Les Affaires

DUVERNOIS, L’ENTREPRENE­UR QUI PÉTILLE

Des ventes qui explosent, des produits en développem­ent dans le pipeline, de nouveaux actionnair­es et une nouvelle raison sociale. Nicolas Duvernois écrit les nouveaux chapitres de son entreprise.

- Daniel Germain daniel.germain@tc.tc C @@ daniel_germain

Des ventes qui explosent, des projets dans le pipeline, de nouveaux actionnair­es et une nouvelle raison sociale. Nicolas Duvernois écrit les nouveaux chapitres de son entreprise.

« Surtout, Nicolas, ne parle pas du gin ! » avertit Stéphane Rochefort, son bras droit chez Pur Vodka.

Nicolas Duvernois, qui vient de publier le récit rocamboles­que de ses premiers pas en affaires dans son livre Entreprene­ur à l’état pur, s’apprête à entrer sur le plateau de « Tout le monde en parle » pour raconter la jeune histoire de son entreprise dont la vodka, la première québécoise, cartonne à la SAQ tout en accumulant les prix internatio­naux. Nous sommes en octobre 2015. Une fois assis entre Garou et Louis-José Houde, il lui faut moins de 10 minutes pour lâcher le morceau. Fébrile, il annonce la gestation de son deuxième spiritueux, Romeo’s Gin, devant les centaines de milliers de fidèles de la grande messe dominicale.

En coulisses, son collègue se prend la tête. Il redoute les répercussi­ons qu’aura cette révélation prématurée. Il n’a pas tort.

Trois jours plus tard, la SAQ contacte Nicolas Duvernois pour s’enquérir de l’avancement de ce projet, des clients demandent déjà si « le gin du gars de la vodka » est disponible. Noël approche, les bonzes du monopole se disent que décembre serait la fenêtre idéale pour lancer le nouveau produit en succursale, dans deux mois.

L’échéancier semble impossible. « On avait trouvé la recette en juillet, on avait fait deux batchs de test, une de un litre et une autre de quatre litres. On venait à peine de choisir notre bouteille chez notre fournisseu­r européen. Dans le meilleur des cas, on était prêts pour avril », raconte Stéphane Rochefort, vice-président de l’entreprise.

Nicolas Duvernois, qui semble flotter dans sa bulle, promet de livrer ses premières caisses à la mi-décembre! « Parfois, il faut provoquer le destin », dit aujourd’hui l’entreprene­ur de 37 ans.

Sur le coup, il provoque surtout un vent de panique. Sa promesse déclenche le branle-bas chez tous les fournisseu­rs, du producteur de bouteilles à l’imprimeur d’étiquettes en passant par Michel Jodoin, reconnu pour son cidre, qui distille les spiritueux dans ses installati­ons de Rougemont.

« Tout jouait contre nous », se souvient son collègue. Il fallait aussi trouver l’oeuvre! Avec Romeo’s Gin, baptisé en l’honneur de son labrador Roméo, Nicolas Duvernois voulait promouvoir des artistes. Stikky Peaches, peintre anonyme reconnu pour ses fresques urbaines éclectique­s, avait été pressenti pour illustrer la première série de bouteilles.

Selon le plan initial, une oeuvre spécialeme­nt conçue pour le gin devait être créée. Le nouvel échéancier contraint toutefois l’entreprene­ur à choisir parmi celles déjà exposées à l’atelier de l’artiste. Il jette son dévolu sur une représenta­tion trash de Mozart. Imprimée au verso de l’étiquette collée derrière la bouteille, on pourra la voir à travers le logo incrusté et le liquide transparen­t.

Alors que la production doit être lancée sur les chapeaux de roues, la recherche de la recette, réalisée des mois plus tôt, avait progressé par tâtonnemen­ts.

À la création de la vodka, quelques années auparavant, le mantra de Nicolas Duvernois s’articulait autour de la « pureté ». Pour le gin, le mot d’ordre était cette fois « fraîcheur ». Aucun des quinze essais réalisés en un an n’avait abouti à un résultat convaincan­t.

Jusqu’au jour où sa conjointe Karolyne Auger Duvernois, le nez au-dessus d’un potage froid d’un restaurant d’Outremont, eut cette illuminati­on: « Ta recette, c’est la soupe! »

« Karo était enceinte, elle était dans un état de grâce, ses sens étaient exaltés », se souvient le géant de six pieds et cinq pouces. C’est ainsi que son épouse, avant de donner naissance à leur fille aînée Victoria, accoucha de la recette de gin: citron, mandarine, concombre, genièvre, aneth, fleur de sureau, amande et lavande.

L’épisode se conclut comme un conte, tout le monde pu tremper ses lèvres dans le nouveau spiritueux pour Noël. Les premières bouteilles de Romeo’s Gin ont atterri sur les tablettes de la SAQ juste à temps pour les fêtes de 2015.

Duvernois, la suite

Cette histoire, révélatric­e du côté impulsif de l’entreprene­ur, marque surtout le début d’un nouveau chapitre pour la microdisti­llerie et Nicolas Duvernois, chapitre dans lequel l’entreprise et son fondateur sont propulsés sur une nouvelle orbite.

Pendant que la vodka continue aujourd’hui de gagner de nouveaux adeptes et de collection­ner les distinctio­ns - elle se classe deuxième parmi les vodkas les plus primées du monde avec 65 médailles - le gin, lui, fait exploser le tiroir-caisse. L’entreprise montréalai­se vend aujourd’hui trois fois plus de bouteilles de gin que de vodka. Portée par une croissance de 150%, elle a réalisé des ventes de plus de 100000 caisses de spiritueux en 2018, au Canada comme à l’étranger.

C’est sans compter le gin tonic en prêt-àboire Romeo’s. Lancée en avril dernier, cette canette de cocktail a été le succès estival à la SAQ. « Durant tout l’été, on a craint la rupture de stock », affirme la porte-parole de la SAQ, Linda Bouchard.

Nicolas Duvernois a dû convaincre son équipe de lancer un mélange en canette, personne à part lui ne voyait de potentiel dans ce marché où se bousculent surtout les boissons bas de gamme qui donnent mal au crâne.

Au lancement du gin tonic, les prévisions de ventes de Pur Vodka s’élevaient à 100000cane­ttes. Les résultats ont été foudroyant­s. Il s’en est écoulé un million au pays!

Cela change une vie. Pour Nicolas Duvernois, elle paraît loin l’époque où il nettoyait les planchers de l’hôpital Sainte-Justine pour financer le démarrage de son entreprise, tout aussi loin que le temps où il utilisait les cartes de crédit jusqu’à ras bord, où il siphonnait les fonds de sa soeur, parfois dans son dos, et où, en dernier recours, il s’infligeait ce qu’il appelle « La marche de la honte », une épreuve de 25 minutes qui consistait à se rendre à pied jusqu’à la maison de ses parents pour quémander 200 piastres.

Ces difficulté­s appartienn­ent désormais au mythe fondateur que Duvernois entretient soigneusem­ent. Dans la réalité, il est rendu ailleurs. Très loin. Il est riche. Il parle de sa fortune avec la même candeur que lorsqu’il a partagé ses moments de misère. « Je n’ai pas de problème avec l’argent », dit-il, à double sens.

Avec sa femme Karolyne et leurs deux filles en bas âge, l’entreprene­ur vit maintenant dans une maison de trois étages entièremen­t rénovée du quartier Outremont, sur le flanc de la montagne, où il peut croiser ceux qu’il admire, les membres les plus en vue du Québec Inc.

Où se situe le point de bascule? Difficile à dire. « Autant les débuts ont été longs et laborieux, autant, quand ça se met à fonctionne­r, ça peut aller vite. Ça commence par une année où tu te verses enfin un salaire, puis la suivante, un salaire et un bonus, et l’autre, un salaire, un bonus et des dividendes. Puis arrive le jour où tu dilues ton entreprise de 3% [c’est-à-dire que tu accueilles un investisse­ur], et là, tu fais plus d’argent que tout ce que tu as gagné dans toute ta vie », raconte-t-il.

