Les Affaires

Viser les marchés étrangers, au-delà de Donald Trump

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entreprise Boulet, à Saint-Tite, est bien connue par les amateurs de bottes de cow-boy dont elle est le plus important fabricant du Canada. Une qualité irréprocha­ble.

Elle produit également, ce qui est moins connu, des bottes utilitaire­s pour les forces de l’ordre. Et du fait de la nouvelle entente de libre-échange avec l’Europe, il lui est maintenant possible de faire des soumission­s pour équiper les gendarmes français, les carabinier­i italiens et autres du genre.

C’est un des exemples qu’aime présenter le ministre fédéral du Commerce internatio­nal, François-Philippe Champagne, quand il parle du potentiel de l’AECG, l’Accord économique et global avec l’Europe. En passant, il est aussi député de Saint-Maurice–Champlain, qui englobe Saint-Tite. Alors, il connaît.

« Nous avons maintenant accès à un marché public de 3,3 milliards de dollars », dit-il, tout en rappelant l’importance de diversifie­r la gamme des partenaire­s commerciau­x du pays. Tant mieux si les Américains baissent le ton dans la renégociat­ion de l’ALÉNA. Commercer librement avec l’Europe, et bientôt l’Asie (à l’exception de la Chine), offre enfin cette autre option dont on parle depuis Pierre-Elliot Trudeau.

J’ai pu joindre le ministre par téléphone à Winnipeg, où il était allé constater la vigueur de l’industrie canadienne de la machinerie agricole, avant de revenir vers Montréal, puis à Shawinigan, qui est en pleine renaissanc­e, pour ensuite se diriger vers Paris pour une autre mission.

Il est toujours dans ses valises. Mais c’est le mandat qu’il a accepté du premier ministre Trudeau lors du remaniemen­t ministérie­l de janvier 2017, lui qui se présente maintenant comme le chef de la mise en marché du Canada à l’étranger (le « marketer-en-chef », dit-il).

Pourquoi? Parce que la population canadienne ne représente que 0,5% de celle de la planète, alors que ses entreprise­s sont toujours plus ambitieuse­s, et le sort des collectivi­tés où elles sont situées en dépend.

De là l’importance de l’ouverture de ces nouveaux marchés, vers l’Europe d’un côté, de l’Asie de l’autre.

Un exemple concret de cet accès facilité à l’Union européenne? Dès la signature de l’accord, la surtaxe sur les crevettes pêchées dans le golfe du Saint-Laurent est passée de 12% à 0. Évidemment, encore faut-il des crevettes. On a appris que les quotas seront réduits, mais au moins, le marché est ouvert.

Pareil, ou presque, pour le homard. S’il est surgelé, la surtaxe passera de 25% à0 sur quelques années. Sachant ce qu’il coûte en Europe… « Le Canada devient le pont commercial entre l’Atlantique et le Pacifique », affirme le ministre Champagne, en signalant que ces accords de libre-échange vont aussi stimuler l’investisse­ment internatio­nal ici.

Des méga-entreprise­s étrangères sont en prospectio­n. Il cite en exemple la société coréenne Netmarble Games qui produit des jeux vidéo. Pas très connue ici, son chiffre d’affaires est supérieur à celui d’une autre multinatio­nale coréenne plus visible, LG Electronic­s. On est dans l’ordre des milliards de dollars.

Comme il le précise, ses jeux produits en Corée vont alimenter le marché coréen. Aux États-Unis, on servirait – peut-être – le marché nord-américain. Mais au Canada, ils pourraient voyager de l’Ouest vers l’Est, et bientôt vers le Sud parce que le Canada cherche activement à nouer des liens avec cet autre immense marché commun, celui de l’Amérique du Sud.

Stabilité. Prévisibil­ité. État de droit. Diversité. Société inclusive. Ce sont là les cinq piliers sur lesquels le Canada peut se faire valoir à l’échelle internatio­nale, nous explique M. Champagne, qui précise que quoi qu’il arrive, nous serons toujours étroitemen­t liés avec les États-Unis.

Avant d’ajouter: « La marque Canada n’a jamais été aussi forte. » En effet, les astres sont bien alignés. Mais encore faut-il dès à présent en profiter! Il y a banquier et banquier. Jacques L. Ménard est, ou était un banquier pas comme les autres.

On demande souvent aux gens d’affaires de s’engager. Beaucoup sont frileux. Lui, régulièrem­ent, a répondu « présent ».

Le 16 avril, il a officielle­ment déposé les armes comme président du Groupe financier BMO, Québec. Son successeur, Claude Gagnon, n’est pas un poids plume; il travaille au sein de l’institutio­n depuis 40 ans. En ce qui la concerne directemen­t, la BMO, ici, est probableme­nt entre bonnes mains.

Mais Jacques Ménard a si souvent plongé dans la mêlée… les Expos, qu’il a tant bien que mal cherché à sauver, la vente du Canadien de Montréal, revenu entre les mains d’une authentiqu­e famille montréalai­se, les Molson, le lancement de cette initiative pour revitalise­r Montréal Je vois Montréal, devenu par la suite Je fais Montréal.

Je me rappellera­i cependant toujours de son engagement pour la toute première édition québécoise du programme « Parlons argent avec nos enfants », de la Fondation canadienne d’éducation économique, un organisme pancanadie­n, non partisan et sans but lucratif (dont je suis un membre du conseil d’administra­tion bénévole).

Nous l’avions approché prudemment, connaissan­t son intérêt pour la question; il avait coprésidé le Groupe de travail sur la littératie financière, lancé en 2010 par Ottawa.

Il avait rapidement accepté notre invitation, sans faire plus de façons.

Et sachant que nous nous adressions beaucoup aux jeunes des écoles secondaire­s, il avait ajouté cette remarque, en évoquant toutes les sollicitat­ions commercial­es qui leur sont déjà adressées: « Il est important de les aider à faire la différence entre les caprices et les besoins réels, pour les aider à devenir des consommate­urs responsabl­es. »

Pour cette observatio­n, et pour tout le reste, merci, monsieur Ménard.

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