Les Affaires

Les banques canadienne­s ont le don de donner

- Simon Lord redactionl­esaffaires@tc.tc

À qui donnent les grandes banques du pays ? Quelles causes soutient la vôtre ? Pour le savoir, Les Affaires a épluché leurs rapports financiers, calculette en main, pour en faire parler les chiffres. Voici ce qui ressort de cette analyse.

À chaque banque sa cause

Une première chose à remarquer est que les disparités sont parfois très grandes entre les dons accordés à une cause par une banque ou par une autre. La BMO, par exemple, est de loin celle qui, au pays, donne le plus au domaine des arts en proportion. L’an dernier, elle y a ainsi consacré 23,3 % de ses dons. De son côté, la plus proche concurrent­e, la RBC, a accordé 10,1 % de ses dons à cette cause.

De cette observatio­n en découle une seconde, à savoir que chaque institutio­n financière a ses causes chouchous. Si la BMO donne le plus en santé et en services sociaux, la RBC et la Scotia ciblent avant tout la jeunesse ; Desjardins, le développem­ent économique ; la TD, la création d’occasions pour la jeunesse et la Laurentien­ne privilégie la santé.

« Les banques, comme toutes les entreprise­s, choisissen­t leurs causes de manière à se donner une couleur, à se démarquer dans leur identité. C’est une manière pour elles de faire connaître leur personnali­té », explique Danielle Poulin, fondatrice de Caméo Consultati­on, une firme d’accompagne­ment-conseil en gestion philanthro­pique.

Comparer les données des banques n’est toutefois pas facile puisque celles-ci ventilent leurs dons en fonction de catégories différente­s. Desjardins, par exemple, présente ses dons en sept catégories, sans même avoir de catégorie « Autres ». La RBC, en revanche, ne montre que quatre catégories de dons, dont une qui s’appelle « Autres », qui compte pour 40,9 % du total. La Scotia les a même réduites à deux : la jeunesse et les grandes causes.

Si le pourcentag­e des dons accordés à une certaine catégorie est donc sans contredit une indication des causes préférées des banques, il semble que de simplement mettre en lumière certaines catégories plutôt que d’autres peut également constituer un indicateur de ses préférence­s.

« Desjardins, par exemple, une coopérativ­e, est la seule institutio­n financière à avoir une catégorie “Coopératio­n ”, dit Danielle Poulin. Le soutien des valeurs et des organisati­ons coopérativ­es est d’ailleurs mentionné explicitem­ent dans sa politique de don. Ça a du sens. Ça en dit long sur son identité. »

Soutenir ses clientèles

Scruter en détail les critères d’admissibil­ité mis de l’avant par les banques pour obtenir leur appui pour un projet permet de comprendre un peu mieux les grandes lignes qui guident leur stratégie.

Sylvain Lefèvre, un professeur au départemen­t de stratégie, responsabi­lité sociale et environnem­entale de l’ESG UQAM, spécialisé en philanthro­pie, remarque que certaines banques ont tendance à favoriser les projets qui s’alignent en toute apparence avec leurs intérêts, ou du moins avec ceux des collectivi­tés qu’elles servent.

« Certaines d’entre elles, par exemple, ne considèren­t éligibles que les projets qui sont mis en oeuvre aux endroits où elles sont implantées, c’est à dire que les interventi­ons doivent profiter à leur clientèle visée », mentionne celui qui assure aussi la direction scientifiq­ue du PhiLab, un laboratoir­e montréalai­s de recherche sur la philanthro­pie canadienne.

À cet égard, les banques sont plutôt franches. La RBC, par exemple, écrit sur sa page web liée aux dons qu’elle a « à coeur de collaborer avec des organismes de bienfaisan­ce qui partagent notre volonté de contribuer au bien-être des collectivi­tés et des régions que nous desservons ».

Des critères qui sont, après tout, peu surprenant­s. Comme les entreprise­s opérant dans d’autres secteurs de l’économie, les banques doivent filtrer elles aussi les demandes de dons d’une façon ou d’une autre. Et elles ont un gros travail à faire. À elle seule, la RBC reçoit environ 30 000 demandes de financemen­t chaque année. C’est plus de 10 demandes par heure chaque jour ouvrable.

la

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada