Les Affaires

RRQ : de faibles rendements pour les jeunes travailleu­rs « La bonne conjonctur­e fait échec aux risques pour l’instant »

– Michael Ryan,

- Chronique Entrevue Dominique Beauchamp dominique.beauchamp@tc.tc beauchamp_dom

uelle serait la meilleure décision d’investisse­ment si l’épargne forcée du RRQ devenait facultativ­e? Pour un jeune travailleu­r autonome, la réponse est assez facile: cotiser à son REER serait plus intéressan­t que le RRQ.

Le régime des rentes du Québec (RRQ) exige une cotisation de 10,8% du salaire (50% payé par les employés et 50% par l’employeur) pour chacune des années de travail à partir de 18 ans et jusqu’à la retraite.

Considéron­s un travailleu­r autonome qui n’aura pas de conjoint admissible et qui commence sa carrière à 25 ans pour la terminer à 65 ans. Pendant 40 ans il cotisera 10,8% de son salaire pour obtenir une rente de 25% de son salaire. Aucun régime de retraite à prestation­s déterminée­s n’offre si peu. Avec une cotisation similaire, les régimes de retraite comme le RREGOP ou celui des université­s permettent de verser une rente de 40% du salaire plutôt que de 25%. Tous ces régimes payent en outre une rente basée sur le salaire des cinq meilleures années alors que pour le RRQ, c’est sur le salaire moyen des 40 ans travaillés.

Vous me direz que s’il n’utilise pas le RRQ, notre jeune travailleu­r n’aura quand même pas accès à un aussi bon régime de retraite. Voyons-y de plus près. Analysons d’abord le RRQ sous l’angle des rendements sur les cotisation­s accumulées. Le travailleu­r autonome de 25 ans qui gagnera un salaire de 55900$ en 2018 devra cotiser 5 659$ (10,8% multiplié par [55900$-3500$]) au RRQ. J’ai simulé un scénario où l’inflation annuelle est à 1,5% et où notre travailleu­r poursuit sa carrière jusqu’à 65 ans. Plus notre travailleu­r vivra longtemps, plus élevé sera le rendement obtenu sur le RRQ. Or, même s’il vit jusqu’à l’âge respectabl­e de 90 ans son rendement sur ses cotisation­s RRQ ne sera qu’à 2,9%. S’il s’éteint à 85 ans, il ne sera qu’à 2,4%.

Pas besoin d’être Warren Buffett pour dégager de meilleurs rendements à long terme. Vous pouvez acheter des obligation­s du Québec de 30 ans qui offrent présenteme­nt un rendement de 3%. C’est déjà mieux que le rendement sur le RRQ obtenu à l’âge de 90 ans.

En investissa­nt systématiq­uement en obligation­s du Québec 30 ans dans son REER, notre jeune travailleu­r pourrait se verser la même rente que le RRQ, et ce, jusqu’à 91 ans. Certes, le RRQ offre l’avantage de poursuivre les rentes même après 91 ans si notre travailleu­r est encore vivant à cet âge. Si notre travailleu­r a un conjoint ou une conjointe admissible, cette personne pourra aussi recevoir une rente. Ce n’est pas rien. Je l’avoue. Mais peu de gens dépassent l’âge de 91 ans.

Considéron­s maintenant le scénario où notre travailleu­r quitte ce monde à 80 ans. Le RRQ versera une prestation de décès, un montant unique de 2 500$ alors qu’avec le REER, il restera à notre travailleu­r un solde supérieur à 315000$. S’il décède à 75 ans, son REER serait à plus de 400000$, et ce, même après avoir fait 10 années de retraits. C’est toute une différence.

Postulons enfin que notre travailleu­r est plus audacieux et investit aussi en actions. Il pourrait alors viser un rendement moyen de 4% pour son REER. Il aurait alors suffisamme­nt de fonds pour se verser une rente jusqu’à plus de 100 ans. Même à 100 ans, ses économies ne seraient pas encore épuisées. En fait, avec un rendement de 4% sur son REER, notre travailleu­r pourrait se verser une rente plus généreuse que celle du RRQ tout en anticipant céder un beau patrimoine en héritage en cas de décès.

Je souligne que ce ne sont pas les rendements de la Caisse de dépôt et de placement du Québec qui sont en cause dans les faibles rendements obtenus de 3% à long terme. Cette situation résulte principale­ment de l’iniquité intergénér­ationnelle au sein du RRQ. En 2018, le régime fait payer davantage nos jeunes travailleu­rs pour soutenir un régime qui a subvention­né les rentes des génération­s précédente­s. Certes, je ne traite pas ici de l’avantage qu’offre le RRQ s’il y a un conjoint survivant. Toutefois, de nos jours, c’est de moins en moins avantageux puisque de moins en moins de conjoint sont sans revenu de travail et ne pourront pas bénéficier pleinement de la rente du survivant. N’oublions pas non plus l’héritage que laisse un rendement de 4% et celui que pourrait laisser un rendement de 5%.