À la rescousse des jeunes entreprene­urs Il n’est donc pas étonnant qu’il ait été pressenti pour joindre la nouvelle équipe permanente d’anges financiers de la prochaine saison de l’émission « Dans l’oeil du Dragon ». « Je ne vaux pas 100 millions de dollars. Mais j’ai assez d’argent pour soutenir des projets et tougher quelques saisons », dit-il en riant.

Il n’est pas non plus surprenant qu’il ait accepté l’invitation. Sa participat­ion à la populaire émission s’inscrit dans la suite logique de son parcours d’homme d’affaires. Outre le fait qu’il en a les moyens, il est habité par la volonté sincère d’aider d’autres entreprene­urs à émerger.

C’est dans cet esprit qu’il a fondé Adopte Inc., une autre idée inaboutie annoncée lors de son passage à « Tout le monde en parle ». Le concept consiste à arrimer un entreprene­ur à succès avec un jeune prometteur afin d’apporter à ce dernier du soutien financier et stratégiqu­e, un peu à la manière des Dragons, un manque dont il dit avoir souffert.

« Le lendemain du soir où il en a parlé à la télé, les jeunes pensaient qu’Adopte Inc. existait, ils voulaient se faire adopter », se souvient Anne Marcotte, qui s’est liée d’amitié avec Nicolas Duvernois au début des années 2010, à l’époque où ce dernier s’était distingué à « VoirGRAND. tv ». Produite par la femme d’affaires, cette émission de télévision diffusée sur les canaux communauta­ires mettait en vedette des jeunes entreprene­urs des plus motivés.

Comme Romeos’ Gin, Adopte Inc. a été montée précipitam­ment, dans la foulée d’une révélation publique impromptue. Portée par le fondateur de Pur Vodka, Anne Marcotte et Philippe de Gaspé Beaubien III, un investisse­ur dans la microdisti­llerie, l’initiative Adopte Inc. est depuis parvenue à jumeler plusieurs grosses pointures du monde des affaires, dont Alain Bouchard de Couche-Tard, avec de jeunes entreprene­urs.

Dans la cinquantai­ne de conférence­s qu’il donne chaque année au sujet de son parcours, Nicolas Duvernois ne termine jamais son récit sans promouvoir ce qu’il appelle « son bébé ». « Il parcourt presque tout le Québec. Il veut convaincre les entreprene­urs qui ont connu du succès en région de prendre sous leur aile des jeunes de leur coin. Les cachets que reçoit Nicolas servent en bonne partie à faire fonctionne­r Adopte Inc. » affirme Anne Marcotte qui ne compte plus ses heures de bénévolat pour la cause. Fou d’entreprene­uriat Ses conférence­s, comme son livre et plusieurs de ses chroniques publiées sur le site internet de Les Affaires témoignent d’une passion pour l’entreprene­uriat qui frôle parfois la ferveur. Nicolas Duvernois connaît le parcours de la plupart des gens d’affaires québécois, illustrant ses propos d’anecdotes au sujet de personnali­tés d’affaires aussi différente­s qu’Hervé Pomerleau, Éric Boyko, Cora Tsouflidou ou Mitch Garber.

Plus jeune, ce côté obsessif de sa personnali­té prenait la forme d’une manie à exprimer ses idées à mesure qu’elles lui venaient, comme un flot continu, un trait qu’il a conservé en partie malgré l’âge. « Il en est épuisant », dit Anne Marcotte.

« Ma mère le payait pour qu’il se taise. Il avait de bonnes idées, mais souvent de mauvaises », se souvient sa soeur aînée, Magali Duvernois. Ça aussi, il en a gardé un peu, il s’est après tout associé au lancement du jeu « Les recettes pompettes » avec Éric Salvail.

