Dominique Beauchamp Québec inc. pourrait perdre deux autres membres
– Philippe Hynes,
L’annonce, coup sur coup, par Uni-Sélect (UNS, 21,13$) et Médiagrif (MDF, 11,31$) qu’elles évaluent leurs possibilités stratégiques risque de les faire disparaître à leur tour du paysage boursier québécois. Comme avec Canam et Lumenpulse en 2017, chaque retrait fait craindre un appauvrissement sans fin des choix de placement pour les amateurs de titres québécois.
Il faut pourtant se remémorer que la Bourse est une méritocratie où seules les sociétés les plus performantes durent.
Les rachats et les fusions, ainsi que les acquisitions, font aussi partie du cycle naturel de tous les marchés financiers à long terme, rappelle Pierre Lussier, qui gère le fonds Québec Eterna.
Le gestionnaire Philippe Le Blanc, PDG de Cote 100, de Saint Bruno, espère seulement que d’autres entreprises locales prendront éventuellement le relais.
« Dans ces deux cas, on peut dire que la performance financière laissait à désirer depuis quelques années. La pression est forte pour les entreprises de livrer la marchandise, sinon… », a-t-il expliqué en entrevue.
Les nouvelles recrues sont pourtant de plus en plus rares en raison des coûts énormes d’être en Bourse, des obligations de divulgation trimestrielle et justement de la pression de performer à court terme.
Un terrain de jeu encore garni
M. Lussier n’est pas du tout secoué par ces deux départs potentiels.
L’univers québécois d’entreprises qu’il a repérées compte plus de 120 sociétés (d’une valeur individuelle d’au moins 20 millions de dollars) qui cumulent une valeur boursière totale de 420 milliards de dollars. « C’est un beau pâturage rempli de potentiel qui a l’avantage d’être enrichi d’excellents dirigeants », a dit M. Lussier.
Il juge donc qu’il dispose d’assez d’oeufs pour garnir son panier sans nuire aux rendements qu’il procure aux investisseurs.
Ces témoignages tranchent avec l’alarmisme qui domine chaque fois qu’on évoque le départ de la Bourse d’une entreprise québécoise.
Le regroupement Québec Bourse recommande d’ailleurs au gouvernement québécois d’instaurer quatre crédits d’impôt pour raviver l’intérêt pour la Bourse et ainsi soutenir l’effet multiplicateur qui l’accompagne. Ce n’est donc pas pour rien que la Caisse de dépôt et placement vient d’allonger 182 M$ pour faciliter la sortie des deux familles fondatrices de Stella-Jones (SJ, 44,37 $), le fabricant de traverses et de poteaux de bois.
Malgré tout, un survol des archives du journal Les Affaires donne lieu à de curieuses découvertes de sociétés longtemps oubliées.
Qui se rappelle de Venmar, Informatrix 2000, Pantorama, Datamark, Dramex, Autostock, Tapis Peerless ou Honco et j’en passe?
Le Québec boursier et économique a continué à tourner malgré leur disparition de la Bourse.
Qui pourrait être les prochaines?
Ces départs soulèvent évidemment la question des futures candidates à une mise en vente.
À long terme, les entreprises familiales Velan (VLN, 11,81 $), Reitmans (RET.A, 4,14$) et Industries Dorel (DII.B, 24,40$) sont des candidates pour une éventuelle mise aux enchères, puisque aucune relève n’assure leur avenir.
Il est intéressant de noter que Michelle Cormier, qui vient d’accéder à la tête du conseil d’Uni-Sélect, siège également au conseil du fabricant de vélos et d’articles pour enfants Dorel.
Pour l’instant, rien n’indique toutefois que ces trois sociétés pourraient fermer leur capital ou solliciter des offres. Par contre, il y a beaucoup d’agitation en coulisse chez une quatrième: le distributeur alimentaire Colabor (GCL, 0,38$).
Le sort du grossiste, dont le laborieux redressement tarde à donner des résultats, suscite des interrogations. Le remue-ménage à la haute direction se poursuit depuis le début de l’année. Le 11 septembre, Mario Brin, ancien vice-président de Garda World, a joint Colabor pour remplacer le précédent chef de la direction financière, Jean-François Neault. Le division ontarienne a elle aussi un nouveau patron.
De plus, le grossiste vient de renégocier un prolongement d’un an de ses prêts bancaires et de six mois d’un prêt fourni par le Fonds de solidarité de la FTQ.
