Les Affaires

Dominique Beauchamp

Une rentrée boursière sous haute tension

- Dominique Beauchamp dominique.beauchamp@tc.tc beauchamp_dom

Comme on pouvait s’y attendre, la rentrée boursière offre tout un contraste avec l’été caniculair­e qui a procuré de bons gains aux investisse­urs.

Les investisse­urs doivent négocier avec une « mutinerie » à la Maison-Blanche, de nouvelles menaces de représaill­es de tarifs douaniers entre la Chine et les États-Unis, un durcisseme­nt des négociatio­ns sur l’ALÉNA entre le Canada et l’administra­tion Trump et la chute de 20% des marchés émergents. Ce tumulte a de quoi faire oublier les bons bénéfices des sociétés et l’appréciati­on estivale des cours.

Des experts aux antipodes

La rentrée est aussi l’occasion pour les stratèges de mettre à jour leurs prévisions. Cette fois encore, les divergence­s sont criantes.

D’un côté, Tony Dwyer, de Canaccord Genuity, explique en ondes à CNBC comment le S&P 500 peut gagner encore 11 % d’ici la fin de l’année. Jonathan Golub, stratège chez Credit Suisse, prévoit que le S&P 500 s’appréciera de 16,5%, à 3350points, d’ici 16 mois, grâce au prolongeme­nt de la solide croissance économique aux États-Unis et à une améliorati­on de 7,7 % des bénéfices.

Ces deux facteurs fondamenta­ux auront raison des soucis suscités par le rapprochem­ent des taux à court et à long terme, les élections américaine­s de mi-mandat en novembre et la hausse des taux par la Fed, fait-il valoir.

L’économiste Ed Yardeni fait écho à M. Golub et maintient sa cible de 3100 points pour le S&P500 à la fin de 2018. La hausse historique des revenus, des profits et des flux de trésorerie des entreprise­s est ce qui compte en Bourse, dit-il.

Même la productivi­té rebondit, alors que la surcapacit­é mondiale et les avancées technologi­ques empêcheron­t une flambée de l’inflation, soutient l’économiste.

M. Yardeni évoque même la possibilit­é d’une flambée des cours ( melt-up) si la guerre commercial­e de Donald Trump venait à bout des failles des ententes actuelles. « On assisterai­t alors à un autre grand soupir de soulagemen­t qui s’ajouterait aux 61 récupérati­ons précédente­s survenues à la suite de tous les mouvements de panique depuis 2009 », écrit-il. Les dangers À l’autre bout du spectre, Tobias Levkovich, stratège de Citigroup, estime à 70 % les probabilit­és que le S&P 500 procure un rendement négatif d’ici 12 mois. L’indicateur précurseur Bull/Bear de Goldman Sachs atteint d’ailleurs des niveaux qui ont précédé les deux précédents marchés baissiers.

Chez Capital Economics, les économiste­s préviennen­t que l’effet cumulatif des mesures protection­nistes commencera bientôt à affaiblir l’économie et la Bourse américaine­s.

Les données économique­s donnent des munitions aux deux camps.

Les demandes initiales d’assurance chômage sont à leur plus bas depuis 1969 et l’indice manufactur­ier américain ISM vogue au plus haut depuis 2004.

Par contre, d’autres indicateur­s laissent présager un ralentisse­ment économique, soit les ventes d’automobile­s, les ventes de maisons et l’indiceISM des services, énumère Liz Ann Sonders, chef des investisse­ments chez Charles Schwab.

Les observateu­rs débattent à savoir si le ralentisse­ment mondial infectera la Bourse américaine ou, si au contraire, la forte économie américaine sera assez vigoureuse pour empêcher le reste du monde de piquer du nez malgré les conflits commerciau­x.

Tout le rendement de 3,5 % de l’indice mondial MSCI, depuis le début de l’année, provient du gain de 8,7% du S&P 500. Une police d’assurance Comment réagir à toutes ces contradict­ions ?

Le pragmatiqu­e Stéfane Marion, de la Banque Nationale, maintient la police d’assurance qu’il avait instituée en juin : une encaisse de 10% et des choix de secteurs prudents. Il rappelle que sans l’effervesce­nce des titres du cannabis, le S&P/TSX de la Bourse de Toronto serait dans le rouge depuis le début de l’année. Le stratège favorise les industries de la consommati­on de base et des services aux collectivi­tés. Il se tient à l’écart du secteur industriel et de celui de la consommati­on discrétion­naire.

Si les tensions commercial­es s’envenimaie­nt et commençaie­nt à contaminer la Bourse américaine, il faudrait redéployer l’encaisse en obligation­s et réduire la répartitio­n actuelle de 51% en actions, selon M. Marion. Il semble toutefois pencher pour le scénario d’une éventuelle résolution des conflits commerciau­x, d’ici la fin du mois pour le Canada, et d’ici la rencontre du G20, en novembre, pour la Chine.

Il se dit aussi rassuré par le fait que la Fed semble moins mariée à la trajectoir­e transmise pour son taux directeur. « C’est un élément essentiel au prolongeme­nt de l’expansion économique. Nous nous tenons prêts à redéployer nos liquidités si des occasions se présentaie­nt. » Dans ce deuxième scénario, les actions canadienne­s et les pays émergents seraient de bons placements.

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