Parlons coop
« J’ai décidé d’écrire ce livre, parce que je constate une sous-exposition ahurissante du modèle coopératif dans le débat public. » On comprendra que Jean-Pierre Girard, coauteur du livre Les coopératives, une utopie résiliente, paru fin septembre, est un fervent partisan de ce modèle entrepreneurial. Le fait est que, partisan ou pas, les coopératives qui font les manchettes sont l’exception. Le modèle rassemblait pourtant déjà plus de huit millions de membres au Québec en 2016, rappelle l’auteur.
À la veille de la Semaine de la coopération (du 14 au 20 octobre) et alors que le Coopérathon, une compétition d’innovation ouverte organisée par Desjardins, bat son plein (du 26septembre au 1ernovembre), le moins que l’on pouvait faire était de porter notre attention sur l’entrepreneuriat collectif. En manchette de ce numéro du journal, Diane Bérard met en lumière de nouveaux entrepreneurs qui nous expliquent pourquoi ils ont choisi ce modèle.
Nous portons notre regard au-delà des gros noms. Oui, « Desjardins rassemble 7 personnes sur 10 au Québec et il n’y a aucun autre endroit dans le monde où une entreprise coopérative a une telle pénétration », comme me le rappelait M. Girard. Mais l’empreinte du plus gros employeur du Québec reflète-t-elle les tendances en matière de coopératives?
D’après les statistiques compilées par le ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation (MESI), le nombre de coopératives a connu une hausse modeste de 2000 à 2015 (+2,5%) et leur actif, une hausse considérable (+85%). Si les coops de producteurs ont tiré l’actif moyen vers le haut, ce sont les coops de solidarité qui font gonfler les rangs. Près d’une nouvelle coop sur deux adopte ce modèle. « Le modèle touche de nouveaux secteurs et intéresse des gens qui, a priori, n’étaient pas dans le mouvement coopératif. Il y a même des microbrasseries qui sont des coops de solidarité », m’a expliqué M. Girard, qui est aussi chargé de cours à l’ESGUQAM. L’engouement s’est cependant beaucoup calmé depuis 2015. En coïncidence avec la montée en puissance de l’entrepreneuriat social. Les entrepreneurs qui veulent changer le monde préfèrent-ils le faire en solo plutôt que collectivement? Entrepreneuriat social et entrepreneuriat collectif ont des intentions communes, mais des statuts bien différents. Or, ce qui importe, c’est le statut, m’avait répondu Jean-Martin Aussant à une époque où il était encore à la tête du Chantier de l’innovation sociale.
M. Girard est aussi de cet avis: « Souvent, on gomme les différences entre les statuts. Dans mon cours, je m’applique à dégommer: la propriété collective, le pouvoir réparti de façon égalitaire, le partage des résultats et le caractère inaliénable du patrimoine, c’est ce qui fait une grosse différence sur le plan de la pérennité. » Ce qui nous ramène au titre de son livre, la résilience. Une résilience maintes fois démontrée.
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