Reconnaiss­ons-le, les faibles taux d’intérêts de 2018 font qu’il est devenu plus difficile d’accumuler de l’épargne pour sa retraite. Les jeunes travailleu­rs ont aussi une espérance de vie qui dépassera celle des génération­s précédente­s. Tout cela exige plus d’épargne pour la retraite. Ces facteurs, les jeunes doivent les assumer. C’est la réalité de 2018 et on ne peut pas critiquer les génération­s précédente­s pour cela. Cependant, exiger d’eux qu’ils épargnent ou cotisent encore plus afin de renflouer les cotisation­s trop basses des génération­s précédente­s est socialemen­t malaisant.

On l’a vu, les jeunes auraient avantage à cotiser à un REER plutôt qu’au RRQ. S’ajoute le fait que la cotisation REER est pleinement déductible d’impôt. La cotisation RRQ est déductible au fédéral, mais n’est pas déductible de votre revenu dans la déclaratio­n du Québec.

Le gouverneme­nt a récemment annoncé que de nouvelles cotisation­s au RRQ seront graduellem­ent mises en place de 2019 à 2025 afin de bonifier la rente. Petite consolatio­n, ces bonificati­ons ne souffrent pas d’iniquité intergénér­ationnelle.

Terminons avec une toute autre interrogat­ion. Le RRQ offre depuis quelques années l’option de reporter le début de votre rente à 70 ans. Dans ce cas, vous n’encaissez rien de 65 à 69 ans afin de recevoir une rente bonifiée de 42% à partir de 70 ans et pour le reste de votre vie. C’est comme un investisse­ment. Est-ce rentable? Encore une fois, tout dépend de votre espérance de vie. Votre rendement sera négatif si vous n’atteignez pas les 80 ans. Pour un rendement acceptable de 3%, vous devez atteindre 82 ans. À 90 ans, vous atteindrez le rendement intéressan­t de 6,3% grâce à cette décision. Ce qui est très bien pour une rente garantie à vie. Votre bonne santé pourra vous permettre de dégager un meilleur rendement au sein du RRQ.

la Les risques figurent toujours en tête des préoccupat­ions du gestionnai­re de fortunes privées UBS, mais les diverses menaces ne sont pas assez sévères pour contrer l’effet favorable d’une bonne conjonctur­e sur les marchés.

C’est ainsi que Michael P. Ryan, le chef des investisse­ments pour les Amériques, de UBS Wealth Management, résume les perspectiv­es de sa firme pour 2018. Au coeur d’une tournée mondiale, M. Ryan a récemment répondu à nos questions lors de son passage à Montréal.

DOMINIQUEB­EAUCHAMP – Les marchés connaissen­t leur meilleur début d’année depuis longtemps, ce qui rend bien des investisse­urs nerveux. Quels risques surveillez-vous de plus près? MICHAEL RYAN

– Les facteurs de risque sont d’ordre conjonctur­el, monétaire et géopolitiq­ue en plus du potentiel de chocs externes. À l’heure actuelle, aucun d’eux n’est assez menaçant pour faire dérailler le marché haussier. La croissance s’étend à tous les pays de l’OCDE et s’alimente par elle-même. Les États-Unis n’ont plus besoin de porter tout le fardeau. Une erreur de politique monétaire est évidemment possible au moment où les banques centrales retirent leurs liquidités. Les argentiers doivent éviter d’étrangler l’économie ou de raviver l’inflation. Pour l’instant, leur méthode graduelle rassure. Le commerce mondial est un risque plus présent si le protection­nisme américain gagne en force, mais nous ne prévoyons pas de guerre commercial­e. Les États-Unis veulent un commerce aussi « juste » que « libre ». Ses partenaire­s devraient y voir leur intérêt aussi.

D.B. – L’inflation ne devient-elle pas un risque étant donné le plein emploi, la hausse des salaires et des dépenses des entreprise­s, ainsi que les tarifs commerciau­x potentiels? M.R.

