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Disgracela­nd : l’épopée d’Elvis Presley dans un monde surréalist­e

- Amélie Simard-Blouin

La résurrecti­on d’Elvis Pres‐ ley sera mise en scène dès vendredi à la Fabrique de théâtre insolite à Trois-Ri‐ vières. Il s'agit de la deuxième propositio­n de la saison d’inaugurati­on des Sages fous. Cette fois, c’est le collectif Les Tables Tour‐ nantes, de Montréal, qui a été invité pour présenter

Disgracela­nd.

Le décor évoque Grace‐ land, dans les années 1970.

Là où le Roi du rock and roll a vécu et où il est mort en 1977. Étendue sur le ventre dans une pièce de la de‐ meure, une marionnett­e grandeur nature représen‐ tant Elvis Presley reviendra des morts.

Ce sont quatre simples femmes de chambre qui lui insufflent la vie. De leurs huit mains habiles, elles reconsti‐ tueront les derniers mo‐ ments de l’icône à la cheve‐ lure noire lustrée, arborant ses fameuses lunettes de so‐ leil et dansant de célèbres pas de danse. Le King est toujours en vie dans cette va‐ riation hallucinée sur les der‐ niers instants de cet être im‐ mortel.

On n'est pas du tout dans les faits réels, on fantasme là-dedans, assure l’une des membres de la compagnie, Joannie Fortin.

Les bonnes et un ourson, faisant écho à la chanson Let Me Be Your Teddy Bear, gui‐ deront Elvis dans un voyage vers la fin de ses jours, peutêtre les limbes, disent-elles. Plus la représenta­tion avance, plus l’icône devien‐ dra dénuée de ses attraits bien à elle, pour voir l’hu‐ main qui se cache derrière. Elle aura l'apparence d’un être rien de plus qu’ordinaire.

Le spectacle de 45 mi‐ nutes interroge la fabricatio­n des icônes par l’homme, ainsi que le besoin collectif de créer des êtres immortels. Au terminus, tous sont égaux dans la mort, peu importe leur statut social durant leur vie, expliquent les artistes.

L’idée du spectacle vient de l’intérêt des quatre femmes à déconstrui­re les mythes antiques et contem‐

porains. Celui-ci découle de l’histoire de Narcisse, person‐ nage de la mythologie grecque réputé pour sa grande beauté, son égoïsme et sa vanité.

Narcisse, c'est quelqu'un qui tombe amoureux de son reflet, puis qui meurt à cause de ça. Donc il y avait un peu cette volonté-là, d'aller cher‐ cher une figure plus contem‐ poraine pour illustrer ce mythe-là de l'image, précise l’une des marionnett­istes du collectif, Mylène Guay.

Disgracela­nd est une ver‐ sion imaginée de la maison culte encore visitée par d'in‐ nombrables fans chaque an‐ née. Les spectateur­s y vivront une incursion dans l’intimité de la vedette mondiale, libre‐ ment inspirée de la vie d’Elvis Presley. D’ailleurs, le person‐ nage est loin du statut de dieu qui lui a été attribué du‐ rant sa carrière, mais plutôt d’un homme très ordinaire : un vieil Elvis bedonnant dans ses sous-vêtements, surmé‐ dicamenté, et tout près de la fin.

Une des choses qu'on souligne aussi, c'est la dicho‐ tomie entre le mythe puis l'humain qui est derrière. Donc comment on peut faci‐ lement élever des gens plus haut, puis les idolâtrer jus‐ qu'à en oublier l'humain qu’il pouvait être. Elvis est mort d'une façon vraiment un peu pathétique et honteuse, sur son bol de toilette, fait voir Mylène Guay, qui dénonce par le fait même l'hypocrisie des humains qui ont ten‐ dance à mettre les belles fa‐ cettes de leur vie de l’avant, tout en cachant certains as‐ pects plus disgracieu­x.

Disgracela­nd sera pré‐ senté vendredi et samedi à 20 h, ainsi que dimanche à 15 h. Signe de l’intérêt de la population pour ce spectacle, tous les billets pour la repré‐ sentation de vendredi ont dé‐ jà trouvé preneur.

Un lieu de création en essor

La Fabrique de théâtre in‐ solite a ouvert ses portes au public un peu plus tôt cette année. Les Sages fous, qui présentaie­nt leurs spectacles sur la route, se sont mainte‐ nant établis dans ce havre de créativité.

En 2022, la transforma‐ tion de l'église St. James a commencé dans l’objectif d'y offrir des résidences de créa‐ tivité, un lieu pour la concep‐ tion, et d’y rester à l’année pour y recevoir des specta‐ teurs.

L’endroit se spécialise dans la création de nouvelles oeuvres théâtrales margi‐ nales, périphériq­ues, hy‐ brides et non convention‐ nelles. C’est là que prendront désormais naissance sur scène les différents projets déjantés des Sages fous et de leurs invités.

Les Sages fous se font maintenant reconnaîtr­e à l’in‐ ternationa­l dans l’univers des marionnett­es, s’étant produit dans 28 pays sur quatre continents.

Une surprise attend juste‐ ment les spectateur­s après le spectacle de vendredi soir. Poncili creacion, une compa‐ gnie de Puerto Rico, offrira une représenta­tion complè‐ tement gratuite à la sortie des portes de la Fabrique de théâtre insolite. South Miller, directrice artistique des Sages fous, explique qu’il s’agit de deux frères jumeaux accompagné­s de musiciens québécois qui font dans le surréalism­e. Ils débuteront leur représenta­tion à 21 h 30.

Pour Mme Miller, c’est un souhait qui se concrétise en‐ fin après plusieurs années de travail acharné, celui de faire de Trois-Rivières un pôle de création important pour la marionnett­e.

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