Summum

Mike Beaudoin fête Noël en solo

- PAR MIKE BEAUDOIN PHOTOGRAPH­E : SARAH DAGENAIS

MERCI MARKO, À TOI ET TA BELLEFAMIL­LE

C’est bientôt Noël. J’aurais pu éviter le sujet et trouver un autre thème, mais en même temps, si j’avais parlé d’halloween en décembre, tu m’aurais trouvé « weird » un peu.

Noël, c’est la seule période de l’année qui ne te laisse pas indifféren­t, t’es super heureux ou vraiment triste, mais t’es jamais neutre. À l’inverse, j’ai jamais vu quelqu’un dans le temps des pommes être en dépression, boire pis brailler parce que y’a pas eu le temps d’aller cueillir son sac lui-même, trois fois plus cher qu’à l’épicerie. Mais le temps des Fêtes, c’est spécial, surtout si tu le passes seul. T’as beau dire à tout le monde : « Ouin, moi j’suis quelqu’un de solitaire », quand le temps des Fêtes arrive pis que t’es seul, tu tripes pas.

J’ai vraiment été chanceux en général, y’a juste un Noël qui a été dur. Je venais de me séparer, j’habitais encore dans la même maison que mon ex parce qu’on n’était pas capable de la vendre pis j’avais pas d’argent pour me payer un appart en plus de l’hypothèque. Avec la garde convenue et les partys de la mère à ma fille, je n’avais pas la p’tite les 24, 25 et 26 décembre. Dans ma tête, j’me suis dit : « Juste trois jours, pas si pire. » Le mot qu’on cherche, c’est « naïveté ».

T’sais, quand t’es jeune pis que t’as le projet d’avoir ta maison avant 30 ans, mais que tu te retrouves tout seul dedans à Noël, j’peux-tu te dire que tu l’as dans le cul, ton rêve d’être propriétai­re? J’pense que c’est là que j’ai cassé. Le Mike confiant, solitaire et en contrôle était assis sur le divan à regarder des films pis à brailler. T’sais, la vie de rockstar! J’me souviens avoir reçu un texto de mon ami Marko qui me souhaitait un joyeux Noël et de passer du bon temps en famille. J’me souviens lui avoir souhaité la même chose et, en discutant, j’ai mentionné que je passais les trois prochains jours tout seul. Alors, le temps en famille… bof.

Dans nos échanges il m’a écrit : « Ben demain, tu viendras chez nous. On fête Noël avec la famille à ma blonde. » On n’était pas des amis si proches, il aurait pu juste me remonter le moral avec un gag, mais à la place, y’a pris le temps de m’inviter. Je ne sais pas si y’a juste voulu être poli, mais moi j’ai pris la porte qui était grande ouverte. Mon 24 décembre était chiant, mais maudit que j’avais hâte au 25.

Le lendemain, j’me suis présenté chez Marko et sa blonde pour le souper, un peu nerveux comme si j’allais à une « date ». En plus, je ne connaissai­s pas énormément sa blonde pis j’allais rencontrer toute sa famille. Si quelqu’un te propose ça comme rendez-vous, tu sacres ton camp.

Ç’a été une soirée mémorable. On a préparé de la bouffe, j’me suis sacré les mains sur les ronds du poêle pour faire rire tout le monde, j’ai mangé et bu comme un roi, c’était vraiment un bon moment. Son beau-père Jacques m’a fait sentir comme si j’étais son propre fils à me faire goûter ses recettes personnell­es de cocktails improvisés par ses récents voyages. Ça goûtait le cul, mais j’appréciais l’effort.

J’ai aussi rencontré la belle-soeur de Marko ce soir-là. Je ne sais pas si c’était la quantité d’alcool ingéré, le fait que j’me sentais à l’aise, ou parce que je n’avais pas baisé depuis un méchant bout, mais j’me suis dit que c’était un super bon timing pour essayer de coucher avec. Donc on a discuté, on s’est collés, on a bu encore, on s’est embrassés et, juste avant que minuit sonne, le beau-père de Marko a porté un « toast ». Chacun avec un verre de Champagne à la main, le bras en l’air, on l’a regardé et il a dit : « À un des plus beaux Noëls que j’ai eu la chance de vivre et merci à Mike d’être avec nous. »

J’étais heureux, souriant, un peu bandé parce que la belle-soeur se collait sur moi et j’ai pris une gorgée de Champagne. C’est là que j’ai su que j’allais « scrapper » le party. Y’a eu un bruit qui a sonné comme le tonnerre, mais c’était juste mon estomac qui se sentait mal. J’ai pas eu le temps de finir ma coupe, j’me suis rendu à la salle de bain et j’ai vomi tous les bons petits plats qu’on avait eu la gentilless­e de m’offrir ce soir-là.

Oui monsieur, moi, on m’invite, on me fait sentir comme si c’était ma propre famille pis en échange, je salis ta salle de bain en hurlant de douleur chaque fois que mon corps ressort violemment la tourtière pis les p’tites saucisses cocktail.

C’est probableme­nt là qu’ils auraient dû me sacrer dehors, mais ils sont tellement gentils qu’ils se sont occupés de moi.

Je n’ai aucun souvenir du reste de la soirée, sauf le moment où tout le monde était couché. Les beauxparen­ts étaient dans le salon sur un divan-lit et moi j’étais à côté d’eux, sur un divan régulier… avec la bellesoeur. Oui monsieur. Dormir sur un divan tout seul, c’est pas super confo; imagine à deux.

C’est là que mon cerveau a eu envie d’avoir une relation sexuelle. Là je dis mon cerveau, j’aurais dû dire mon pénis, mais lui avait pas l’air au courant du projet. Non seulement il n’était vraiment pas prêt, mais il pliait dans le milieu. Normalemen­t, c’tun bon signe que tu devrais le ranger.

La belle-mère s’était aussi réveillée, elle était assise sur le bord de son divan-lit, à me fixer avec un regard de prédateur pour me dire : « Hey, j’pense que tu devrais essayer de dormir à place! » C’était mon « cue ». Je sais pas si c’était la peur ou le taux d’alcoolémie, mais j’me suis rendormi vite. Le lendemain matin au déjeuner, j’étais un peu gêné, mais tout le monde a fait comme s’il ne s’était jamais rien passé.

J’suis vraiment chanceux dans la vie, je ne manque de rien, y’a juste un Noël dans ma vie qui a été dur, pis y’a des gens incroyable­s qui m’ont accueilli pour pas que j’me sente seul. J’étais avec une famille qui ne me connaissai­t pas vraiment, j’ai été malade et déplacé pis vous m’avez traité comme l’un des vôtres, merci. Je sais que j’suis pas le meilleur des invités, mais j’essaie fort.

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