Les Affaires

DES AUBAINES AU CENTRE COMMERCIAL

- Martin Jolicoeur martin.jolicoeur@tc.tc @JolicoeurN­ews

Le temps des fêtes approche. Nous profitons de l’occasion pour faire un tour de centre commercial, histoire de voir s’il s’y trouve des aubaines.

HUDSON’S BAY COMPANY (HBC, 8,57 $) Un vaste chantier de transforma­tions

L’histoire de HBC est depuis des années celle d’un détaillant d’une autre époque qui lutte aujourd’hui pour retrouver le Nord dans une mer agitée qui n’a plus rien à voir avec celle d’il y a trente ans.

Mais les résultats du deuxième trimestre en septembre donnent espoir (encore) que les gestes récents, notamment ceux de sa toute dernière chef de la direction (Helena Foulkes), propulsent l’entreprise sur une nouvelle voie. Celle de la rentabilit­é.

Au cours des derniers mois, des décisions majeures ont été prises: la vente de l’américaine Gilt Group, la fermeture de magasins et la vente de plusieurs immeubles phares de sa chaîne Lord & Taylor, la vente de 50% de ses opérations immobilièr­e et de détail en Europe. On pense ici surtout à la chaîne Galeria Kaufhof, en Allemagne, que les analystes – de leurs propres aveux – peinent à évaluer.

Résultat: à mi-exercice, le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissem­ent (BAIIA) de Hudson’s Bay Company s’élevait à 88 millions de dollars, comparativ­ement à seulement 5 M$ il y a un an. La hausse des ventes comparable­s de Saks (+6,7%) a impression­né, tandis que la chute de celles de Off 5th (-7,6%) continue de décevoir. Une déconvenue partiellem­ent attribuabl­e, selon l’analyste Patricia Baker, de Banque Scotia, à un « nouveau » mot d’ordre de viser les profits avant le volume de ventes.

Marchés mondiaux CIBC apprécie les efforts de nettoyage que la direction a entrepris ces derniers mois pour simplifier l’entreprise. La multitude d’enseignes, d’entités et de niveaux de propriétés de HBC continue de détourner du titre bien des investisse­urs, souligne son analyste Mark Petrie. Mais le chantier n’est pas terminé. Même si une remontée paraît « certaineme­nt possible », M. Petrie demeure inconforta­ble avec l’idée de parler d’une « forte probabilit­é » de succès des intentions de la direction.

Mme Baker attribue la recommanda­tion « performanc­e de secteur » à HBC, avec un cours cible de 13,50$. Pour sa part, M. Petrie ne conseille pas non plus d’acheter le titre, mais plutôt de le conserver. Sa cible est à 11,50$.

INDIGO BOOKS AND MUSIC (IDG, 12,12 $) Un test américain et de grands travaux

Après des années de préparatio­n, Indigo a ouvert, en octobre, son premier magasin aux États-Unis. Cet établissem­ent de 30000 pieds carrés, au New Jersey, pourrait être suivi de plusieurs autres. Une décision sur la question est attendue au printemps.

Un hic, toutefois: l’entreprise est au même moment dans un vaste programme de rénovation de ses magasins existants au Canada. Cette année, 19 ont été rénovés, ce qui a eu pour effet de réduire l’achalandag­e et le volume de ventes.

Néanmoins, les analystes recommande­nt l’achat du titre, certains que la nouvelle direction de l’entreprise finira par porter fruit. Pour l’ensemble de l’exercice 2019 (31 mars), PI Financial prévoit un recul de près de 70% du bénéfice d’exploitati­on, mais la firme anticipe un solide rebond une fois les investisse­ments effectués. En 2020, il devrait en fait être supérieur de 17% par rapport à ce qui était en 2018 (l’an dernier).

L’analyste Bob Gibson a un cours cible à 24,50$, soit un ratio (cours/bénéfice) de 16,4 fois le bénéfice par action qu’il attend en 2020 (plus 4,42$ d’encaisse par action).

David McFadgen, de Cormark Securities, se montre plus prudent, avec un cours cible de 19$.

ROOTS CORP (ROOT, 4,45 $) Un simple épisode ? Roots Corp a connu une fin d’année difficile. Une stratégie marketing déficiente combinée

à un climat anormaleme­nt clément en septembre et octobre ont donné du fil à retordre au détaillant canadien qui n’a pu profiter des ventes liées d’ordinaire à la rentrée scolaire.

Résultat: les analystes anticipent, pour le troisième trimestre 2018, une réduction des ventes comparable­s par rapport à la même période en 2017, et ont revu à la baisse leurs prévisions de revenus et bénéfices pour l’ensemble de l’exercice.

Néanmoins, une majorité recommande­nt toujours l’achat, convaincus que la récente contreperf­ormance de la société n’aura été qu’épisodique. L’introducti­on de nouvelles gammes de produits, les améliorati­ons à sa plateforme de vente en ligne et les rénovation­s de ses magasins devraient commencer à se faire sentir prochainem­ent.

Les analystes fondent aussi beaucoup d’espoir du côté des marchés chinois et taïwanais, où Roots connaît un bon succès. Et viennent appuyer les prévision de croissance annuelle moyenne du bénéfice par action de plus de 15% pour les deux prochaines années.

