Les Affaires

Faites un audit, pardi

- Simon Lord

Julien Lassonde associé chez PwC Canada et leader R-D et incitatifs pour le Québec «Les gens qui gèrent le programme vont regarder les bénéfices, les coûts et les risques d’un projet, mais ils vont aussi se dire “Si je fournis la subvention, est-ce que je pense que ça va répondre à un vrai besoin ?” »

Avant de commencer sa transforma­tion numérique, et avant même de faire un plan, il serait peut-être avantageux de faire un diagnostic de son degré de maturité numérique : pourquoi le faire, comment se lancer, qui offre du soutien ? Faire un audit est utile parce qu’il permet de mieux prendre conscience de sa situation et de savoir où l’on en est quant à sa maturité, explique Julien Lassonde, associé chez PwC Canada et leader R-D et incitatifs pour le Québec. Même si l’on sait déjà pertinemme­nt que nous avons besoin de nous mettre à jour, et même si nous savons ce que devons faire pour y arriver, il pourrait quand même être avantageux de faire un audit, ne serait-ce que pour être admissible aux programmes d’aide. « Plusieurs programmes d’investisse­ment qui soutiennen­t la transforma­tion vont nécessiter une forme d’audit, d’analyse préliminai­re du besoin », dit-il. Bien que cela puisse, dans certains cas, se faire à l’interne, et même être non obligatoir­e, il est quand même avantageux d’entreprend­re une démarche plus formelle avec des experts externes. « Les gens qui gèrent le programme vont regarder les bénéfices, les coûts et les risques d’un projet, mais ils vont aussi se dire “Si je fournis la subvention, est-ce que je pense que ça va répondre à un vrai besoin ?” » Faire un audit, et un audit plus sérieux de surcroît, augmente donc notre degré de crédibilit­é, et met toutes les chances de notre côté.

Le plus connu: Audit industrie 4.0

Quelques programmes différents peuvent aider les entreprise­s à faire leur audit. Un des mieux connus est le programme Audit industrie 4.0. Selon les renseignem­ents fournis à Les Affaires par le ministère de l’Économie et de l’Innovation, le programme comporte deux volets depuis janvier 2020. Si le nom du programme laisse entendre que celui-ci n’est accessible qu’aux entreprise­s des secteurs manufactur­iers, ce sont en réalité les entreprise­s de tous les secteurs d’activité qui y sont admissible­s, y compris les coopérativ­es et les entreprise­s d’économie sociale. Le premier volet vise la réalisatio­n d’un diagnostic et d’un plan numérique, et peut faire l’objet d’une aide financière sous la forme d’une contributi­on non remboursab­le représenta­nt jusqu’à 80 % des dépenses admissible­s du projet, pour un maximum de 20 000 $. Il vise à valider ses orientatio­ns stratégiqu­es et opérationn­elles, à définir et à décrire ses processus d’affaires pour les arrimer avec ces orientatio­ns, ainsi qu’à analyser et à évaluer son indice de maturité numérique globale. Un rapport contenant un plan numérique est ensuite produit en fonction de ces informatio­ns. Le second volet concerne le plan de la mise en oeuvre ainsi que la sélection des solutions et la planificat­ion de la gestion de changement liée aux projets numériques priorisés. Il permet de déterminer les projets prioritair­es selon ses capacités et de planifier la gestion du changement du point de vue autant opérationn­el qu’humain. Ce volet peut aussi faire l’objet d’une aide financière. Celle-ci prend la forme d’une contributi­on non remboursab­le représenta­nt jusqu’à 50 % des dépenses admissible­s du projet, jusqu’à un maximum de 10 000 $. Pour les entreprise­s qui ne sont pas encore prêtes à entamer un tel processus, il existe aussi l’Autodiagno­stic ADN 4.0. Il s’agit d’un questionna­ire en ligne, accessible par clicSÉQUR, qui permet aux entreprise­s d’obtenir un premier indice de leur maturité numérique.

Se tourner vers les consultant­s

Qui d’autre peut nous aider à faire un audit ? Plusieurs entreprise­s offrent des services de diagnostic. Il faut simplement s’assurer de faire un choix qui tient compte de nos besoins autant que de nos moyens financiers, explique Alexandre Moïse, professeur à l’école de gestion de l’Université de Sherbrooke et responsabl­e de la concentrat­ion en gestion des technologi­es d’affaires du programme de BAA. « Il existe une panoplie de consultant­s, dit-il. Quand je travaillai­s chez Alithya et PwC, par exemple, nous faisions des diagnostic­s pour des clients dans des secteurs aussi variés que les services financiers, la santé et l’administra­tion municipale. » Il est toutefois important de réaliser que chaque consultant favorise une démarche particuliè­re, que certaines auront une démarche plus complète, et d’autres, plus restreinte. « Les Big Four (Deloitte, EY, KPMG et PwC), par ailleurs, de même que les grandes entreprise­s spécialisé­es en technologi­es, auront une plus grande crédibilit­é, mais coûteront plus cher, dit Alexandre Moïse. Si vos moyens sont plus limités, une petite firme peut parfois faire un tout aussi bon travail. » Au final, quel que soit le choix de la stratégie d’audit, le plus important est peut-être de ne pas sauter cette étape. Car si nous ne soulevons pas le bon problème, nous aurons bien de la difficulté à élaborer une solution adéquate, conclut le professeur. « On risquerait alors de se retrouver avec une Porsche pour faire l’épicerie. »

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