« La qualité de notre adaptation aux changements dépend de notre capacité à nous entraider »
– Sanjay Khanna,
D.B. – Parfois, on ne regarde pas assez loin devant... S.K.
– Il y a de ces choses que l’on peut prédire avec relativement de certitude. Puis, celles que seul un petit groupe de gens peuvent imaginer parce qu’ils se permettent de penser plus loin. Il faut que les bonnes personnes travaillent au bon moment sur le bon problème. Prenons le transport: la plupart d’entre nous se concentrent sur le carburant, soit le remplacement des énergies fossiles. Certains se soucient plutôt des infrastructures et de leur robustesse aux températures extrêmes qui se préparent.
D.B. – Vous parlez des quatre 100%. De quoi s’agit-il? S.K.
– Ce sont quatre tendances dont on est certain à 100% qu’elles se manifesteront. Il s’agit de la réorganisation de l’économie, de la pression sur la santé mentale, de l’accélération du changement technologique et des changements climatiques et températures extrêmes.
D.B. – Peut-on toujours nous adapter aux tendances? S.K.
– On peut s’adapter à peu près à tout, mais cela ne signifie pas qu’on s’en sort indemne. Il y a des limites à l’adaptation saine. Ce n’est pas parce qu’on s’adapte que notre bien-être est préservé. En fait, la qualité de notre adaptation aux changements dépend de notre capacité à nous entraider les uns les autres. Faire reposer tout le fardeau de l’adaptation sur l’individu est trop lourd. Il faut mettre des ressources à son service.
D.B. – Par rapport aux bouleversements qu’entraînent les tendances, nous disposons d’amortisseurs. Quels sont-ils? S.K.
– Ce sont les mécanismes formels et informels qui aident les individus et les organisations à affronter les émotions causées par les chocs systémiques. La nature et la culture sont des amortisseurs, tout comme les réseaux d’entraide et le sociofinancement. Les amortisseurs ramènent de la confiance dans le système. Cette confiance est essentielle pour nous permettre de croire que nous pourrons nous adapter aux changements qui s’imposent à nous.
D.B. – Les organisations peuvent-elles créer leurs propres amortisseurs? S.K.
– Oui, c’est souhaitable. Mais il faut être cohérent. Le Financial Times avançait qu’au lieu d’implanter des programmes de méditation, de gestion du stress et de la santé mentale, certaines organisations devraient simplement vérifier si leurs employés ont trop de travail. Je ne dis pas que de tels programmes ne devraient pas exister, au contraire. Mais ils ne doivent pas servir à compenser une charge de travail démesurée. Ces programmes devraient accompagner les employés dans les macrochocs du monde du travail et non ceux induits par leur employeur.
D.B. – Lorsque votre fils était au début de l’adolescence, vous lui avez dit que vous préfériez qu’il ait un A en amitié et un C dans ses matières académiques. Pourquoi? S.K.
– En développant tôt sa capacité à entretenir des relations saines avec les autres, mon fils a pu ensuite se concentrer sur ses matières académiques. L’intelligence sociale et émotionnelle nous permet de relever les autres défis. Elle développe notre esprit d’ouverture et notre sagesse.