UN REFROIDISSEMENT SUBIT DE L’ATLANTIQUE NORD?
C’est ce que des modèles prédisent.
Le film catastrophe Le jour
d’après, sorti en 2004, avait pour élément déclencheur une modification drastique du climat dans l’hémisphère nord qui se retrouvait carrément recouvert de glaces ! C’était un peu fort de café, scénario hollywoodien oblige. Il reste que la possibilité d’un refroidissement du climat autour de l’Atlantique Nord est bien connue, même si les prévisions l’annoncent progressif et, a priori, pas pour le XXIe siècle.
Mais le revirement pourrait être plus abrupt que les scientifiques le croyaient. Des chercheurs français et britanniques ont réévalué le risque en ciblant un élément local bien précis. « Nous nous
sommes concentrés sur le phénomène de convection en mer du Labrador », explique Giovanni Sgubin, premier auteur de l’étude parue dans la revue savante Nature Communications.
Quel est ce phénomène? En hiver, les eaux de surface de la mer du Labrador se refroidissent et deviennent plus denses que celles des profondeurs; elles plongent donc vers le fond. La chaleur des eaux profondes remonte alors vers la surface et empêche la formation de banquises.
Mais la hausse des précipitations et la fonte des glaciers associées au réchauffement climatique diminueront la salinité des eaux de surface; cela a même déjà commencé. Cette dilution diminuera la densité en surface, ce qui ne permet- tra plus le mélange des eaux pendant la période hivernale. Cette nouvelle donne pourrait tout bonnement causer un arrêt du phénomène de convection, et sérieusement affecter les températures de la région Atlantique Nord. « On a créé un algorithme capable de sélectionner, parmi les 40 modèles climatiques pris en compte par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, ceux qui reproduisaient une stratification réaliste dans la mer du Labrador pour les conditions climatiques actuelles », précise le professeur à l’Université de Bordeaux. Onze modèles ont répondu aux exigences et, de ce florilège, 45% prévoient un arrêt de la fameuse convection.
Cette modification entraînerait un refroidissement de 2°C à 3 °C de la mer du Labrador qui, à son tour, rafraîchirait les régions côtières environnantes.
Pas de panique ! « On parle de 45%; c’est donc que plus de la moitié des modèles sélectionnés ne prédisent pas de refroidissement », nuance Daniel Bourgault, professeur en océanographie physique à l’Institut des sciences de la mer de Rimouski.
Il souligne que, même si ce refroidissement avait lieu rapidement, le climat planétaire, en moyenne, serait tout de même à la hausse. « La distribution géographique des changements de température peut être hétérogène, avec une majorité des régions qui se réchauffent et d’autres qui se refroidissent », précise le professeur.
Dans Le jour d’après, le président américain regrette de ne pas avoir voulu regarder en face la menace climatique que les scientifiques prévoyaient pourtant. Reste à voir si cette partie précise de l’histoire se transposera aussi dans la réalité.