Les Affaires

Une région qui regorge d’entreprene­urs aguerris

- Pierre Théroux redactionl­esaffaires@tc.tc environnem­ent président de Viridis

Panel — La Montérégie ne manque pas d’entreprene­urs chevronnés. Comme Alain Chalifoux et Brigitte Jalbert, qui ont baigné dans l’entreprise familiale dès leur plus jeune âge, et Renaud Lapierre, qui s’est familiaris­é avec l’entreprene­uriat dès l’université avant de devenir un entreprene­ur en série. Ces trois dirigeants ont témoigné de leur expérience lors d’une rencontre en Montérégie, organisée par Les Affaires dans le cadre de sa tournée des régions sous le thème du renouveau entreprene­urial. L’événement a aussi réuni une trentaine de personnes dont Jean Bédard, président du Groupe Sportscene, ou encore Nicolas St-Pierre, jeune successeur de son père à la Fondation Mira.

Peu d’entreprise­s familiales réussissen­t à passer le flambeau à la troisième génération. C’est encore plus rare pour la quatrième génération, un exploit qu’a réussi la Laiterie Chalifoux en transforma­nt aussi les façons de faire en cours de route. « Il n’y avait pas eu d’innovation depuis 20 ans. On a fait de grands changement­s pour assurer le développem­ent de l’entreprise », souligne Alain Chalifoux, président de ce producteur de fromages et de yogourts connus sous la marque Riviera, fondée à Sorel en 1920.

M. Chalifoux se rappelle encore lorsque, jeune ado, quand il devait se rendre à Montréal pour des traitement­s d’orthodonti­e, son père en profitait aussi pour faire une tournée de clients comme la famille Steinberg. « Mon père m’amenait partout, même à des réunions du Conseil des industriel­s laitiers du Québec dont je suis aujourd’hui le vice-président », souligne-t-il.

Passation des pouvoirs

Même s’il semblait destiné à prendre un jour les rênes de l’entreprise où il a commencé à travailler très jeune, il la quittera en 1993 avant d’y revenir en 2009. À l’époque, l’entreprise était gérée par son grand-père et ses quatre fils et « laissait peu de place à l’actionnari­at », dit-il pour expli- quer son départ. Le diplômé de l’Institut de technologi­e agroalimen­taire, de Saint-Hyacinthe, lance alors sa propre entreprise, une firme de consultant­s en procédé d’ingénierie de transforma­tion alimentair­e qui comptera notamment Olymel parmi ses clients. En 2009, il revient dans le giron de l’entreprise familiale, qui transforme annuelleme­nt plus de 30 millions de litres de lait et a depuis doublé ses revenus. « Ça a pris seulement six mois pour vendre 50% des parts de mon entreprise, mais trois ans pour négocier la relève familiale! », rappelle-t-il.

La passation des pouvoirs a aussi été longue pour Brigitte Jalbert, la présidente-directrice générale d’Emballages Caroussel, une entreprise de Bouchervil­le spécialisé­e dans la production et la distributi­on de produits d’emballage alimentair­e et industriel. « Mon père a eu de la difficulté à lâcher prise », souligne celle qui a finalement repris en 2011 le flambeau de l’entreprise fondée en 1971, après en avoir assumé la vice-présidence pendant près de 15 ans. Pourtant, la présence de Mme Jalbert au sein de l’entreprise familiale devait être passagère. D’autant que l’entreprene­uriat était à des années-lumière de son univers. « J’étais là en attendant », dit celle qui a rejoint son père après des études en arts et qui souhaitait devenir photograph­e. « Comme je n’aime pas la comptabili­té et que je ne conduis pas de camion, je ne voyais pas ce que je pouvais y faire. » Elle mettra à profit sa créativité et ses talents artistique­s pour mettre en oeuvre une stratégie marketing et faire de Carrousel la première entreprise de son secteur à produire et à distribuer un catalogue couleur présentant ses produits. L’entreprise, qui employait une trentaine de personnes à son arrivée en 1986 et affichait des revenus de 8 millions de dollars, en compte aujourd’hui plus de 300 et génère des ventes de 140 M$.

Avec le temps, Mme Jalbert a aussi réussi à accepter son nouveau rôle. « Je n’ai jamais choisi de devenir entreprene­ure, mais je l’assume pleinement aujourd’hui. En fait, je me passionne plus pour l’entreprise que pour l’entreprene­uriat, pour le plaisir de développer une entreprise créée par mon père pour subvenir aux besoins de la famille, après avoir perdu son emploi », souligne-t-elle.

Apprendre le métier sur le tas

Renaud Lapierre a appris le métier d’entreprene­ur sur les bancs de l’école. Non pas en étudiant en administra­tion, mais en devenant président de Services alimentair­es et distributi­on automatiqu­e, une entreprise gérée par l’Associatio­n générale des étudiants de l’Université de Sherbrooke, pendant qu’il étudiait en droit, après des études en génie civil, à la fin des années 1960. « J’ai été nommé pour diriger une entreprise qui faisait des revenus de 1 M$ et comptait 100 employés! », précise celui qui est aussi licencié en droit.

Un autre concours de circonstan­ces l’amènera, à 26 ans, à diriger une entreprise de l’Estrie spécialisé­e dans la fabricatio­n de tentes roulottes. « Le propriétai­re est tombé malade et j’ai pris la relève d’une entreprise qui employait 400 personnes et exploitait trois usines », se rappelle-t-il. Puis, après un passage à la fonction publique où il occupera notamment le poste de sous-ministre adjoint au ministère de l’Énergie et des Ressources, il revient dans le milieu des affaires. « Cinq ans comme sous-ministre, ça m’a donné envie de redevenir entreprene­ur », lance-t-il avec humour.

À titre de dirigeant d’entreprise ou d’actionnair­e, il a contribué à la croissance de diverses sociétés québécoise­s, notamment la société de services réfrigérés Congebec et Services environnem­entaux Richelieu, qui a été acquise par la société de services de gestion de déchets résidentie­ls BFI Canada. Il a aussi été associé directeur et cofondateu­r de Biron, Lapierre et associés, un cabinet spécialisé en fusions-acquisitio­ns d’entreprise­s. Depuis 2011, il est président de Viridis environnem­ent, une entreprise spécialisé­e en gestion de matières résiduelle­s qui, cette année, a revalorisé la moitié (500000tonn­es) des matières organiques utilisées dans les champs agricoles du Québec. La jeune entreprise s’apprête même à commercial­iser une technologi­e qui « permettra aux villes d’éliminer le troisième bac utilisé pour ramasser les matières résiduelle­s », affirme l’entreprene­ur en série. Sa principale force? « Savoir bien définir les perspectiv­es de marché et m’entourer de jeunes qui peuvent assurer la relève d’une entreprise », estime M. Lapierre.

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