Tout en maintenant sa recommanda­tion d’achat, Brian Morrison, analyste de TD Securities, a abaissé, début novembre, sa cible de 20%, de 15,00$ à 12,00$, ou 15 fois le bénéfice par action de 0,78$ estimé pour l’exercice 2019.

Fin octobre, Janine Stichter, analyste de Jefferies, misait pour sa part sur une cible à 11$ l’action, ou 15 fois le bénéfice par action estimé de 0,72$ pour l’exercice 2020.

Enfin, plus critique sur l’enthousias­me du marché pour le titre, Michael Binetti, de Credit Suisse, a fait reculer sa cible de 8,50$ à 6,00$ à la mi-octobre, avec une prévision de bénéfice pour l’exercice 2019 de 0,74$ l’action, ou 8 fois le bénéfice par action anticipé pour le même exercice.

ARITZIA (ATZ, 17,46 $) Le vent dans les voiles

Aritzia a le vent dans les voiles et est certaineme­nt l’une des entreprise­s favorites des analystes dans le secteur du détail. À preuve, la totalité des neuf analystes recensés par Reuters recommande son achat.

Au deuxième trimestre, dont les résultats ont été dévoilés en octobre, le détaillant mode a présenté des ventes comparable­s en hausse de 11,5% et un bénéfice (avant intérêts, impôts et amortissem­ent) en hausse de 60% par rapport à la même période l’an dernier.

Une performanc­e similaire avait marqué son premier trimestre et tout indique que le troisième se chauffera du même bois. Il s’agirait alors d’un 17e trimestre consécutif de hausse des ventes comparable­s!

Ce détaillant de mode canadien de vêtements exclusifs s’adresse spécifique­ment aux femmes de 15 à 45 ans, une clientèle déjà fortement sollicitée. Aritzia réussit à se différenci­er de la concurrenc­e grâce à une offre composée à 90% de marques maison. Son réseau de distributi­on compte 66 boutiques au Canada et 24 aux États-Unis, en plus d’un site de commerce électroniq­ue.

Les analystes vantent l’exécution apparemmen­t sans faille de la direction, tant sur le plan du développem­ent des produits, des approvisio­nnements, du marketing et de l’immobilier que de la distributi­on.

L’histoire de HBC est depuis des années celle d’un détaillant d’une autre époque qui lutte aujourd’hui pour retrouver le Nord dans une mer agitée qui n’a plus rien à voir avec celle d’il y a trente ans.

Si l’ensemble des opérations contribuen­t aux résultats, la hausse des revenus de 40% sur le marché américain ne passe pas inaperçue. Les analystes voient d’un bon oeil les possibilit­és de prochaines ouvertures au sud de la frontière. Idem en ce qui a trait aux ventes en ligne qui, croit-on, pourraient représente­r 25% des ventes d’ici 2021.

Le titre d’Aritzia se négocie actuelleme­nt à près de 20 fois le bénéfice par action anticipé en 2020 (février) par Patricia Baker, de Banque Scotia. Elle croit que le titre pourrait atteindre 24$, ou 24,5 fois le bénéfice par action.

Mark Petrie, analyste chez Marchés mondiaux CIBC, mise sur une croissance moyenne du bénéfice par action entre 15% et 20% dans les 12 à 18 prochains mois. Il attribue à Aritzia un cours cible de 23$ pour les 12 à 18 mois, sur la base d’un ratio cours/bénéfice de 26 fois son estimation du bénéfice mitoyenne pour les exercices financiers 2019 et 2020 (calendrier 2018 et 2019).

Plus modéré, Camilo Lyon, de Canaccord Genuity, accole au détaillant la cible de 21$ l’action, ou 21 fois le bénéfice par action estimé pour l’exercice 2020, ou 11 fois le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissem­ent. Malgré des efforts de réinventio­n ces dernières années, Best Buy n’est pas au bout de ses peines. La toujours puissante concurrenc­e d’Amazon, combinée à une détériorat­ion du marché de plusieurs produits électroniq­ues, pousse les analystes à la prudence.

On salue ses efforts de reposition­nement, lesquels se sont traduits, en outre, par la mise en oeuvre d’une politique de prix plus compétitiv­e et par l’établissem­ent de partenaria­ts avec Apple, Samsung, Microsoft et Google, ce qui a permis l’introducti­on de leurs propres vendeurs sur les planchers des succursale­s de Best Buy.

Des changement­s positifs qui se seraient vite traduits par des gains de parts de marché. En outre, au troisième trimestre, les ventes comparable­s de ses activités américaine­s ont crû de 6%, et celles à l’internatio­nal (dont le Canada), de 7,6%.

Mais des analystes, dont Scot Ciccarelli, de RBC Marchés des Capitaux, s’inquiètent de la baisse d’engouement des consommate­urs pour plusieurs produits électroniq­ues (appareils photos, enregistre­urs, etc.) et l’absence de nouveaux produits locomotive­s sur le marché capables de soutenir le maintien de marges respectabl­es et l’améliorati­on des ventes comparable­s du détaillant à court et à moyen termes.

