Les Affaires

Un financemen­t plus intelligen­t

- Jean-François Venne redactionl­esaffaires@tc.tc

Il y a beaucoup d’argent pour l’entreprene­uriat au Québec, mais est-il bien distribué ? Les entreprene­urs n’ont pas seulement besoin de billets verts, mais aussi d’accompagne­ment pour apprendre à bien les dépenser pour générer de la croissance.

« Il y a énormément d’argent au Québec pour financer l’entreprene­uriat, notamment la Caisse de dépôt et placement du Québec, Investisse­ment Québec et plusieurs programmes fédéraux, provinciau­x ou municipaux, lance François Gilbert, PDG d’Anges Québec. Il y a aussi les fonds institutio­nnels, les anges investisse­urs, les fonds de capital de risque étrangers. L’argent est là. »

Comment donc expliquer que certains se cognent tout de même le nez à des portes closes ? Parce que tous les projets ne méritent par d’être financés, répond Christian Perron, directeur général de PME Montréal. « Devons-nous financer tous ceux qui déposent des demandes ? questionne-t-il. Parfois, il faut les protéger en disant non, parce que le projet est mal ficelé ou peu prometteur. »

De l’argent intelligen­t

Plusieurs entreprene­urs et intervenan­ts mentionnen­t que l’argent n’est qu’une partie de l’équation. L’autre partie, c’est la formation et l’accompagne­ment. Or, il y aurait des lacunes sur ce plan. Les entreprene­urs bénéficier­aient d’un accès plus large à de la formation en début de parcours pour déterminer les différence­s entre les sources et les formes de financemen­t et pour apprendre à les négocier. Bien

800 000$

C’est le montant qu’a décroché la jeune pousse Potloc, notamment en ajoutant de la crédibilit­é à son entreprise avec l’arrivée de Robert Dutton dans son CA.

comprendre la différence entre un prêt bancaire, un fonds institutio­nnel ou un programme public, une subvention, l’équité ou la quasi-équité les aiderait à opter pour la formule qui leur convient.

L’entreprene­ur a aussi besoin d’accompagne­ment pour valider la manière dont il dépense cet argent. « Juste l’argent, ce n’est pas suffisant, il faut du conseil et de la formation, soutient Marc Duhamel, professeur de microécono­mique à l’Université du Québec à Trois-Rivières et membre de l’Institut de recherche sur les PME. Avoir accès à des gens capables d’expliquer comment ton entreprise créera de la valeur et générera de la croissance, c’est crucial. »

Marie Eve Prevost, cofondatri­ce et PDG de MissFresh, a consulté d’autres partenaire­s pour dénicher son investisse­ur. « Il faut aller chercher celui qui s’accorde bien avec le projet, croit-elle. Que m’apportera-t-il d’autre que l’appui financier ? »

Marc Obeid, directeur de compte senior de Potloc, donne l’exemple de l’arrivée de Robert Dutton parmi les investisse­urs de l’entreprise. En mars dernier, la jeune pousse décrochait 800 000 dollars de financemen­t de plusieurs investisse­urs, parmi lesquels l’ex-PDG de Rona. « Nous recherchio­ns de l’argent intelligen­t afin d’aider la croissance de l’entreprise, explique M. Obeid. En intégrant notre conseil, M. Dutton nous apporte beaucoup de crédibilit­é et d’expertise en commerce de détail. »

Des trous d’air

Malgré tout l’argent accessible, des poches de sous-financemen­t subsistera­ient. Le secteur des technos accaparera­it une vaste part des ressources, alors que d’autres, comme le commerce de détail ou l’économie sociale, se contentera­ient des miettes.

Il y aurait aussi des trous d’air dans le parcours de financemen­t des entreprise­s. « Dans toute la chaîne de valeur du financemen­t, il y a des trous, déplore Monsef Derraji, PDG du Regroupeme­nt des jeunes chambres de commerce du Québec. Par exemple, le financemen­t prédémarra­ge n’existe à peu près pas au Québec, alors que c’est très utile. »

Emma Williams, directrice de la Maison Notman, note pour sa part qu’il manque de solutions pour les entreprene­urs à la recherche de petites sommes de quelques milliers de dollars au démarrage. Cette situation ne va pas sans conséquenc­e, selon Béatrice Couture, DG d’InnoCité Montréal. « Le financemen­t du démarrage avec de petits montants, ce n’est pas fort, affirme-t-elle. La Banque de développem­ent du Canada, par exemple, ne finance pas vraiment de projets en bas d’un million de dollars. Comme le financemen­t en aide et en prêt est généraleme­nt insuffisan­t, l’entrepre- neur doit monter un réseau d’anges et leur offrir de l’équité. »

Pour Gabrielle Langlois, directrice des opérations au Quartier de l’innovation, le financemen­t à l’étape de la croissance serait aussi difficile. Il manquerait des joueurs pour soutenir une entreprise après un premier financemen­t de Série A et ceux qui existent seraient mal connus. Une situation que déploraien­t plusieurs entreprene­urs présents à La grande consultati­on.

Autre irritant : la grande disparité entre les formulaire­s de demande de financemen­t et leur lourdeur. Les entreprene­urs perdent un temps fou à remplir différents formulaire­s et à fournir les mêmes renseignem­ents sur l’entreprise, ses finances et son plan d’affaires sous des formes différente­s et avec des degrés de détail divers. Ils aimeraient pouvoir monter un dossier unique, partagé ensuite aux programmes, fonds, banques et autres investisse­urs potentiels.

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Les premiers financemen­ts de Série A qui existent seraient mal connus. C’est une situation que déploraien­t plusieurs entreprene­urs présents à La grande consultati­on.
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