Robert Paré, un ancien dirigeant d’Alimentation Couche-Tard, représente le Fonds FTQ au conseil de Colabor depuis neuf mois.
Le vice-président du conseil, Robert Briscoe, qui détient 11,1% des actions, agit également comme conseiller depuis 2016 puisqu’il a dirigé AlimPlus pendant 24 ans. M. Briscoe, 74 ans, possède aussi le distributeur alimentaire Dubé Loiselle, que Colabor peut d’ailleurs racheter en vertu d’une option d’achat qui échoit en octobre. La Caisse de dépôt détient 8,4% des actions.
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STÉPHANE ROLLAND – Quelle est votre lecture du marché boursier en ce moment? PHILIPPE HYNES
– La toile de fond est bonne. L’économie va bien, les bénéfices des entreprises sont en hausse, les consommateurs sont confiants et les entreprises investissent. Par contre, les multiples sont élevés. Les occasions sont donc limitées, mais c’est un peu arbitraire parce que ce sont vraiment les titres technologiques qui ont aidé le marché.
S.R – Quelle société est sur votre écran radar? P.H.
– Le multiple de Cascades (CAS, 12,99 $) a piqué notre curiosité. Il est à moins de six fois le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement (BAIIA). Le titre est une façon de jouer le commerce électronique avec les activités dans le carton-caisse (qui sert à fabriquer les boîtes servant au transport). Dans ce segment, Cascades a un avantage concurrentiel, car elle utilise de la fibre recyclée. Le coût de leurs matières premières est plus avantageux en ce moment, ce qui leur permet de générer des marges intéressantes. Le titre a baissé de 30% depuis un an et demi, principalement en raison du recul des bénéfices dans le segment du papier tissu. J’estime que le marché n’accorde aucune valeur à ce segment. Oui, les bénéfices ont baissé, mais Cascades modernise ses opérations et investit. Je crois qu’il y aura une augmentation de la rentabilité. Je n’anticipe pas d’autres éléments négatifs à venir dans ce segment.
S.R. – Il y a cinq ans que Mario Plourde a été promu au rang de PDG, le premier à ne pas faire partie de la famille Lemaire. Que pensez-vous de son travail? P.H.
– Il a investi beaucoup d’argent dans le segment carton-caisse. Je pense qu’il a été critiqué à ce moment-là, car les gens n’ont pas vu les perspectives du secteur. Aujourd’hui, il récolte les fruits de ces excellents investissements. Il fait la même chose en investissant dans le papier tissu à un moment où l’industrie est plombée par une faible rentabilité. L’avenir nous dira si c’est judicieux. La stratégie rejoint ma vision à contre-courant, soit d’investir au bas du cycle.
S.R. – Dernièrement, Dollarama a surpris les marchés avec des prévisions plus faibles que prévu, ce qui a fait chuter le titre. Comment interprétez-vous cela? P.H.
– Je suivais Dollarama (DOL, 42,56$) à distance. Là, elle tombe sous mon radar. Je commence à trouver ça intéressant et ça m’incite à l’analyser plus en profondeur. Ça me fait penser à Couche-Tard (ATD.B, 65,67$), qui a reculé à un moment où les attentes étaient élevées.
S.R. – Quel secteur trouvez-vous attrayant? P.H.
– Le marché canadien est relativement plus intéressant en ce moment. Le S&P/TSX est pratiquement au même niveau qu’en 2014. Ce qui m’intéresse particulièrement, ce sont les petites capitalisations canadiennes. Elles ont baissé de 12 % depuis leur sommet de 2014. Il y a des occasions pour certains titres qui se sont dépréciés sans raison fondamentale.
S.R. – À l’inverse, quel secteur évitez-vous? P.H.
– Les FAANG (acronyme pour Facebook, Amazon, Apple, Netflix et Google [sociétémère Alphabet]) sont d’excellentes entreprises, mais elles sont très difficiles à évaluer, car il faut regarder très loin en avant pour justifier les évaluations d’aujourd’hui. Je ferais très attention d’entrer au prix actuel.
S.R. – Même pour Facebook qui a subi une correction? P.H.
– Oui, même Facebook. On voit ce qui peut arriver avec une évaluation élevée. Facebook entre dans une phase d’incertitude réglementaire concernant l’utilisation des données privées. Ils vont devoir réviser leur modèle et ça pourrait changer la profitabilité et le rythme de croissance. La croissance va continuer, mais à quel rythme? Les analystes interrogés par Reuters aiment Cascades