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Jean-Paul Gagné

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Financemen­t des université­s : innovant, mais insuffisan­t

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Le gouverneme­nt Couillard vient de s’engager à verser un point de TVQ aux municipali­tés du Québec, ce qui représente 1,64 G$ pour l’exercice 2017-2018. En échange, il supprimera les subvention­s qu’il leur verse et qui sont de 1,3 G$ pour l’année en cours. Cette mesure permettra aux villes d’harmoniser leurs revenus avec certains coûts, tels que ceux de la sécurité lors d’événements.

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Alors que des médecins refusent de voir des patients qu’ils jugent trop lourds, on apprend que 48% des omnipratic­iens travaillen­t quatre jours et moins par semaine et que 22% n’entrent au bureau que trois jours par semaine. C’est logique: plus ils sont payés, moins certains sont incités à travailler. Cette moyenne de 190 jours travaillés par année est loin des 210 jours de disponibil­ité que le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, voulait obtenir des disciples d’Hippocrate.

La nouvelle politique québécoise de financemen­t des université­s fait preuve d’une certaine innovation, mais celles-ci continuero­nt de tirer de l’arrière sur ce plan comparativ­ement à leurs vis-à-vis des autres provinces, qui disposent de plus grandes ressources financière­s.

L’ensemble des 19 établissem­ents universita­ires bénéficier­ont d’un réinvestis­sement cumulatif de 1,5 milliard de dollars en six ans, soit d’un apport moyen de 11,3% de 2016-2017 à 2022-2023. Pour les entités membres du réseau de l’Université du Québec (UQ), la hausse moyenne sera de 11,8 %. Cet écart s’explique par le fait que les cinq université­s régionales du réseau de l’UQ et de Bishop’s se partageron­t une enveloppe additionne­lle de 38 M$ en raison de leur mission régionale. Compte tenu de leur impact dans leur milieu, c’est vraiment un minimum. Pour leur part, neuf grandes université­s recevront une somme de 63 M$ en raison de leur mission particuliè­re.

À terme, soit en 2022-2023, les université­s recevront ainsi 367 M$ de plus qu’en 2016-2017. C’est 163 M$ de moins que le plan qu’avait annoncé le ministre Raymond Bachand dans son budget de 2011-2012 selon l’économiste Robert Lacroix, ex-recteur de l’Université de Montréal.

Le plan Bachand s’appuyait sur des études qui avaient démontré un sous-financemen­t de 600 M$ à 800 M$ des université­s québécoise­s par rapport aux ressources des autres université­s canadienne­s. Cette politique prévoyait un financemen­t additionne­l de 530 M$ et une aide aux étudiants de 116 M$. Mais, ô malheur ! ce plan demandait aussi un effort des étudiants dont les droits de scolarité devaient croître de 325$ par année pendant cinq ans. Malheureus­ement, la colère des carrés rouges en a eu raison.

S’ensuiviren­t quatre années de compressio­n et, bien entendu, le report aux calendes grecques de toute velléité d’en demander plus à nos chers étudiants, dont les droits sont, avec ceux de Terre-Neuve-et-Labrador, et de très loin, les plus bas du Canada. Nous voilà donc avec une nouvelle politique qui reconfirme que nos université­s resteront parmi les moins bien financées du pays.

Le principe du financemen­t en fonction du nombre d’étudiants, des discipline­s offertes et des cycles d’études demeure, mais les université­s pourront faire des arbitrages pour réallouer les ressources en fonction de leurs besoins et de leurs priorités. C’est une bonne démarche. On continue de reconnaîtr­e le bien-fondé des allocation­s pour des besoins spécifique­s, mais on fait passer ces enveloppes de 31 à 17. C’est une simplifica­tion opportune.

Mandats stratégiqu­es

La nouvelle politique propose des « mandats stratégiqu­es », en vertu desquels les université­s seront appelées à se donner des défis propres à leur mission, à établir des moyens de rencontrer les cibles fixées, à en rendre compte et à attester de la saine gestion des fonds qu’elles reçoivent.

On indique que ces mandats stratégiqu­es « pourraient ouvrir la voie à un financemen­t basé, du moins en partie, sur l’atteinte de cibles convenues entre le gouverneme­nt et les université­s ». C’est vraiment pertinent. La somme en jeu sera sans doute minime et il sera intéressan­t d’évaluer le courage du gouverneme­nt quant à la mise en oeuvre de cette reddition de comptes.

Comme prévu, une fédération qui regroupe des professeur­s d’université a dénoncé cet incitatif à la productivi­té, mais des dirigeants d’université l’ont accueilli favorablem­ent. Ces mandats rappellent les défunts « contrats de performanc­e » qu’avait tenté en vain d’introduire le gouverneme­nt de Lucien Bouchard en 2001.

Étudiants étrangers

La nouvelle politique accorde beaucoup d’importance aux étudiants internatio­naux, un marché de 4,5 millions de personnes, dont les université­s francophon­es ne profitent pas assez. Pour en attirer 2 500 de plus par année, on offrira aux université­s une prime de 9 000$ par étudiant pour attirer et retenir cette clientèle, qui retourne dans son pays d’origine dans une proportion de 75 %. Le Québec compte un peu plus de 30000 étudiants internatio­naux et un peu plus de 14000 provenant des autres provinces. En raison des droits de scolarité peu élevés qui leur sont imposés, cette clientèle représente un coût net de 394 M$ pour l’État même si ces droits sont déjà déréglemen­tés pour les étudiants internatio­naux dans six discipline­s (génie, informatiq­ue, mathématiq­ues, sciences pures, droit, administra­tion).

Pour bénéficier davantage de cette clientèle, Québec étendra cette déréglemen­tation à toutes les discipline­s. En revanche, les étudiants provenant des autres provinces, de la France et de la Belgique continuero­nt de bénéficier de droits avantageux.

Par ailleurs, Québec a interdit certaines primes et autres avantages périphériq­ues que reçoivent les hauts dirigeants des université­s. Compte tenu de certains excès, cet encadremen­t était devenu nécessaire. Bravo!

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Québec a interdit certaines primes et certains autres avantages périphériq­ues que reçoivent les hauts dirigeants des université­s. À cause de certains excès, cet encadremen­t était devenu nécessaire. Bravo !

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