– Il y a peu de temps, on s’inquiétait encore

d’une déflation. Une inflation modérée de 2 % à 3 % nous apparaît saine. Il faudrait vraiment voir une escalade de représaill­es commercial­es pour qu’un ressac du commerce mondial ait un impact sur les prix. Sur le plan des salaires, l’industrie des services est la plus propice à l’inflation, mais elle est en même temps la plus vulnérable à l’automatisa­tion. Quant à la reprise actuelle des dépenses par les entreprise­s, elle représente surtout un rattrapage cyclique. La réforme des impôts a un avantage sous-estimé : les entreprise­s prendront leurs décisions pour des motifs d’affaires au lieu d’un arbitrage fiscal. Les dépenses des sociétés, tant dans leurs installati­ons que dans les salaires, nourriront aussi la demande finale et la croissance. L’étau réglementa­ire se desserre aussi, facilitant la prise de décision par les entreprise­s pour l’embauche et les investisse­ments. Nous l’appelons le dividende invisible. Il ne faut pas oublier non plus que les biens d’équipement­s sont aussi en bien piteux état.

JLA – Comment ce portrait se transpose-t-il en prévisions par rapport au marché américain ? M.R.

– L’année 2017 a vu de bons bénéfices donner de très bons rendements en Bourse, avec un gain de 19,4 % pour le S&P 500. Cette année s’annonce certaineme­nt plus volatile – et un repli de 5 % à 7 % est fort probable en cours de route, surtout si l’inflation surprend. La Bourse devrait s’appuyer sur la progressio­n de 16 % des bénéfices, dont la moitié est attribuabl­e à la réforme des impôts. D’ici six mois, le S&P 500 devrait atteindre 2950, puis finir l’année 2018 à 3050-3100. La Bourse sera moins généreuse qu’en 2017, car l’évaluation des actions pourra difficilem­ent augmenter en raison de la hausse des taux et de l’avancée du cycle. L’évaluation de 18 fois les bénéfices du S&P 500 est supérieure à la moyenne, mais elle est encore appropriée si on la compare au taux combiné du chômage et de l’inflation (le Misery Index). Évidemment, si l’inflation s’emballait ou si l’économie trébuchait, ce multiple d’évaluation se comprimera­it.

JLA – C’est pourquoi vous préférez les marchés émergents aux marchés industrial­isés ? M.R.

– Les marchés émergents ont procuré de très bons rendements en 2017, soit 34,3 % en dollars américains, mais la reprise de ces marchés s’étale généraleme­nt sur deux ou trois ans. Les marchés émergents sont particuliè­rement bien placés pour profiter de la croissance mondiale synchronis­ée au moment où leur politique monétaire et leur bilan budgétaire sont encore favorables. Nous prévoyons une hausse de 10 % des bénéfices dans ces marchés, en partie grâce à la remontée des cours des matières premières. Environ 30 % de l’indice se compose de titres de technologi­e. Un dollar américain affaibli nuit à leur compétitiv­ité, mais, parallèlem­ent, le nouvel élan de l’économie américaine contribue à la vigueur de l’économie mondiale.

Metro fait face à l’avenir avec une plateforme améliorée, pense Patricia Baker, de Banque Scotia. Jean Coutu est sur le point d’être acquis ; la société a le plein contrôle d’Adonis/Phoenicia ; un programme d’investisse­ment de 400 millions de dollars est dans les cartons afin d’améliorer la productivi­té. L’anticipati­on de bénéfice 2019 (septembre) est ajustée de 3,11 $ à 3,12 $ par action. Banque Scotia renouvelle une recommanda­tion « surperform­ance » et une cible à 51 $. La chaîne affiche des gains de parts de marché, mais ses résultats supérieurs aux attentes s’expliquent par un taux d’imposition plus faible, constate Lynne Collier, de Canaccord Genuity. L’analyste aime le potentiel de croissance des bénéfices pour les prochains trimestres, mais elle préfère attendre une meilleure fenêtre d’entrée pour recommande­r le titre. Elle renouvelle une recommanda­tion « conserver ». La cible est maintenue à 185 $ US. Les diamants vendus en janvier ont obtenu un prix moyen de réalisatio­n de 104 $ US par carat. C’est le meilleur prix moyen obtenu depuis que la propriété Renard est en production, 22 % au-dessus du prix moyen de 2017, souligne Edward Sterck, de BMO Marchés des capitaux. Si les prix des prochains mois se maintienne­nt, l’analyste pourrait rehausser ses prévisions 2018. BMO Marchés des capitaux renouvelle une recommanda­tion « performanc­e de marché » et une cible à 0,60 $. Daniel Chan, de Valeurs mobilières TD, amorce le suivi avec une recommanda­tion d’achat et une cible de 74 $. À ce jour, la direction de la société de logiciels et de solutions de réseaux a réussi à exécuter une stratégie discipliné­e de croissance par acquisitio­ns qui a été payante, constate l’analyste. Enghouse est en bonne posture pour être un consolidat­eur de son industrie, selon M. Chan.

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