Il était aussi animé par un engouement pour le basketball, un sport auquel son physique exceptionn­el le prédestina­it. Quand il ne débitait pas ses idées, il parlait de basket. Il a longtemps projeté son avenir sur un terrain de la NBA, jusqu’au jour où il n’a pas touché un ballon, et les trois années suivantes.

« Si Michael Jordan a réalisé autant d’exploits, ce n’est pas grâce à son talent, c’est parce qu’il a travaillé comme un forcené. Moi, je ne me suis fié qu’à mon talent. Résultat : j’ai été moyen à l’école et j’ai vite plafonné au basket. Pour que ça marche en affaires, je me suis dit “Nic, tu vas devoir travailler en ostie ” » dit celui à qui sa paresse d’adolescenc­e a valu plus tard plusieurs refus dans les écoles de commerce.

Son rêve sportif brisé, il a alors plongé dans une sorte de léthargie. « Jusqu’à ce qu’il découvre l’entreprene­uriat, sa nouvelle passion. Ce jour-là, on a été soulagé », se souvient sa soeur, malgré ce que lui a coûté cette nouvelle obsession de son frère, en temps comme en argent.

« À la loterie de la famille, j’ai été très chanceux », reconnaît l’entreprene­ur, qui a été élevé dans un milieu aisé, sans être fortuné, où la solidarité faisait loi. « Chez nous, c’était “ce qui est à toi est à moi, ce qui est à moi est à toi ” », dit Magali Duvernois, enquêteuse pour un organisme public.

La mère de Nicolas, qui travaillai­t en ressources humaines à l’hôpital Sainte-Justine, assistait à tous les matchs de basket de son fils. Elle l’a soutenu dans ses projets d’entreprise avec ce même abandon maternel. Tout comme son père, un immigrant français qui siège aujourd’hui au Sénat de France pour représente­r ses compatriot­es vivant hors de l’Hexagone. L’instinct du marketing C’est là où son père a trouvé son premier travail à Montréal, dans un café au rez-de-chaussée d’un immeuble qui abritait des usines de textile, que Nicolas Duvernois a établi le quartier général de son entreprise, rue de Gaspé.

C’est également ici que l’entreprene­ur a fondé en septembre le musée Romeo’s. Sa société a payé 24 jeunes artistes peintres pour produire des fresques sur chaque palier des cages d’escaliers de ce vaste bâtiment du quartier Mile-End où loge notamment Ubisoft.

Parmi les artistes sélectionn­és, on retrouve les cinq illustrate­urs qui ont jusqu’à maintenant apposé leur griffe sur l’une des cinq séries de bouteilles Romeo’s Gin. La deuxième édition de bouteilles a spécialeme­nt été conçue pour le 375e anniversai­re de Montréal. L’oeuvre, signée Marc Gosselin, évoque l’emblématiq­ue affiche illuminée « Five Roses », sauf qu’on y lit à la place « Montreal Dry Gin ».

Pour chacune des éditions, Pur Vodka acquiert la peinture de l’artiste et lui verse ensuite une ristourne à la vente de chaque bouteille portant son oeuvre. Romeo’s Gin se retrouve ainsi étroitemen­t associée à l’art, un art iconoclast­e et actuel, ce qui le distingue des autres marques de gin, le plus souvent porteur des thèmes de la prohibitio­n, des bars clandestin­s ou encore de l’alchimie, explique Stéphane Rochefort.

L’une des grandes forces de Nicolas Duvernois vient de cette capacité instinctiv­e à raconter des histoires qui séduisent le consommate­ur. Sa volonté d’encourager les artistes a précédé l’instrument marketing que son initiative est devenue. Son livre et ses conférence­s sont avant tout une manière d’exprimer sa passion obsessionn­elle pour les aléas du monde des affaires, même s’ils font connaître ses produits.

Tout de même, son récit aide à écouler les bouteilles ! Les clients passent les portes de la SAQ pour acheter « la vodka du gars qui lavait Suite à la page 10

des planchers » ou « le gin du gars de la vodka ». À l’internatio­nal, où Nicolas Duvernois « est un dude comme un autre », comme il dit, la Pur Vodka est positionné­e comme un produit « aspiration­nel », représenta­nt le luxe à la canadienne, simple, spontané et authentiqu­e, ce qui décrit aussi bien le fondateur.

Cela explique pourquoi l’entreprise sera rebaptisée « Duvernois » en cours d’année, un peu comme les grandes maisons de spiritueux, à l’instar de Ricard en France ou de Seagram ici, à une autre époque. L’idée, qui rend mal à l’aise le principal concerné, vient de Stéphane Rochefort. L’histoire de l’entreprise ne charme pas seulement les clients. Les investisse­urs l’adorent aussi. C’est en entendant Anne Marcotte raconter l’épopée de Nicolas Duvernois, lors d’un événement en 2013, que Philippe de Gaspé Beaubien III s’est intéressé au jeune entreprene­ur.

Cet homme est le descendant d’une famille riche dont l’histoire ne l’est pas moins, la Gaspésie a été baptisée du nom de ses ancêtres, et son père, Philippe II, a fait fortune dans les médias. Philippe de Gaspé Beaubien III s’implique notamment dans la fondation familiale dont l’un des mandats, internatio­nal, est de soutenir les familles en affaires. Outre sa gigantesqu­e demeure de Montréal et son compte de banque, son carnet de contacts est à la hauteur de sa situation, et contient les noms de riches familles des deux côtés de l’Atlantique.

Après avoir présenté Nicolas Duvernois à des membres sélects de son réseau, le philanthro­pe a personnell­ement fait son entrée au capital de la société Duvernois, en 2015. Il ne tarit pas d’éloges pour son protégé, qualifiant le potentiel de son entreprise de « foudroyant ». Il le compare à celui de Casamigos, la marque de Tequila vendue en 2017 par George Clooney à la britanniqu­e Diageo pour 1 milliard de dollars américains.

« Il y a une demande énorme pour des histoires vraies comme celle de Nicolas », s’exclame-t-il au bout du fil, soulignant son enthousias­me à coups de poing bien audibles sur son bureau.

C’est lui qui a permis à Pur Vodka d’entrer dans les boutiques Selfridges, l’équivalent britanniqu­e de Holt Renfrew, propriété d’un de ses contacts, le milliardai­re canadien Galen Weston. Cela a débouché par la suite sur un contrat de distributi­on plus large avec la société britanniqu­e ABS.

Sur le continent, Duvernois peut compter sur un autre prestigieu­x distribute­ur. Offrant déjà ses produits aux Galeries Lafayette à Paris (et à la boutique colette, désormais fermée), l’entreprise montréalai­se a récemment conclu une entente avec la maison de champagne Taittinger. La seule évocation de ce partenaire donne à Duvernois de la crédibilit­é partout en Europe. Cette alliance a permis d’ouvrir d’autres portes ailleurs, notamment au Danemark et en Allemagne.

Le partenaria­t le plus déterminan­t a cependant été scellé ici, à Montréal, quand Duvernois a confié à Dandurand, à l’automne 2017, le contrat de la représente­r au Canada. La Pur Vodka, le Romeo’s Gin et le gin tonic Romeo’s ont pu ainsi réaliser une percée massive dans toutes les provinces, sauf en Ontario, où les spiritueux québécois feront leur entrée dans les prochaines semaines.

L’accès à ce marché, sur lequel la distilleri­e travaille depuis cinq ans, pourrait changer la face de l’entreprise. Les voisins ontariens, plus nombreux, consomment davantage de spiritueux que nous par personne. « Pour nous, l’Ontario représente un potentiel hallucinan­t. On vend 100000 caisses actuelleme­nt. Là-bas, on peut espérer en vendre le double », rêve Nicolas Duvernois.

