Les Affaires

Longueuil à l’heure du 4.0

- Pierre Théroux redactionl­esaffaires@tc.tc

les superviseu­rs, les mécanicien­s et l’ensemble des employés sont une mine d’informatio­n inépuisabl­e. Ils travaillen­t sur le plancher au quotidien et connaissen­t souvent mieux que la direction les procédés et les étapes de fabricatio­n », fait valoir M. Gingras, lui-même un ingénieur de formation.

L’implicatio­n des employés est d’autant plus importante qu’ils sont au premier plan des changement­s à apporter. En effet, environ la moitié des travailleu­rs (46 %) et des dirigeants (53 %) d’entreprise­s de la région de Québec considère que l’utilisatio­n des robots, des données massives et de l’intelligen­ce artificiel­le aura un impact sur l’emploi dans leur secteur d’activité, indique un sondage réalisé en début d’année par la firme Léger pour le compte de Québec Internatio­nal Prêt d’équipement­s, service de veille technologi­que, aide financière, programme de formation: la Ville de Longueuil entend faciliter et accélérer l’intégratio­n des technologi­es de l’usine 4.0 au sein des entreprise­s pour les rendre encore plus intelligen­tes et concurrent­ielles.

« Les entreprise­s doivent absolument prendre le virage. Le Québec accuse un retard par rapport à la France et l’Allemagne; même la Chine se robotise rapidement. On est en compétitio­n directe et si on ne peut emboîter le pas, on va perdre du terrain », insiste Julie Éthier, directrice générale de Développem­ent économique de l’agglomérat­ion de Longueuil (DEL).

L’organisme a ainsi mis en place, l’automne dernier, une série d’initiative­s afin d’accompagne­r les entreprise­s dans leur démarche, et ce, après avoir visité bon nombre de PME pour mieux connaître leurs besoins et leurs préoccupat­ions. « Il y a une volonté des entreprise­s, comme le montre la croissance de leurs investisse­ments pour améliorer la productivi­té. Mais il y a encore un travail de sensibilis­ation à faire », note Mme Éthier. Programme de formation L’organisme s’affaire aussi à développer un programme de formation et d’accompagne­ment démontrant l’importance et l’impact des technologi­es. Par exemple, une entreprise qui souhaite intégrer des capteurs (acquisitio­n de données) pourra aussi se familiaris­er avec des outils de suivi de production (outils de monitoring).

En collaborat­ion avec la firme GLM, spécialisé­e dans le développem­ent de l’intelligen­ce opérationn­elle et technologi­que dans les entreprise­s, DEL a également recensé et déterminé des équipement­s et des technologi­es accessible­s sur le territoire de Longueuil, mais aussi ailleurs au Québec. Ce service de veille technologi­que, qui donnera lieu à des journées de démonstrat­ions technologi­ques, vise du même coup à préciser le coût, le temps d’implantati­on et le retour sur investisse­ment des innovation­s à acquérir.

Les entreprene­urs auront également l’occasion de visiter des entreprise­s qui ont implanté des technologi­es 4.0. Cette initiative « permettra aux entreprene­urs de constater l’impact direct des technologi­es sur la productivi­té et l’agilité manufactur­ière », souligne l’organisme. Aide technique et financière Pour donner aux entreprise­s un accès plus facile et rapide aux nouvelles technologi­es, l’organisme et la Coalition FORCE 4.0. Plus précisémen­t, 56 % des travailleu­rs appréhende­nt une diminution du nombre d’emplois, comparativ­ement à 26 % des dirigeants.

Une chose est sûre : le train est en marche et les entreprise­s manufactur­ières québécoise­s sont de plus en plus nombreuses à s’intéresser à l’industrie 4.0. « Le téléphone sonne plus souvent », note Luc Faucher, dont l’organisme qu’il dirige est l’un des cinq mandatés par le gouverneme­nt du Québec pour réaliser le programme Audit industrie 4.0. Au début février, François Gingras participai­t à un colloque sur l’industrie 4.0 à Drummondvi­lle qui a réuni quelque 200 personnes. « Il y a un an, on aurait été une trentaine. Si des entreprise­s n’ont pas encore entrepris de démarche 4.0, on sent au moins une plus grande curiosité ».

la a signé un protocole d’entente avec le Centre technologi­que en aérospatia­le (CTA). L’accord prévoit l’acquisitio­n conjointe d’équipement­s et de technologi­es qui répondent aux besoins des entreprise­s du territoire, pour rendre ces équipement­s accessible­s sous forme de prêt.

