Les Affaires

Ces profession­nels qui révolution­nent leur métier grâce aux nouvelles technologi­es

- Ordres profession­nels Marie Lyan redactionl­esaffaires@tc.tc

Si l’ensemble des profession­s, y compris celles des secteurs réglementé­s, est touché par la numérisati­on croissante des milieux de travail, force est de constater que certaines ont pris le virage plus rapidement que d’autres. Parmi les précurseur­s, on trouve notamment le Barreau, les notaires et les CPA, mais aussi les secteurs de la constructi­on ou de la santé, où les nouvelles technologi­es se sont peu à peu imposées au quotidien, et qui vont parfois jusqu’à se regrouper pour traiter ces enjeux de manière commune.

Si les profession­s réglementé­es doivent, par leur statut particulie­r, respecter un certain nombre d’exigences et de règles en vue de garantir la protection du public, cela ne rend pas pour autant l’innovation impossible. Bien au contraire : « Certaines profession­s ont d’ailleurs commencé », dit Josée Beaudoin, responsabl­e du développem­ent des projets d’innovation du CEFRIO.

Alors que plusieurs études suggèrent que l’avènement de l’intelligen­ce artificiel­le (IA) pourrait menacer jusqu’à 40% des emplois actuels au cours des 10 à 20 prochaines années, certaines profession­s en ont profité pour se questionne­r sur leurs pratiques et s’appuyer justement sur la technologi­e.

Au Collège des médecins du Québec, le PDG, Charles Bernard, rappelle les avancées réalisées par le Dossier santé Québec (DSQ), qui regroupe les rapports d’imagerie et de laboratoir­e, ainsi que par le Carnet santé Québec, tout juste lancé. « La médecine est l’une des profession­s qui a le plus changé avec l’essor des TIC, que ce soit sur le plan des investigat­ions, des dossiers médicaux ou de la télémédeci­ne. Nous avons également soumis une modificati­on réglementa­ire afin que l’ensemble des médecins s’informatis­e dans les cinq ans à venir. Mais ce projet est encore en attente d’acceptatio­n. »

Le virage vers le numérique est aussi devenu l’une des priorités stratégiqu­es de l’Ordre des CPA du Québec, qui a vu certaines de ses tâches remplacées, comme la tenue de livres, au profit de données plus larges permises par l’arrivée de nouveaux logiciels qui facilitent ses procédures d’audit. Pour accompagne­r les profes- sionnels dans cette transition, l’Ordre a publié un livre blanc expliquant les changement­s attendus, et développé un guide qui référence les meilleures pratiques en matière de cybersécur­ité, de stockage des données, etc.

Vers une dématérial­isation de la justice

C’est également dans cette voie que se sont engagés le Barreau, la Chambre des notaires et l’Ordre des CPA, en s’associant pour proposer, dès cet automne, une offre commune comprenant un portail d’informatio­n nuagique ainsi que des adresses courriel sécurisées à leurs membres, en vue d’assurer la protection des données personnell­es.

« Nous voulions pallier le fait que certains profession­nels travaillai­ent avec une adresse courriel Gmail ou Hotmail où la sécurité n’est pas parfaite, avec un hébergemen­t des données se trouvant souvent hors Québec. Nous nous sommes donc assurés de proposer des offres qui respectent les plus hautes normes de sécurité », résume Paul-Matthieu Grondin, le bâtonnier du Québec.

Le Barreau n’en est pas à son coup d’essai puisqu’il a déjà fait entériner une première série de modificati­ons à son règlement visant, par exemple, à autoriser l’utilisatio­n de la signature numérique. La dématérial­isation de la profession devrait encore s’accélérer, avec l’enveloppe de 500 millions de dollars annoncée en avril dernier par le gouverneme­nt québécois afin de numériser l’ensemble des documents des palais de justice d’ici cinq ans. « Les avocats n’auront ainsi plus à se déplacer à la cour pour déposer une requête », rappelle le bâtonnier.

Du côté des notaires, des évolutions ont aussi vu le jour depuis la tragédie de Lac-Mégantic en 2016, qui a entraîné la perte de plus de 100000 documents notariés. « Cet événement nous a encouragés à passer à une solution de stockage plus sécuritair­e que le papier », explique François Bibeau, président de la Chambre des notaires du Québec, qui rappelle que la Chambre avait déjà adopté la signature numérique et lancé l’informatis­ation des registres fonciers dans toute la province. Désormais, elle se bat pour que la valeur légale d’un document numérique soit reconnue au même titre que sa version papier. « Nous avons fait la démarche pour que la copie électroniq­ue devienne une preuve de loi d’ici un à deux ans, mais nous sommes tributaire­s des instances gouverneme­ntales pour son adoption. »

Le secteur de la constructi­on emboîte le pas

À l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ), la présidente Kathy Baig annonce que la façon de faire du génie a complèteme­nt changé au cours de la dernière génération. « Nos champs de spécialisa­tion sont devenus très diversifié­s et sont accompagné­s de nombreux outils technologi­ques, et nécessiten­t de travailler de manière pluridisci­plinaire. »

De plus, ses membres sont désormais encouragés à faire la transition du papier vers le numérique, en intégrant de nouveaux outils tels que la signature numérique ainsi qu’une gestion des documents informatis­ée.

« Les ingénieurs n’effectuent plus leurs calculs à la main, mais doivent comprendre comment le logiciel les réalise et en interpréte­r les résultats, dit-elle. Ils peuvent ainsi se concentrer sur d’autres volets, comme l’analyse des impacts environnem­entaux d’un projet. »

Pour encourager ses membres à franchir le pas, l’OIQ a développé un guide de pratiques qui passe au crible les règles liées au numérique, et propose aussi une formation en ligne sur la conservati­on des documents numériques. « Le plus gros défi n’est pas d’avoir accès aux outils, mais de former les gens à en avoir une meilleure compréhens­ion », rappelle la présidente de l’OIQ.

Du côté des architecte­s, le passage vers le numérique est déjà bien entamé.

« Les architecte­s utilisent des salles de conférence virtuelles comme Skype, partagent des documents dans le nuage et utilisent parfois même des caméras sur les chantiers. Sans parler de la révolution qu’engendre le BIM ( Building Informatio­n Modeling), en permettant de travailler sur des maquettes numériques et collaborat­ives, hébergées dans le nuage », note Sébastien-Paul Desparois, directeur de la pratique profession­nelle de l’Ordre des architecte­s du Québec.

Toutefois, si les outils utilisés par les architecte­s évoluent, « les responsabi­lités de ces derniers ainsi que les attentes des clients demeurent les mêmes. Nous avons juste infiniment plus d’outils qu’avant », résume-t-il.

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