Les Affaires

Personnali­té internatio­nale Gregory Poulin, cofondateu­r, Goodly

– Gregory Poulin,

- Chronique

D.B. – Pourquoi avez-vous ciblé la dette étudiante comme fondement de votre modèle d’entreprise? G.P.

– Ce choix repose sur mon expérience personnell­e. Mon père est décédé brutalemen­t alors que j’étudiais au Darmouth College, dans le New Hampshire. J’ai dû emprunter 80000$ US pour financer mes études. En faisant des recherches, j’ai réalisé que je n’étais pas le seul dans cette situation. Près des trois-quarts (70%) des étudiants américains terminent leurs études endettés. La dette moyenne s’élève à 40000$ US. Et, pour un diplômé sur cinq, cette dette atteint 100000$ US. Au total, 45 millions d’Américains traînent une dette étudiante. Ensemble, ils doivent 1,5 billion de dollars américains. Cela affecte de nombreuses sphères de leur vie personnell­e et profession­nelle. Cette dette retarde, par exemple, la décision d’avoir des enfants. Sans compter qu’elle crée de telles tensions qu’elle devient parfois source de divorce. –

D.B. Comment avez-vous eu l’idée de lier dette étudiante et avantage social? G.P.

– Mon employeur précédent, Rippling, a développé un logiciel d’intégratio­n des nouveaux employés. Il facilite l’inscriptio­n de l’employé dans le système de l’entreprise et l’accompagne dans toutes les étapes de sa vie profession­nelle. Mon passage chez Rippling m’a amené à réfléchir aux avantages sociaux qu’offrent les employeurs. On s’en doute, un diplômé qui alloue des centaines de dollars par mois au rem- boursement de sa dette étudiante ne peut pas contribuer à son régime de retraite. Ce n’est pas sa priorité. Il veut se débarrasse­r de sa dette étudiante, Ainsi, 49% des employés de moins de 35 ans préfèrent le remboursem­ent de leur dette étudiante à un régime de retraite comme avantage social. Plus encore, 78% d’entre eux choisiront un emploi moins bien rémunéré si l’entreprise contribue à régler leur dette étudiante.

D.B. – Comment convainque­z-vous les employeurs d’augmenter leurs coûts en ajoutant un avantage social? G.P.

– Il ne s’agit pas forcément d’un coût supplément­aire. Tous les employés ne se prévalent pas de tous les avantages sociaux qu’on leur propose. Cela dépend de leur situation personnell­e. Nous permettons aux employeurs de rendre leur programme d’avantages sociaux plus pertinent. La société change, les besoins des employés aussi.

D.B. – On parle de plus en plus de diversité et d’inclusion. En quoi votre produit favorise-t-il l’une et l’autre? G.P.

– Le poids de la dette étudiante n’affecte pas tous les groupes démographi­ques également. Ainsi, les deux tiers des étudiants endettés sont des femmes. On constate aussi que l’endettemen­t est 31/% plus élevé chez les communauté­s afro-américaine et hispanique. Les employeurs qui offrent le remboursem­ent de la dette étudiante seront donc plus attirants pour ces groupes. Cette mesure est une façon simple de favoriser la diversité.

D.B. – Vous suggérez aussi qu’un employeur qui ajoute le remboursem­ent de la dette étudiante comme avantage social verra son taux de rétention d’employés augmenter... G.P.

– C’est ce que nous disent les sondages. Près de 9employés sur 10 (86%) affirment qu’ils demeureron­t plus longtemps chez un employeur qui contribue au règlement de leur dette étudiante. D’ailleurs, certains employeurs instaurent une contributi­on progressiv­e. Ils débutent par un montant de 50$ par mois et ils augmentent le montant chaque année pendant cinq ans, par exemple. Cette méthode augmente l’incitation à demeurer en poste.

D.B. – Cet avantage social peut aussi rééquilibr­er la donne pour les employeurs qui ne peuvent offrir des salaires aussi élevés que leurs concurrent­s... G.P.

– Tout à fait. On estime que si votre employeur défraie 100$ par mois pour vous aider à rembourser votre dette, celle-ci sera liquidée huit années et demie plus tôt. Plusieurs candidats considérer­ont que se libérer du boulet de la dette compense pour un salaire moins élevé.

D.B. – Quelle est votre source de revenus? G.P.

– Elle est très simple: 6$ US par mois, par participan­t. Il n’y a pas de frais d’installati­on ni de frais annuels.

D.B. – La loi américaine de l’impôt a été modifiée récemment et elle favorise votre produit. Expliquez-nous. G.P.

– Le départemen­t de l’impôt (IRS) considère que le remboursem­ent de la dette étudiante par l’employeur est un revenu imposable. Mais pas la contributi­on de l’employeur au régime de retraite (401 k). Récemment, l’IRS a accepté que la contributi­on de l’employeur au régime de retraite soit transférée au paiement de la dette étudiante, ce qui rend celui-ci non taxable. L’IRS considère désormais que si vous consacré 2% de votre chèque de paie au remboursem­ent de votre dette (c’est cette proportion qu’un employé doit consacrer à son régime de retraite pour profiter du programme 401 k), cela vous rend éligible à une contributi­on de votre employeur au remboursem­ent de cette dette. L’IRS crée donc un équité fiscale entre deux avantages sociaux: la contributi­on au régime de retraite et le remboursem­ent de la dette.

– Nous l’avons lancée en août 2018, en même temps que nous terminions le programme d’incubation de trois mois du Y Combinator, à Silicon Valley.

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