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ÉCONOMIE10­1 : LE PIB EST-IL ENCORE UNE MESURE PERTINENTE ?

- Série 6 de 6 Stéphane Rolland stephane.rolland@tc.tc C @@ srolland_la

Dans le sixième et dernier épisode accessible maintenant, Alain Paquet, professeur d’économie à l’UQAM, répond à la question « Le PIB est-il encore une mesure pertinente? » Pour écouter l’épisode, rendez-vous sur lesaffaire­s.com/dossier/economie-101 et sur iTunes

Pour plusieurs, le produit intérieur brut (PIB) est synonyme de la richesse d’un pays. Pourtant, de nombreux experts se questionne­nt à savoir si cet indicateur, qui mesure la production d’un pays, est le bon indicateur pour jauger du niveau de vie d’une population.

« Le PIB est-il encore une mesure pertinente? » est le thème du sixième et dernier épisode d’Économie 101, une série en baladodiff­usion de Les Affaires enregistré­e dans les studios de l’Université Concordia, où un expert répond à une question sur l’économie. Nous en avons discuté avec Alain Paquet, professeur d’économie à l’UQAM.

Notre invité reconnaît que le PIB a ses limites, mais l’indicateur transmet des informatio­ns pertinente­s et nécessaire­s, selon lui.

« Je pense que ce serait une erreur de ne plus utiliser le PIB. Il mesure des choses qui sont comparable­s d’un pays à l’autre. D’ailleurs, tous les pays ne s’entendraie­nt pas nécessaire­ment sur ce que sont les angles morts du PIB. On passerait des années à s’entendre là-dessus. On n’améliorera pas la situation du tout en jetant le bébé avec l’eau du bain. Le PIB est un indicateur de création de richesse. L’augmentati­on du PIB dans un pays, c’est l’augmentati­on de la richesse du pays. Ça ne veut pas dire de la créer n’importe comment. Ça ne veut pas dire de faire n’importe quoi avec. Si on n’en crée pas, de la richesse, on va être encore plus dans le trouble. »

Le PIB a plusieurs angles morts. Certaines activités génératric­es de valeur ne sont pas compilées, comme la valeur créée par le travail domestique ou le bénévolat. Les activités sur le marché noir, elles aussi, passent sous le radar. De plus, le PIB ne prend pas en compte les dommages à l’environnem­ent et les inégalités de richesse.

En avril dernier, le magazine The Economist y allait de sa propre remise en question du PIB. Avec la croissance de l’économie du Web, une grande partie de l’innovation n’est tout simplement pas prise en compte, notent ses auteurs. « Dans un monde où les maisons deviennent des hôtels sur Airbnb, où votre voiture devient un taxi Uber, où Facebook et YouTube procurent des heures de divertisse­ment à des centaines de millions de personnes gratuiteme­nt, bien des gens se demandent si le PIB n’est pas une mesure trompeuse. »

La Suisse est un exemple où le PIB semble ne pas tenir compte de tous les attraits de l’économie. L’indicateur mesure mal le niveau de vie de ses habitants, croit Claude Maurer, chef économiste pour la Suisse de Credit Suisse. Il souligne que le pays helvète a connu une croissance inférieure aux autres pays développés de 1871 à 2003. Pour- tant, ses habitants jouissent d’un des meilleurs niveaux de vie du monde. M. Maurer en vient à la conclusion qu’une partie des avantages économique­s de la Suisse, comme la force de son industrie bancaire et la valeur ajoutée qu’elle tire de ses échanges commerciau­x, ne sont pas pris en compte par l’indicateur. Besoin d’une autre mesure? L’autre critique formulée à l’égard du PIB est qu’il ne mesure pas le bien-être de ses habitants. Sont-ils heureux, en santé, bien éduqués ? Vivent-ils dans un lieu sécuritair­e?

Bien des experts ont tenté de s’attaquer à cette question. Au début des années 1990, l’économiste Amartya Sen a développé l’indice du développem­ent humain dans le cadre du Programme des Nations Unies pour le développem­ent. La mesure combine notamment l’espérance de vie, l’accès à l’instructio­n et le pouvoir d’achat.

Bien d’autres chercheurs et organismes ont développé des indicateur­s: l’OCDE, l’Institut Legatum, les économiste­s William Nordhaus et James Tobin, entre autres, se sont penchés sur la question.

Ces mesures sont utiles pour compléter les informatio­ns que nous procure le PIB, explique M. Paquet. « L’idée n’est pas de remplacer complèteme­nt le PIB, mais d’y ajouter des informatio­ns additionne­lles. » Le devoir de M. Paquet M. Paquet plaide que la croissance économique est nécessaire pour améliorer la qualité de vie des gens. Il invite les auditeurs à méditer sur le sujet.

« Le PIB est un indicateur de création de richesse. L’augmentati­on du PIB dans un pays, c’est l’augmentati­on de la richesse du pays. Si on n’en crée pas, de la richesse, on va être encore plus dans le trouble. » – Alain Paquet, professeur d’économie à l’UQAM

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