Les Affaires

Couche-Tard relève la tête

- Marché en action Dominique Beauchamp dominique.beauchamp@tc.tc beauchamp_dom

Pendant que Dollarama (DOL, 35,84$) tombe de son piédestal, voilà qu’Alimentati­on Couche-Tard ( ADT. B, 69,84$) regagne le sien.

Ce chassé-croisé illustre à quel point la dynamique boursière peut parfois prendre le dessus dans le parcours des entreprise­s. Les attentes déçues envers Dollarama ont récemment fait fondre son cours et son évaluation élevée.

Couche-Tard avait connu le même sort entre 2015 et le printemps dernier. Pendant cette longue période, le doute s’est installé sur ses perspectiv­es. Ce purgatoire avait aussi dégonflé son évaluation de 24 fois le bénéfice à l’actuel 15 fois.

Pendant que les analystes et les investisse­urs doutaient, Couche-Tard est restée discrète et s’est entièremen­t consacrée à améliorer sa mise en marché afin de fouetter sa performanc­e.

Aujourd’hui, l’entreprise d’Alain Bouchard récolte les premiers fruits du virage amorcé il y a trois trimestres. Au cours de l’été, Irene Nattel, de RBC Marchés des Capitaux, tentait ses clients en affirmant que Couche-Tard n’avait pas besoin de ventes comparable­s élevées pour réaliser un bon rendement financier. C’est pourtant le retour de la croissance de plus de 4% des ventes par dépanneur comparable aux États-Unis qui a fait bondir son action de 34% depuis le mois de mai. Ces ventes suggèrent que les nouvelles initiative­s de mise en marché rapportent et que leur impact sera durable, croit Chris Li, de Macquarie Research.

Le marchand combine des promotions nationales à un assortimen­t plus local de produits et d’aliments, pour susciter l’achat impulsif, explique MmeNattel.

Des outils numériques lui permettron­t de personnali­ser encore plus les offres afin d’augmenter la fréquentat­ion des dépanneurs et la facture moyenne. « L’embauche, l’an dernier, d’un chef du marketing et d’un chef des systèmes d’informatio­n lui ont fait voir son positionne­ment sous un autre jour », évoque Patricia Baker, de Banque Scotia.

Forte d’une enseigne nationale, Circle K multiplie notamment les promotions de sucreries et de grignotine­s. Couche-Tard mise sur son plus grand rapport de force pour obtenir des réductions de la part des fournisseu­rs.

L’effort de mise en marché ne fait que commencer puisque six projets pilotes dans l’offre d’aliments démarreron­t au cours des six à neuf prochains mois, indique Mark Petrie, de Marchés mondiaux CIBC. « Couche-Tard élève encore une fois son jeu et adopte la rigueur de l’analyse qui a fait le succès des multinatio­nales de produits de consommati­on. Les dépanneurs étaient un peu en retard à cet égard », explique Keith Howlett, de Desjardins Marché des capitaux.

En même temps, l’intégratio­n des américaine­s CST Brands et de Holiday Stores n’a pas encore procuré toutes les synergies attendues.

Couche-Tard puise dans les meilleures pratiques d’Holiday, qui a su combiner une offre unique de sandwiches et de hot dogs gourmets, un service de lave-auto et un aménagemen­t physique propice à la dépense.

Les acquisitio­ns font toujours partie de la stratégie, et les cibles potentiell­es sont nombreuses, mais les prix élevés actuels invitent à la patience. Mme Nattel ne relève pas ses prévisions parce que le nouvel accent sur la croissance interne exigera d’importants investisse­ments. Couche-Tard double à 200 par année le nombre de nouveaux établissem­ents que Circle K compte ouvrir. L’analyste mise sur une progressio­n annuelle composée du bénéfice d’exploitati­on de 9 % d’ici 2021, sans les acquisitio­ns potentiell­es.

Si les ventes comparable­s devaient soutenir une cadence de 3 % jusqu’en 2021, son cours cible passerait de 80 $ à 83 $, précise-telle. À 80,87 $, le nouveau cours cible moyen de tous les analystes laisse entrevoir un gain d’encore 16% d’ici 12 mois.

L’évaluation de Couche-Tard est déjà passée d’un creux de 13,6 fois les bénéfices prévus, en mai, à 15,1 fois. Jim Durran, de Barclays, croit possible que ce multiple retrouve sa moyenne des 18 dernières années, soit 17 fois les bénéfices prévus, au cours des prochains mois, à mesure que les investisse­urs regagneron­t confiance.

Le cours cible de 80$ de Mme Nattel repose aussi sur un multiple de 17 fois les bénéfices prévus, ce qui correspond à la plus-value historique dont bénéficiai­t le titre par rapport à l’évaluation du S&P/TSX. M. Li établit son cours cible à 80$ en fonction d’une croissance annuelle composée de 18% des bénéfices entre 2018 et 2020. M. Petrie salue le nouvel élan de Couche-Tard, mais rappelle que ses dépanneurs américains bénéficien­t actuelleme­nt d’une conjonctur­e particuliè­rement favorable. Le plein emploi et la hausse des salaires augmentent l’humeur dépensière des automobili­stes, tandis que les marges d’essence à la pompe sont au-dessus de la moyenne.

La relance de la société ne pouvait pas mieux tomber pour l’entreprise de Laval. Dans la conjonctur­e morose, les investisse­urs sont plus avides que jamais de sociétés performant­es et peu chèrement évaluées, dans une industrie résiliente.

la

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada