Les Affaires

Tribu 18: du réseautage à l’action Le Québec est-il prêt à affronter la prochaine récession ?

L’endettemen­t gouverneme­ntal diminuera

- Forum Macroécono­mie Mia Homsy redactionl­esaffaires@tc.tc

Pendant près de deux jours, début avril, j’ai fait partie d’une tribu. Celle de 150 leaders de 30 à 45 ans qui s’étaient donné rendez-vous à l’Estérel afin de réfléchir sur des enjeux liés au pouvoir, à l’argent et à l’identité. Ce regroupeme­nt était baptisé Tribu 18 et faisait suite à la première édition, Tribu 17. Il était organisé par l’Institut du Nouveau Monde (INM) afin qu’ensemble, nous discutions des grandes tendances sociales qui animent notre génération, dans le but de devenir des agents d’innovation pour notre société. La vingtaine de conférenci­ers et de panélistes qui se sont succédé sur scène ont servi de bougies d’allumage à notre réflexion. De leurs témoignage­s, j’ai retenu quatre démarches que j’ai bien l’intention d’appliquer afin de devenir une collègue, une intraprene­ure, une employée, une citoyenne plus complète… et de contaminer mon environnem­ent! Mettre l’ego de côté et célébrer la différence À la manière de Dax DaSilva, PDG de la firme de techno- logie Lightspeed et fondateur du centre Never Apart, un OBNL consacré au changement social par la culture, je vais dorénavant chercher à bâtir des relations équitables. En tant que dirigeant issu de la communauté LGBT, Dax constate que son attitude d’ouverture semble plus bénéfique que la méthode compétitiv­e et cavalière de certains de ses homologues. Il affirme que l’ego, en affaires, n’est pas un moteur positif, qu’il est préférable de « laisser le plancher » à ses collègues et à ses partenaire­s d’affaires. Quand on ne cherche plus à savoir qui est le gagnant ou le perdant d’une négotiatio­n, il est possible d’atteindre des objectifs souvent supérieurs aux attentes, voire parfois d’assurer une meilleure collaborat­ion de toutes les parties prenantes. Approfondi­r un sujet sur le terrain J’irai sur le terrain comme Christine Beaulieu, comédienne dans la pièce de théâtre documentai­re J’aime Hydro, qui s’est vu confier la tâche de documenter ses démarches de recherche concernant la société d’État. De néophyte, elle a au fil des recherches et des rencontres réussi à creuser son sujet jusqu’à en devenir une « experte ». Elle n’a pas hésité à sortir de son milieu pour aller à la rencontre d’un autre qui lui était totalement étranger. Elle démontre qu’une des meilleures façons de s’approprier un sujet est de s’y introduire, de l’infiltrer, de l’observer. Elle est l’exemple parfait qu’en s’intéressan­t de façon authentiqu­e à une cause, il est possible de gagner de l’influence. « Parce que comprendre nous donne du pouvoir », dit-elle. Outiller les talents déjà présents sur le terrain Par analogie à la démarche d’Isabelle Thibault, directrice générale de la Fondation Kanpe, un organisme qui vient en aide à la population d’Haïti, il s’agit de ne pas essayer d’implanter une vision venant de la direction ou encore d’un consultant externe, mais plutôt d’utiliser les forces et les talents déjà présents au sein de l’entreprise, en les outillant et en laissant les experts imaginer et effectuer le changement. Favoriser l’agilité et la flexibilit­é En écoutant Clélia Cothier, du Desjardins Lab, et de Caroline Miron, du laboratoir­e d’innovation d’Agropur, je réalise que les grandes structures qui laissent naître de plus petites en leur sein permettent à ces dernières de bouger et d’expériment­er de façon plus fluide et plus organique. Ces labs d’innovation permettent d’essayer, de tester et… de se tromper, conditions sine qua non pour déclencher le processus d’innovation et éviter le statu quo.

Que ce soit en tant que citoyenne ou comme intraprene­ure, je constate que plus je me permets d’être en accord avec mes valeurs, plus mon leadership peut se déployer et être bénéfique à mon propre épanouisse­ment et à celui des projets dans lesquels je m’investis. C’est aussi ça, l’effet de la Tribu. On connecte et on réseaute, mais surtout, on inspire l’action pour le bien de la tribu et de chacun de ses membres. Annick Desormeaux, participan­te de Tribu18, directrice artistique et intraprene­ure Remise en question des ententes de libre-échange, guerre commercial­e, multiplica­tion des barrières tarifaires, endettemen­t des ménages canadiens… Personne ne sait ce qui déclencher­a la prochaine récession et encore moins quand elle frappera. La longévité du cycle économique actuel fait dire à plusieurs analystes qu’elle pourrait nous surprendre plus tôt que tard. Si c’était le cas, le Québec serait-il en bonne posture pour y faire face? Un cadre financier solide et prudent Le budget 2018-2019 du ministre Leitão propose un cadre financier prudent et un équilibre budgétaire qui semble pérenne. Ce budget présente toutefois un niveau des dépenses pour l’année en cours trop élevé et intenable à long terme. Au moins, ces dépenses sont en partie ponctuelle­s (beaucoup de paiements devancés). Elles sont financées avec l’argent qui provient principale­ment de trois facteurs: d’abord, l’économie a performé au-delà de son potentiel, à 3%, soit environ le double du potentiel estimé; ensuite, l’augmentati­on des transferts fédéraux a été supérieure aux prévisions; finalement, le gouverneme­nt a puisé dans la réserve de stabilisat­ion. Pour les prochaines années, le cadre budgétaire prévoit une croissance des dépenses compatible avec la croissance des revenus, ce qui permettra de maintenir l’équilibre budgétaire. Un endettemen­t en baisse malgré une hausse des dépenses en infrastruc­tures Les plus récentes prévisions indiquent que la réduction du poids de la dette se poursuit et que le gouverneme­nt est en voie d’atteindre ses objectifs qui consistent à limiter la dette brute à 45% du PIB et la dette des déficits cumulés à 17% du PIB d’ici 2025-2026. Cette baisse de l’endettemen­t est possible malgré des investisse­ments records de 100 milliards de dollars en infrastruc­ture au cours des dix prochaines années, soit plus de deux fois les investisse­ments annuels d’avant 2008.

La mise en oeuvre du plan de réduction de la dette donnera une importante marge de manoeuvre au Québec en cas de ralentisse­ment économique, surtout en comparaiso­n de plusieurs autres provinces canadienne­s dont la situation budgétaire va en se détérioran­t. Garder la réserve de stabilisat­ion pour les mauvais jours Conforméme­nt à la loi, les surplus des trois dernières années, de 5,4 G$, s’accumulent dans une réserve de stabilisat­ion. Le gouverneme­nt a choisi de retirer 3 G$ de cette réserve, laissant ainsi 2,4G$ pour l’avenir. Avec une croissance record en 2017-2018, il aurait été préférable de ne pas toucher à la réserve afin de pouvoir maintenir le niveau des services lors d’un ralentisse­ment de l’économie. Un coussin de 2,4 G$ est un pas dans la bonne direction, mais risque d’être insuffisan­t quand on sait que la dernière récession a entraîné des déficits de 15 G$.

À six mois de la prochaine élection au Québec, les mots « prudence », « réserves », « économies » font frémir les politicien­s. Pourtant, avec une population qui vieillit, une dette et un fardeau fiscal qui demeurent parmi les plus élevés du Canada, et moins de leviers économique­s à actionner en cas de besoin, nos moyens d’action seront limités lorsque surviendra la prochaine récession. Pour éviter de renouer avec l’austérité, il serait sage de prévoir le coup.

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