Avec une cible à 69$ US l’action, l’analyste de RBC applique un ratio cours/bénéfice de 12,5 à un bénéfice anticipé 2019 de 5,20$ US par action.

L’analyste Christophe­r Horvers, de J.P. Morgan, s’inquiète aussi du degré de dépendance de Best Buy pour nombre de produits électroniq­ues présentant une faible croissance, qui sont en outre sujets à la déflation et offrent de faibles marges. Ceux-ci sont également souvent trop liés à la seule période d’achats des fêtes, encore responsabl­e de la moitié des revenus du groupe.

Néanmoins, en s’appuyant sur les prévisions de la direction, il a une cible à 75$ US, tirée de l’applicatio­n d’un multiple de 13 au bénéfice par action estimé de 5,84$ US pour l’exercice 2020. En dépit des vents contraires, la majorité des analystes recensés par Reuters se montre optimiste quant aux perspectiv­es de développem­ent de Canadian Tire. En novembre, l’entreprise a présenté un bénéfice surpassant les attentes. Depuis le début de l’exercice 2018, son bénéfice par action ajusté a crû de 9,1%.

L’entreprise canadienne tire l’essentiel de ses revenus de deux fronts: le commerce de détail et les services financiers. Des activités qui sont, du reste, de plus en plus interrelié­es.

Du côté du commerce de détail, l’entreprise a présenté des hausses de ventes comparable­s au troisième trimestre de 2,2% chez Canadian Tire Retail, de 6,1% chez Mark’s (et L’Équipeur), et de 2,2% chez FGL Sports (Sports Experts, Atmosphère, etc.).

Pour affronter la concurrenc­e, le détaillant se concentre depuis quelque temps sur l’enrichisse­ment de son portefeuil­le de marques privées (Woods, Outbound, Noma et Paderno), dont les revenus ont augmenté de 20% au dernier trimestre. Cette stratégie lui permet de se différenci­er des offres concurrent­es tout en profitant de marges avantageus­es, fait valoir Patricia Baker, de Banque Scotia. C’est dans le même esprit que Canadian Tire y allait d’un grand coup et achetait en juillet dernier la norvégienn­e Helly Hansen, connue des amateurs de plein air.

Ce nouvel accent sur les marques privées est considéré comme l’un des moteurs de croissance du détaillant. Vishal Shreedhar, de Financière Banque Nationale, s’en réjouit et réitère la suggestion que le détaillant puisse acheter Roots, une fois l’intégratio­n de Helly Hansen terminée.

Du côté des services financiers, Canadian Tire connaît une belle progressio­n. Ses investisse­ments importants dans le lancement de sa nouvelle carte de crédit, conjugués au déploiemen­t de son programme de fidélité, baptisé Triangle, aurait permis une hausse de 21% de ses membres actifs depuis le printemps.

Aujourd’hui, deux millions de consommate­urs utilisent l’une ou l’autre des cartes de crédit de Canadian Tire, et son programme de fidélité compte plus de 10 millions de membres. La richesse de cette banque de données lui confère un avantage de taille sur la concurrenc­e, estime Brian Morisson, de TD Securities. On le constatera, dit-il, lorsqu’elle déploiera son nouveau service d’offres personnali­sées hebdomadai­res, un projet évalué à 4,5 M$.

Peter Sklar, de BMO Marchés des capitaux, maintient une cible à 192$, avec une somme des différente­s parties de la société.

Keith Howlett, de Desjardins, prévoit un bénéfice par action de 12,07$ en 2018 et de 13,24$ en 2019. Il fixe son cours cible à 205$, soit 16 fois son anticipati­on de bénéfice par action des quatre prochains trimestres, en provenance de ses activités de ventes au détail, des services financiers, et des activités immobilièr­es. L’entreprise de Vancouver, qui évolue dans le même créneau que la québécoise Lolë, continue de profiter d’un « rare degré de connexion émotionnel­le » avec sa clientèle.

Cet avantage, combiné à une notoriété et des parts de marché encore faibles par rapport à son potentiel de croissance, fait de lululemon l’un des titres canadiens du commerce de détail parmi les plus suivis des analystes. Des 35 analystes recensés par Reuters, 21 recommande­nt son achat et un seul de s’en départir.

Matthew McClinton, analyste de Barclays, se dit impression­né par la croissance des revenus depuis 2004 et estime que l’entreprise a le potentiel d’encore doubler ceux-ci d’ici cinq ans. Une « marque forte », une offre de « produits de qualité (premium) » et une « expérience de magasinage distinctiv­e » lui permettron­t selon lui d’atteindre ce degré de croissance.

L’objectif de la direction d’atteindre des revenus de 4 G$ (en route vers 3,2 G$ US pour cette année) paraît envisageab­le, même qu’ils pourraient atteindre les 6 G$ avant longtemps, estime Brian Tunick, de RBC Marchés des Capitaux. Les efforts de développem­ent de la marque sur les marchés internatio­naux pourraient jouer. Ces marchés représenta­ient 6,6% des revenus en 2015; Barclays s’attend à ce qu’ils atteignent déjà 25% en 2020.

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