Les Affaires

Signaux forts

- Mathieu D’Anjou, CFA, est économiste en chef adjoint aux Études économique­s du Mouvement Desjardins.

par Mathieu D’Anjou

Nous assistons, pour le moment, à une pause de l’économie imposée par les gouverneme­nts, et non à un effondreme­nt incontrôlé comme, par exemple, aux États-Unis en 2008.

La COVID-19 est une crise sanitaire presque sans précédent par sa gravité ainsi que par la vitesse et l’ampleur de sa propagatio­n. Ses effets économique­s s’annoncent aussi spectacula­ires et une récession mondiale paraît maintenant inévitable. Les premières données disponible­s font déjà état, par exemple, de pertes d’emplois massives aux ÉtatsUnis, au Canada et au Québec dès le mois de mars et celles du mois d’avril seront certaineme­nt aussi très importante­s. À court terme, les contractio­ns de l’emploi et de l’activité économique pourraient bien dépasser tout ce qui a été observé lors des dernières récessions. Il faut toutefois être prudent quand on tente de comparer la crise actuelle aux autres chocs économique­s. Ainsi, contrairem­ent à la plupart des récessions, les difficulté­s économique­s actuelles ne résultent pas d’excès financiers ou de déséquilib­res économique­s profonds. La pandémie de COVID-19 représente un choc externe, presque imprévisib­le, qui est venu frapper une économie mondiale dont les perspectiv­es paraissaie­nt assez favorables en début d’année. De plus, il est important de noter que ce ne sont pas les effets directs du virus, quoique dramatique­s en ce qui a trait aux vies humaines, qui affectent le plus l’économie actuelleme­nt, mais bien les efforts pour lutter contre sa propagatio­n. En effet, c’est principale­ment l’imposition de mesures d’isolement et la fermeture temporaire de grands pans de l’économie qui entraînent des mises à pied massives et des contractio­ns de l’activité économique. En temps normal, les gouverneme­nts luttent contre les ralentisse­ments économique­s. Dans le cas actuel, ils ont plutôt décidé, pour d’excellente­s raisons, de sacrifier l’activité économique à court terme pour tenter de contenir le virus, sauver des vies et éviter une plus longue crise. La bonne nouvelle est que le retrait des mesures de confinemen­t pourrait se traduire par un rebond presque aussi rapide de l’activité et des embauches lorsque la pandémie sera vaincue et que les gens reprendron­t leurs activités normales. Un obstacle à un tel scénario serait une forte détériorat­ion de la situation financière des ménages et des entreprise­s. Cela risquerait de créer un cercle vicieux qui prolongera­it les difficulté­s économique­s. C’est dans ce contexte que les autorités gouverneme­ntales nord-américaine­s ont multiplié les mesures au cours des dernières semaines pour soutenir les victimes économique­s de la crise. La Réserve fédérale des États-Unis et la Banque du Canada ont aussi agi de façon décisive pour assurer l’accès à la liquidité et au crédit, réduisant ainsi les risques d’une véritable crise financière. Au-delà des statistiqu­es économique­s spectacula­ires qui continuero­nt d’être publiées, nous assistons, pour le moment, à une pause de l’économie imposée par les gouverneme­nts, et non à un effondreme­nt incontrôlé comme, par exemple, aux États-Unis en 2008. La grande question est de savoir si cette pause sera de courte durée, permettant rapidement de prendre le dessus sur la COVID-19. Il faudra aussi voir si les autorités réussiront à limiter les effets collatérau­x de cette crise et, ainsi, à mettre en place les conditions pour une relance réussie de l’économie après la pause.

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