Cégépiens et apprentis chercheurs
Lorsqu’on pense à la recherche fondamentale, on a souvent en tête les études à la maîtrise et au doctorat. Mais si on commençait dès le cégep ?
Dans un coloré salon collaboratif du troisième étage au Collège Dawson, Hélène Nadeau, enseignante en physique et chercheuse, a donné rendez-vous à deux récents diplômés, Andreaa Angelescu et William Asselin. Maintenant en première année de baccalauréat, ils jouissent d’une longueur d’avance sur leurs camarades de classe à l’Université McGill: l’été dernier, pendant 10 semaines, ils ont fait un stage de recherche où ils ont goûté à la démarche scientifique et travaillé de près avec des chercheurs.
Pour offrir cette occasion aux étudiants, Hélène Nadeau a formé le Groupe de recherche en neuroscience à Dawson, en 2015, en partenariat avec des universitaires. Elle-même travaille étroitement avec Franco Lepore, chercheur en psychologie à l’Université de Montréal, pour explorer les différences de connectivité entre les cerveaux des personnes voyantes et non-voyantes.
Ouvert à tous les cégépiens, peu importe leur programme, le stage attire de vrais passionnés, puisqu’ils ne sont pas rémunérés. Loin d’être affectés à la cafetière et à la photocopieuse, les étudiants reçoivent un mandat en lien avec leur champ d’études et leurs intérêts. « Ils font de la vraie recherche et se familiarisent avec la réalité des scientifiques qui cherchent plus souvent qu’ils ne trouvent, affirme Mme Nadeau. C’est important de bien les encadrer pour qu’ils ne se découragent pas. »
Alors qu’elle venait à peine d’obtenir son diplôme d’études collégiales en sciences humaines, Andreaa Angelescu a eu la chance de travailler avec Sylvia Cox, chercheuse en psychologie à McGill. Celle-ci a intégré Andreaa à un projet de recherche longitudinal en toxicomanie. L’étudiante a ainsi épluché de nombreux questionnaires et tiré des conclusions quant aux traits de personnalité des participants. « J’ai appris à travailler avec de grosses bases de données et un logiciel d’analyse statistique », raconte celle qui est maintenant au baccalauréat en psychologie, à McGill. Pour Andreaa, le stage ne fut pas une histoire d’un été, car elle a été invitée à poursuivre sa collaboration au projet de recherche.
De son côté, William Asselin a créé une antenne capable de détecter la présence de carbone 13 en spectroscopie par résonance magnétique, dans le cadre d’un projet de recherche de Jamie Near, chercheur à l’Institut universitaire en santé mentale Douglas. « C’est gratifiant de réussir ce genre de travail lorsqu’on est au cégep, affirme celui qui étudie en génie chimique à l’Université McGill. Le stage m’a fait comprendre que la recherche est une activité multidisciplinaire et qu’il faut travailler ensemble pour progresser. »
Si cette expérience permet aux cégépiens de développer leurs compétences en recherche et leur maturité, elle pourrait aussi les mener à cosigner une publication dans une revue scientifique ! « Tout dépend bien sûr de la contribution de l’étudiant », précise Hélène Nadeau.
L’enseignante souhaiterait maintenant que ce stage optionnel puisse devenir un cours en bonne et due forme, afin que davantage d’élèves en bénéficient.
« Avant, pour faire un stage en recherche dès le cégep, un étudiant devait avoir de bons contacts, affirme Hélène Nadeau. Maintenant, tous les étudiants à Dawson peuvent vivre cette initiation. » Et, comme Andreaa et William, oser rêver à une carrière en recherche !