Il est minuit moins un degré
Ce n’est quasiment rien, au thermomètre planétaire. Mais quelques petits degrés en plus, et notre civilisation cessera d’être viable. Il a fallu la science pour nous ouvrir les yeux. Il nous faut maintenant sortir du pétrin.
Même si on le voit se lever à l’est et se coucher à l’ouest, plus personne ne pense que le Soleil tourne autour de la Terre. C’est ce que la science a un jour démontré, même si cela allait à l’encontre de notre perception. Il en était de même avec la météo et le climat. On a des hivers froids et des étés chauds. Tout est normal? Non! On sait depuis peu que l’équilibre climatique est au fond bien précaire. On peut ne pas y croire, comme jadis on réfutait Galilée, mais les preuves du réchauffement climatique sont incontestables. Un bel acquis de la science. Mais un gigantesque défi humain.
Récapitulons très simplement: en 100 ans, la composition chimique de l’atmosphère a changé. On y mesure aujourd’hui 400 parties par million (ppm) de dioxyde de carbone, alors que ça n’a jamais dépassé 300 millions de ppm depuis un million d’années. C’est une conséquence de notre industrialisation dopée par le pétrole, le charbon et le gaz. Et ça continue, puisque nous émettons encore chaque année près de 50 gigatonnes de CO2. C’est ce qui accentue l’effet de serre et fait augmenter la température moyenne de la planète. Oh! pas de beaucoup! Pour le moment, juste d’un peu moins de 1 °C. Si peu? Mais ce n’est pas fini. Et là est le problème. Au rythme où nous crachons du carbone dans l’air, nous sommes à la veille de dépasser 2 °C d’augmentation, voire 3 °C. C’est une poussée de fièvre comme la planète n’en a jamais eue. Jamais!
Il est sensible, le climat. La température moyenne de la Terre est de 15 ºC. Pour quelques degrés de moins (c’est déjà arrivé), le Bouclier canadien s’est couvert d’une couche de glace épaisse de 3 km. Pour quelques degrés de plus – la tendance actuelle –, nous nous retrouverions avec une montée des océans de 6 m à 8 m. Bref, des villes entières englouties; une production agricole en chute. On ne pourrait pas vraiment s’adapter à ça. En faisant leurs calculs, mesures et analyses, les climatologues ont fixé la limite critique au-delà de laquelle la mécanique s’emballerait. Il nous reste une marge d’un seul petit degré! Au rythme où nous polluons, les chercheurs estiment que cela arrivera en 2030. Dans 15 ans. La bataille climatique du XXIe siècle entre dans une période fatidique. Il faut freiner nos ardeurs carbonifères. Et c’est toute la machine économique et notre production énergétique qui sont remises en cause.
Le rendez-vous de Paris, la Conférence mondiale sur le climat, revêt ainsi – ne nous le cachons pas sous prétexte d’éviter l’alarmisme –, un caractère dramatique. Chose certaine, ce n’est plus le moment de soulever de pseudodoutes pseudo scientifiques à ce propos – c’est tellement plus facile de discutailler que d’agir pour transformer notre système de production énergétique!
La science a su nous révéler avec certitude un phénomène qui ne nous était pas évident au quotidien. Aujourd’hui, cette prise de conscience sur le climat nous invite à changer à jamais notre rapport à la Terre. L’éducation devrait d’ailleurs consolider la place de ce savoir dans notre bagage collectif. Comme on a su le faire avec la découverte de Galilée, il y a 500 ans, quand il a démontré, contre toute apparence, que le Soleil ne tournait pas autour de la Terre. C’est ainsi que notre économie cessera de graviter autour du baril de pétrole.