Quand le « big data » gère les chantiers…
Ne sachant plus où donner de la tête, le MTQ a longtemps réparé les routes selon la stratégie bien nommée du « pire en premier ». Mais depuis 2006, il confie la priorisation des chantiers à un logiciel qui fait des choix plus rationnels. L’état du réseau est évalué par des camions dotés d’instruments laser qui balaient la surface de la chaussée. « Nous avons une énorme base de données où sont consignées des informations sur nos 30 000 km de routes, divisés en 18 000 segments », dit Yvon Villeneuve, directeur du Laboratoire des chaussées au MTQ. Des outils complexes d’aide à la décision permettent ensuite d’utiliser au mieux le budget. Désormais, on mise surtout sur des réparations moins chères (colmatage de fissures, planage fin), plus rentables à long terme. Cette stratégie est aussi celle que recommande Soliman Abu-Samra, à l’Université Concordia. En 2017, cet étudiant au doctorat a mis au point un logiciel pour aider les municipalités à prioriser leurs travaux routiers. Le programme repose sur des modèles mathématiques qui prennent en compte le trafic, les conditions météo et l’âge du réseau pour « dessiner » un plan d’intervention intelligent. « Réhabiliter des routes non entretenues coûte 6 à 10 fois plus cher que de faire de l’entretien préventif, rappelle M. Abu-Samra. Chaque municipalité emploie son propre système d’évaluation de l’état des chaussées et ce manque d’uniformité augmente le risque de faire des choix subjectifs. » À la Ville de Montréal, où 50 % des rues sont en mauvais état, on affirme être au courant de ces recherches, mais utiliser un logiciel différent, « probablement améliorable ». Mais chaque chose en son temps : la Ville espère rattraper son retard d’entretien d’ici cinq ans, et colmate en attendant autant de nids-depoule que possible. Elle exige depuis 2015 que les réparateurs équipent leurs camions de GPS, pour géolocaliser les trous et assurer le suivi des travaux. En janvier dernier, en 8 jours seulement, 15 573 nids-de-poule ont été réparés.