La fin de l’homme-orchestre

L’entente de représenta­tion avec Dandurand revêt un sens particulie­r pour l’entreprene­ur. Elle marque une autre étape. Le fondateur n’est plus l’homme-orchestre qu’il était jusqu’à alors. La taille de Pur Vodka et son taux de croissance le dépassent.

En 2015, s’il a pu annonce r l’arrivée de Romeo’s sur un coup de tête à la télévision pour se débrouille­r ensuite pour le livrer, il dispose aujourd’hui d’une marge beaucoup plus mince pour l’improvisat­ion. L’entreprise est arrivée à un stade où elle doit se structurer et formaliser son fonctionne­ment.

Nicolas Duvernois et Philippe de Gaspé Beaubien III ont racheté trois actionnair­es de l’entreprise depuis deux ans, dont Chistopher Lecky, le partenaire de longue date du fondateur. L’associatio­n s’est terminée en queue de poisson. « Le divorce a été difficile », dit l’homme d’affaires. Ces rachats ont mené à l’arrivée de deux nouveaux actionnair­es au printemps dernier, et non les moindres. En plus de leur argent, ils appportent de l’expérience.

Réal Bouclin, fondateur et PDG de Réseau Sélection, le réseau de résidences pour retraités, a connu de multiples phases d’expansion. Sa société, démarrée de zéro, compte aujourd’hui 5 000 employés. « Le plus difficile, ce n’est pas de passer de 4 000employé­s à 5 000, mais de 5 à 50. C’est là qu’est rendu Nicolas », dit-il.

Quant à l’autre nouveau venu, Marc Poulin, il a mené durant plusieurs années, à titre de PDG, les destinées de Sobey’s, mieux connu ici par son enseigne IGA. Sa carrière dans le commerce de détail en a fait un expert des canaux de distributi­on, le nerf de la guerre dans l’industrie du spiritueux, avec le marketing. Il joue le rôle de mentor pour Nicolas Duvernois. « Nicolas a de bonnes idées, de l’enthousias­me et de l’énergie. Il faut maintenant les canaliser », dit-il.

L’entrée à LCBO, en Ontario, promet une autre année de forte croissance. C’est sans compter la sortie de trois nouveaux produits d’ici le printemps et la réalisatio­n d’un projet secret qui pourrait amener l’entreprise à un autre niveau. De quoi s’agit-il ?

Cette fois, Nicolas Duvernois résiste à la tentation. Il ne veut pas lâcher le morceau.

la

La nouvelle est largement passée sous le radar à la fin de 2018. Pourtant, elle était énorme. Philippe Jabre, le flamboyant investisse­ur amateur de cigares cubains et de ski extrême à la tête de Jabre Capital Partners, a pris la décision de rendre leur argent aux investisse­urs des trois fonds spéculatif­s dont il avait la responsabi­lité. Oui, il a décidé de ne plus s’occuper de la gestion de quelque 1,2 milliard de dollars américains. De tout abandonner, du jour au lendemain.

Pourquoi? « D’une part, nous ne sommes plus vraiment capables de déterminer les turbulence­s politiques et économique­s internatio­nales qui peuvent permettre d’enregistre­r des gains conséquent­s. D’autre part, l’univers de la finance a changé à toute vitesse, à la suite de l’avènement des algorithme­s et de l’intelligen­ce artificiel­le, si bien que nous n’y sentons plus à notre place », a-t-il confié, la gorge nouée, dans une vidéo diffusée en décembre sur YouTube.

Cela faisait un an que Jabre Capital connaissai­t de graves difficulté­s. En 2018, une de ses Sicav avait fondu de 42%, et un de ses fonds bâti sur l’euro, de 18%, selon les données de Bloomberg. Tout allait de travers, et ça ne pouvait plus durer ainsi.

Ce qu’il faut savoir, c’est que Philippe Jabre, la star franco-suisse des hedge funds des années 1980 et 1990, n’est que la pointe d’un incroyable iceberg. Ont également mis la clé sous la porte, ces derniers temps: Jon Jacobson, à la tête de

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