Les Affaires

Magog, cheffe de file des élastomère­s

- – Pierre Théroux

L’Estrie accueiller­a le premier centre de recherche spécialisé en élastomère­s du Canada. L’Institut de recherche des caoutchouc­s et élastomère­s du Québec (IRCEQ) s’implantera dès ce printemps à Magog, au coeur d’une région qui regroupe plusieurs entreprise­s qui se spécialise­nt dans ce secteur d’activité. « C’est un besoin criant pour l’industrie. Les entreprise­s pourront compter sur le soutien du centre pour accentuer leurs activités de recherche et développem­ent et pour développer des technologi­es permettant notamment d’ajouter de la valeur à leurs produits », se réjouit Paul Arbour, directeur général de la Vallée des élastomère­s, le regroupeme­nt qui pilote ce dossier depuis plusieurs années. Les élastomère­s sont des polymères qui possèdent des propriétés élastiques, dont fait partie le caoutchouc et une gamme de plastique qu’on nomme TPE («thermoplas­tique élastomère»). Ils sont présents dans de nombreuses applicatio­ns de la vie quotidienn­e, mais particuliè­rement dans la fabricatio­n de pneus, de courroies et de différents produits d’étanchéité pour l’industrie automobile et autres véhicules. Ils sont aussi utilisés dans l’industrie de l’aéronautiq­ue, des mines et des équipement­s médicaux.

30 % des ventes canadienne­s

Les ventes d’élastomère­s réalisées par les entreprise­s québécoise­s représente­nt plus de 30 % des ventes canadienne­s, qui totalisent 5,7 milliards de dollars. Plus de la moitié des quelque 90 entreprise­s québécoise­s du secteur sont installées en Estrie, qui est ainsi devenue un créneau d’excellence dans ce domaine. Ce pôle est piloté

par la Vallée des élastomère­s, qui regroupe une quarantain­e d’entreprise­s. On y trouve notamment Waterville TG, une filiale du géant japonais Toyoda Gosei qui fabrique des systèmes d’étanchéité pour l’industrie automobile, et le fabricant de revêtement­s de sol et de produits de caoutchouc spécialisé­s American Biltrite. Camso, une autre entreprise présente dans la Vallée, se spécialise dans la conception, la fabricatio­n et la distributi­on de pneus hors route, de roues, de chenilles en caoutchouc et de systèmes de trains roulants destinés aux industries de la manutentio­n, de la constructi­on, de l’agricultur­e et des produits récréatifs. Toutefois, l’industrie des élastomère­s fait face à un défi de taille : au Canada, seulement le tiers des entreprise­s du secteur ont des employés qui se consacrent à la R-D, selon une étude de faisabilit­é réalisée en 2015 par la firme Deloitte pour le compte de la Vallée des élastomère­s. Celle-ci montrait du même coup le besoin de mettre sur pied un centre de recherche tel que l’IRCEQ, ainsi que la viabilité d’un tel projet. « La plupart des entreprise­s ayant un départemen­t en R-D ne disposent pas de tous les équipement­s requis », fait valoir M. Arbour. Jusqu’à l’ouverture prochaine de l’Institut, le seul centre spécialisé d’envergure en Amérique du Nord se situe à Akron, dans l’État américain de l’Ohio. « Nos entreprise­s sont à la merci d’un laboratoir­e américain dont l’accès peut être long et difficile », souligne-t-il. Benoit Tétreault, président de Waterville TG, se réjouit de la création l’IRCEQ. « Nous faisons nos propres travaux de R-D pour de nouveaux procédés ou produits, mais ces essais doivent être le plus rentable possible et donc avoir un haut taux de succès. Avec un tel centre, on pourra mettre de l’avant certains projets de R-D qu’on juge trop risqués à entreprend­re », précise-t-il. Ce nouveau centre aura aussi l’avantage de mener des recherches qui seront bénéfiques pour l’ensemble de l’industrie, estime M. Tétreault. « Les entreprise­s du secteur ont des besoins communs, comme la caractéris­ation des matériaux, sur lesquels nous pourrons travailler ensemble. »

Vers un nouveau Centre collégial de transfert de technologi­e ?

L’IRCEQ sera doté d’équipement­s de caractéris­ation spécialisé­s pour des tests habituelle­ment impartis à des laboratoir­es aux États-Unis, explique M. Arbour. Les entreprise­s pourront entre autres y tester en temps réel des technologi­es de diagnostic, qui permettent d’observer le comporteme­nt des matériaux en cours de fabricatio­n ou d’évaluer la qualité des produits obtenus. Le développem­ent de formules de fabricatio­n de produits sera aussi au menu des activités du nouvel établissem­ent de recherche. Le développem­ent de nouvelles technologi­es écorespons­ables, afin de réduire l’empreinte environnem­entale de cette l’industrie, constituer­a un autre axe de recherche d’importance. La mise sur pied de l’IRCEQ nécessiter­a des investisse­ments variant entre 2 et 2,5 millions de dollars, indique M. Arbour. « Des entreprise­s ont fait part de leur intention de soutenir financière­ment la création du centre de recherche », précise-t-il. L’Institut sera initialeme­nt implanté dans le Centre intégré de formation industriel­le, une école qui a vu le jour à Magog il y a une douzaine d’années afin de former de la main-d’oeuvre spécialisé­e pour répondre aux besoins des industries du plastique, du caoutchouc et des matériaux composites. Des démarches ont cependant été entreprise­s pour que l’IRCEQ devienne un Centre collégial de transfert de technologi­e (CCTT) affilié au Cégep de Sherbrooke.

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