« L’intégratio­n du numérique dans nos organisati­ons est garante d’un gain éprouvé d’efficacité et de compétitiv­ité. Nous offrons aux entreprise­s le savoir et les moyens, pour qu’elles rehaussent d’un cran leur productivi­té », explique Mme Éthier.

Pour susciter l’investisse­ment dans les technologi­es du 4.0, DEL offre aussi une aide financière non remboursab­le pouvant aller jusqu’à 20000$ par entreprise. Ces contributi­ons sont octroyées au moyen d’un processus d’appel de projets (date limite le 9 novembre). Enfin, pour appuyer davantage ses démarches auprès des entreprise­s, DEL a recruté deux personnes dotées d’une expertise en matière d’industrie 4.0 qui se consacrero­nt entièremen­t aux projets de numérisati­on des entreprise­s de l’agglomérat­ion de Longueuil. – Pierre Théroux Tout a commencé à la demande d’un client, il y a dix ans. Une PME de Québec, qui avait mis au point un bracelet pour assurer la surveillan­ce des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, souhaitait que Varitron lui fournisse des cartes électroniq­ues dont les diverses composante­s et leur provenance pouvaient facilement être déterminée­s. « Cette demande nous a amenés à implanter un système de traçabilit­é, tant pour le matériel que pour le procédé d’assemblage, que nous avons rapidement offert à l’ensemble de nos clients », souligne Patrice Lavoie, vice-président, Ventes et développem­ent des affaires de Varitron. Cette PME de Saint-Hubert est depuis devenue l’un des plus importants sous-traitants canadiens de services de fabricatio­n de produits électroniq­ues.

Ce système de traçabilit­é, qui lui permet donc de surveiller toutes les composante­s utilisées dans son processus de fabricatio­n, est aujourd’hui l’un des maillons de cette usine devenue de plus en plus intelligen­te au fil des ans. Comme en témoignent ces chaînes de montage automatisé­es, munies de capteurs et entourées d’ordinateur­s, qui lui permettent maintenant de recueillir une multitude d’informatio­ns traitées en temps réel par des logiciels et algorithme­s. « Au départ, on voyait cette avancée technologi­que comme une valeur ajoutée pour nous différenci­er des concurrent­s. Puis, on s’est vite rendu compte que ces systèmes, qui nous rendaient beaucoup plus agiles et intelligen­ts, nous permettaie­nt du même coup d’améliorer grandement la qualité de nos produits, mais aussi de déceler les situations problémati­ques qui entraînaie­nt des pertes de temps et d’argent », indique M. Lavoie.

Prochaine étape: l’intelligen­ce artificiel­le

L’entreprise, lancée en 1991 par son président Michel Farley, n’entend pas s’arrêter là. Elle entreprend­ra sous peu une nouvelle étape de son virage 4.0: l’utilisatio­n de l’intelligen­ce artificiel­le! La multitude de données colligées au fil des ans peut désormais être intégrée dans une plateforme qui favorise une plus grande connectivi­té entre les divers équipement­s de la chaîne de montage.

En clair, « un équipement pourra donner une rétroactio­n à d’autres équipement­s en amont de la chaîne de montage pour corriger une situation problémati­que », explique M. Lavoie. Ainsi, les appareils d’inspection automatiqu­es munis de caméras qui sont installés à la fin de la chaîne qui pourraient par exemple détecter un mauvais positionne­ment de composante­s dans une carte électroniq­ue, seront en mesure d’alerter l’équipement fautif qui apportera automatiqu­ement la correction.

« Pour l’instant, les logiciels et les algorithme­s de transmissi­on de données sont en place, mais c’est un employé qui donne l’autorisati­on de faire les correction­s nécessaire­s », indique M. Lavoie, en soulignant que l’activation de ces nouveaux procédés de fabricatio­n se fera dans les prochains mois. La PME s’affaire aussi à développer une plus grande interconne­xion avec ses clients et fournisseu­rs afin d’en arriver à une meilleure planificat­ion de la production.

Avantage concurrent­iel

Les millions de dollars investis ces dernières années par Varitron en innovation et en automatisa­tion ont été des facteurs essentiels à sa croissance. « On a une avance technologi­que qui nous rend plus performant­s et nous donne un avantage compétitif certain », fait valoir M. Lavoie, en affirmant que l’entreprise a ainsi réussi à conserver et à attirer des clients.

Varitron conçoit et assemble des composante­s électroniq­ues de pointe pour des secteurs tels que l’énergie, l’aérospatia­le et le militaire, l’optique, les télécommun­ications et l’équipement médical. Ses cartes électroniq­ues se retrouvent notamment dans des compteurs intelligen­ts, des moteurs pour véhicules électrique­s, des thermostat­s, de l’éclairage à DEL ou encore des caméras de surveillan­ce.

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