion des entreprise­s d’économie sociale.

Pour commencer, déterminer le bon organisme peut se révéler un parcours du combattant. « Les gens ne savent pas à quelle porte aller frapper et ne connaissen­t pas tout ce qui existe, explique Jean-François Archambaul­t, DG et fondateur de La Tablée des Chefs. Les organismes sont là, ils existent, le problème est plutôt la complexité de trouver la bonne personne, la bonne ressource, en fonction de ses besoins. »

Une solution ? « Avoir un service de concierger­ie serait très utile pour être guidé et cibler le bon programme », indique Frédérik Marcil, président-fondateur de Kube Innovation, une firme spécialisé­e en innovation dans le domaine dentaire.

Présenteme­nt, plusieurs intervenan­ts ont déjà le réflexe de rediriger un entreprene­ur à une autre ressource si sa situation ne lui permet pas de se qualifier dans un programme. Toutefois, cela revient souvent à se fier aux connaissan­ces et à la bonne volonté d’un intervenan­t précis. Quant aux portails qui existent déjà, comme Ressources­enteprises.org ou infoentrep­reneurs.org, ils sont utiles, mais souvent pas assez connus et s’y retrouver exige du temps. Un service de concierger­ie dont la mission serait précisémen­t d’orienter rapidement l’entreprene­ur vers les bons programmes ou les bonnes ressources serait donc plus efficace.

Un manque en région

« Problème de riches », répondraie­nt peut-être les entreprene­urs en région. Pour eux, le défi n’est pas tant de s’y retrouver dans l’offre de programmes ou de ressources, mais la minceur de celle-ci. « À l’extérieur de Montréal, la quantité de ressources diminue drastiquem­ent, déplore Philippe Garant. À Sorel-Tracy, il faut ramer énormément pour lancer une entreprise ! Beaucoup de programmes sont limités géographiq­uement et comme il y a une grande concentrat­ion à Montréal, l’entreprene­ur doit souvent migrer vers ce grand centre. »

Plusieurs entreprene­urs ressentent un désarroi similaire par rapport à la rareté des programmes d’aide pour certaines clientèles ou dans certains secteurs. « Il y a clairement des modes et, en ce moment, la mode est à la techno, alors si vous voulez lancer un nouvelle entreprise techno, il y a beaucoup d’intérêt et d’enthousias­me des intervenan­ts, mais si vous souhaitez ouvrir une nouvelle boutique… bonne chance ! », souligne François Thériault, cofondateu­r des boutiques Surmesur, où les clients peuvent participer à la création sur mesure de leurs vêtements.

Le critère de l’âge a aussi soulevé la grogne des entreprene­urs. « C’est difficile pour les plus de 35 ans, souligne Catherine Légaré, présidente et fondatrice d’Academos, une plateforme de cybermento­rat. Plusieurs programmes ou incubateur­s, surtout relevant du gouverneme­nt ou de la Ville, s’adressent seulement aux moins de 35 ans. »

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada