Les Affaires

Année d’enrichisse­ment et d’iniquité pour les familles

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Pour les familles à revenus élevés, l’avantage financier d’avoir accès à une garderie subvention­née devient beaucoup plus grand avec le tarif unique.

Alors que le panier d’épicerie fera peut-être l’objet d’une augmentati­on légèrement plus importante qu’à l’habitude, l’année 2020 sera tout de même marquée par un enrichisse­ment général des familles. Dans le cas des services de garde, ces gains créent une grande iniquité entre celles qui parviennen­t à obtenir une place en garderie subvention­née et celles qui doivent se rabattre sur une autre option. Avant de parler de cette injustice, commençons par les fleurs. On a annoncé un gel des tarifs d’hydro-électricit­é à compter du 1er avril. Si on parle de fleurs, il s’agit ici davantage de pissenlits que de roses ou de chrysanthè­mes. La différence représente environ un dollar par semaine pour un bungalow de taille moyenne. Pour continuer avec les petites fleurs, la cotisation au Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) diminuera pour une deuxième année consécutiv­e. Une baisse maximale de 25 $ pour un salarié. Pour terminer avec les fleurettes, le montant personnel de base au fédéral sera augmenté graduellem­ent. Ainsi, en 2020, ce sera une économie de 116,61 $ pour les personnes dont le revenu n’excède pas l’avantderni­er palier d’imposition de 150 473 $. Cette économie disparaîtr­a graduellem­ent jusqu’à un revenu de 214 368 $, point où elle sera nulle.

De bien plus belles fleurs pour les familles

Là où on commence à parler d’enrichisse­ment digne de ce nom, c’est dans les mesures touchant les familles avec enfants. En effet, à compter de janvier cette année, le montant annuel maximal pour l’Allocation famille du Québec à 2 515$ augmente de 750 $ par enfant, pour un deuxième et un troisième enfant. À partir du quatrième, l’augmentati­on est de 631 $. Même pour les familles à revenu élevé, le montant minimal par enfant passe à 1 000 $ en 2020, soit une augmentati­on de 294 $ pour le premier enfant et de 348 $ pour les suivants. Le plus grand impact proviendra toutefois de l’abolition de la contributi­on additionne­lle des garderies subvention­nées. Même si cette mesure est rétroactiv­e à l’année fiscale 2019, ses effets se feront sentir réellement pour la première fois ce printemps, lorsque les contribuab­les rempliront leur déclaratio­n de revenus 2019. Comme le tarif quotidien maximal aurait été de 22,15 $ par jour en 2019, la réduction à 8,25 $ par jour génère une économie annuelle de plus de 3 600 $ pour le premier enfant et la moitié de ce montant pour le deuxième.

Inéquitabl­e

Mais c’est également ici que le pot arrive. Avec un tarif maximal de 22$ par jour, le gouverneme­nt faisait le choix politique de faire payer davantage les familles à revenus plus élevés. On comprend que la portion payée par l’État était tout de même beaucoup plus élevée que celle payée par les parents. Lorsque les parents paient directemen­t une garderie non subvention­née, il existe un crédit d’impôt au Québec et une déduction au fédéral qui amenuise les impacts. Avec des frais de l’ordre de 35 $ par jour, le coût net pouvait être sensibleme­nt le même dans plusieurs situations, qu’on fasse garder ses enfants dans une garderie subvention­née ou non. À l’aide du calculateu­r de revenu disponible du ministère des Finances du Québec, j’ai comparé une situation où deux familles ont chacune deux jeunes enfants en garderie, mais l’une d’elles a la chance d’avoir des services subvention­nés. Le revenu de la famille est généré à parts égales par chacun des conjoints. Alors que l’avantage de la garde subvention­née n’était que de 54 $ en 2018 par rapport à une garderie à 35 $ par jour, il est de 781 $ en 2020 pour un revenu familial de 100 000 $. Pour un revenu familial élevé (300 000 $), l’avantage passe de 2 402 $ en 2018 à 6 595 $ en 2020 en faveur des garderies subvention­nées. On a fait le choix politique que tout le monde paie le même prix pour des services subvention­nés. Ce choix ne doit cependant pas créer d’iniquité entre des familles à revenu égal selon qu’elles ont accès aux garderies subvention­nées ou non. L’année 2020 marque le moment où une injustice criante se matérialis­era sur la déclaratio­n de revenus de 2019. Le gouverneme­nt n’aura pas le choix de réagir à mon avis.

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