Les Affaires

Produire autrement pour être plus écoperform­ant

- Événement Les Affaires Simon Lord redactionl­esaffaires@tc.tc chez Nemaska Lithium

L’efficacité énergétiqu­e dépasse l’installati­on d’éclairage plus efficace. Pour faire des gains impression­nants et devenir plus écoperform­ant, soyez innovant et attaquez-vous plutôt au coeur de ce qui vous demande le plus de ressources : vos procédés de production.

Nemaska Lithium, par exemple, produit de l’hydroxyde de lithium, un produit chimique utilisé entre autres pour la fabricatio­n de batteries de voitures. Plutôt que de metttre au point ce composé comme tous les autres producteur­s, l’entreprise a développé un procédé qui lui permet de le faire d’une manière complèteme­nt différente et plus avantageus­e que ses concurrent­s.

Typiquemen­t, pour produire de l’hydroxyde de lithium, il faut d’abord fabriquer du carbonate de lithium en mélangeant du carbonate de sodium avec du sulfate de lithium. Un des problèmes, toutefois, est que cette transforma­tion chimique produit également un résidu, le sulfate de sodium, dont le producteur doit ensuite se débarrasse­r, explique Jean-François Magnan, le directeur technique chez Nemaska Lithium. Il sera conférenci­er le 20 septembre à l’événement Efficacité énergétiqu­e, organisé par le Groupe Les Affaires. « Ce résidu, le sulfate de sodium, doit alors être séché et cristallis­é sous forme de sel solide avant d’être finalement envoyé dans un site d’enfouissem­ent pour le reste de l’éternité, et ce, aux frais du producteur », explique M. Magnan.

Les avantages d’une telle méthode

Le carbonate de lithium ainsi produit est d’une pureté relativeme­nt faible et doit être purifié avant de pouvoir être transformé en hydroxyde de lithium. Plutôt que d’utiliser ce processus chimique convention­nel, Nemaska Lithium emploie plutôt un processus électrochi­mique: elle utilise de l’électricit­é pour obtenir de l’hydroxyde de lithium à partir de sulfate de lithium.

L’entreprise gagne en efficacité parce qu’elle n’a pas besoin de défrayer des coûts pour se débarrasse­r du sulfate de sodium, le sous-produit issu du procédé de production convention­nel. De plus, son procédé n’émet pas de GES. Nemaska Lithium peut aussi prévoir ses coûts de production plus facilement: les coûts de l’électricit­é son plus facilement prévisible­s que ceux de certains produits chimiques utilisés dans le procédé convention­nel. « Nos coûts de production sont faibles comparativ­ement à la plupart des autres gros joueurs sur le marché », dit M. Magnan. Selon une étude qu’elle a commandée cette année à Roskill, Nemaska Lithium devrait par exemple être en mesure, en 2021, de produire de l’hydroxyde de lithium à 2 811 $ US par tonne, contre 3 475 $ US par tonne pour son concurrent Albemarle ou 3 950$ US par tonne pour SQM, un autre compétiteu­r.

Déchet de l’un, trésor de l’autre

Investir en efficacité énergétiqu­e peut se révéler un choix très avantageux à long terme. L’histoire de l’usine Rolland, à Saint-Jérôme, le montre bien. Encore aujourd’hui, celle-ci profite d’un changement avant-gardiste qu’elle a mis en place en 2004. Quel changement? Et quels avantages en a-t-elle tirés depuis?

L’usine Rolland se trouve très près du site d’enfouissem­ent de Sainte-Sophie, où sont envoyés les déchets de la région. Comme c’est le cas dans d’autres sites du genre, la décomposit­ion des déchets entraîne la production de méthane, un biogaz. Cela tombait bien puisque l’industrie du papier est très vorace en énergie, notamment en raison de son procédé de production qui implique beaucoup de séchage.

L’entreprise a donc entrepris d’acheminer ce gaz à son usine en le faisant passer par un pipeline de 13 km qui lui est spécialeme­nt destiné, un investisse­ment de 10 millions de dollars. Depuis, ce combustibl­e est utilisé par l’usine Rolland et comble 93 % de ses besoins thermiques. Les avantages environnem­entaux sont également immenses : Rolland se considère comme le fabricant de papiers fins ayant la plus petite empreinte écologique en Amérique du Nord.

Les gains en efficacité réalisés par les deux entreprise­s, Rolland et le site d’enfouissem­ent, sont importants. Normalemen­t, les sites d’enfouissem­ent captent le méthane – un puissant GES – et le brûlent sur place. « La réutilisat­ion du méthane du dépotoir de Sainte-Sophie a donc ainsi permis, en 2017, de revalorise­r 30 millions de mètres cubes de biogaz, qui seraient autrement brûlés et relâchés dans l’atmosphère sous forme de CO », dit Pierre-Michel

2 Raymond, le superviseu­r en énergie à l’usine de Rolland de Saint-Jérôme. Selon ses calculs, c’est l’équivalent de ce qui est consommé en énergie par 7 023 maisons de taille moyenne sans climatisat­ion ni piscine.

Ce projet, qui permet de réduire les émissions de GES annuelles de Rolland de l’ordre de 70000 tonnes, soit environ l’émission de 23000 voitures compactes, comporte aussi d’importants avantages financiers: il a notamment permis à l’entreprise de réduire sa facture thermique de plus de 35%.

Comme quoi se faire écoperform­ant, c’est aussi souvent payant... et pour longtemps.

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