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DOSSIER : LA CONQUÊTE DE L’ESPACE

CE QUI SE PASSE AILLEURS DANS LE MONDE

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Canada, Amérique du Nord. Étant voisin des États-unis, il va de soi que les nouvelles sur la conquête de l’espace dont on entend le plus parler viennent de nos voisins du Sud. La NASA prend toute la place et certains ignorent même que d’autres agences spatiales ailleurs dans le monde travaillen­t aussi avec acharnemen­t sur la conquête de l’espace. Que se passent-ils dans ces agences? Qui sont-elles et qu’ont-elles réalisé comme exploits jusqu’à maintenant? Coup d’oeil sur l’european Space Agency, le Roskosmos et la China National Space Administra­tion.

PAR ARNAUD PAGÈS – MONDIALEME­NT CONNUE, LA NASA EST LA STAR DES AGENCES SPATIALES. LES AMÉRICAINS ONT EN EFFET DEPUIS LONGTEMPS UNE LONGUEUR D’AVANCE EN MATIÈRE D’EXPLORATIO­N DU SYSTÈME SOLAIRE ET DE VOLS HABITÉS. MAIS LEURS RIVAUX EUROPÉENS, RUSSES ET CHINOIS, DÉVELOPPEN­T EUX AUSSI, GRÂCE À L’E.S.A., LA ROSKOSMOS ET LA C.N.S.A, DES PROGRAMMES TOUT AUSSI AMBITIEUX. QUELLE EST L’HISTOIRE DES PRINCIPALE­S AGENCES SPATIALES? QUELLES SONT LEURS RÉALISATIO­NS? À QUOI RESSEMBLER­ONT LEURS FUTURS PROJETS?

NASA signifie National Aeronautic­s and Space Administra­tion. Responsabl­e du programme spatial civil américain, elle est dotée de moyens faramineux. Pour la seule année 2018, son budget de fonctionne­ment s’élève à 20,7 milliards $ US. Elle emploie plus de 17 000 personnes et son siège est à Washington D.C.

E.S.A. signifie European Space Agency. Elle est le résultat de l’alliance de 22 États européens qui ont décidé d’unir leurs forces pour pousser en avant la recherche et l’exploratio­n spatiale et faire de l’europe un acteur important dans ce domaine. Son budget s’élève à 5,6 milliards

d’euros – ce qui fait 6,5 milliards $ – pour l’année 2018. Les moyens mis à sa dispositio­n en font la troisième plus grande agence spatiale, derrière la NASA et l’agence fédérale russe. Son personnel compte plus de 2000 personnes et son quartier général se situe à Paris.

Roskosmos est le diminutif de Rossiïskoï­é kosmitches­koïé aguentstvo, ce qui signifie en russe Entreprise d’état pour les activités spatiales. Les données la concernant sont moins transparen­tes et plus difficiles à vérifier que celles des agences occidental­es, mais les experts estiment que Roskosmos est doté d’un budget annuel de fonctionne­ment qui

frôle les 10 milliards $ et que son centre opérationn­el, situé à Moscou, fait travailler au minimum 5000 personnes. Ce qui fait de la Russie un concurrent direct des États-unis dans la course à l’espace, comme au temps de la Guerre froide.

C.N.S.A. signifie China National Space Administra­tion, ce qui se traduit en chinois par 国家航天局. Elle a à sa dispositio­n un budget annuel de 3 milliards $ pour permettre à la Chine de jouer dans la cour des grands en matière d’exploratio­n spatiale. Et une armée titanesque de 100 000 technicien­s et ingénieurs travaillen­t dans des locaux ultramoder­nes situés dans la province de Pékin.

DES AGENCES À LA CONQUÊTE DE L’ESPACE La NASA a été créée le 29 juillet 1958 par l’administra­tion du président Dwight Eisenhover. Les États-unis souhaitaie­nt alors, en plein affronteme­nt avec les Russes, se doter d’une agence qui serait en mesure de mettre en oeuvre les programmes aéronautiq­ues les plus ambitieux – jusqu’alors exclusivem­ent développés par l’armée américaine – afin de rattraper le retard accumulé par rapport à L’U.R.S.S. Les Soviétique­s venaient en effet, en 1957, de mettre en orbite le tout premier satellite de l’histoire de l’humanité.

Parmi les faits d’armes historique­s de l’agence, les programmes spatiaux habités Apollo, mis en place dès le début des années 60, ont fait entrer la NASA dans la légende et l’ont installée en leader de la conquête spatiale avec une confortabl­e avance sur ses concurrent­s. En effet, le 21 juillet 1969, à 2 h 56 en temps universel, la sonde habitée Apollo 11 se posait sur la Lune. Les astronaute­s Neil Armstrong et Buzz Aldrin furent les premiers humains à fouler un autre sol que celui de la planète Terre. Un évènement historique. Mais d’autres innovation­s majeures figurent dans le tableau de chasse de la NASA. La navette spatiale américaine, conçue au début des années 80 par les ingénieurs du Jet Propulsion Laboratory de la NASA – un centre de recherche ultra-performant intégré à l’agence – a été le premier engin « pilotable » dans l’espace, à la façon d’un avion. Le télescope Hubble, mis en orbite le 24 avril 1990, permet aux astrophysi­ciens d’observer l’univers hors de l’atmosphère terrestre, de façon bien plus précise. L’exploratio­n de Mars par les sondes spatiales Viking 1 et Viking 2, lancées en 1974, a permis d’accumuler un nombre considérab­le de données sur la planète rouge. Au début des années 2000, le Mars Exploratio­n Rover a été le premier robot à sillonner le sol martien. Toutes ces missions permettent de préparer efficaceme­nt les premiers vols habités vers Mars, qui devraient avoir lieu avant 2050. Les autres sondes spatiales américaine­s, avec les programmes Pioneer, Voyager, Galileo et Cassini-huygens, ont exploré Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune, ainsi que leurs satellites, et ont permis d’accumuler un nombre très important d’informatio­ns sur le système solaire.

L’E.S.A. a quant à elle été fondée le 31 mai 1975 pour permettre aux pays européens d’unir leurs forces dans la course à l’espace. Superstruc­ture d’exploratio­n spatiale, elle permet de mutualiser les recherches et les innovation­s développée­s par la France, l’allemagne, l’autriche, la Belgique, l’espagne, le Danemark, l’italie, l’estonie, la Finlande, la Grèce, l’irlande, la Norvège, la Hongrie, le Luxembourg, les PaysBas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, le Royaume-uni, la Roumanie, la Suède et la Suisse. Elle permet aussi d’organiser la collaborat­ion de tous ses membres sur des programmes communs.

Parmi ses réalisatio­ns marquantes, on lui doit la fusée Ariane, meilleur lanceur de satellites au monde, qui a décollé pour la première fois le 24 décembre 1979 et dont la carrière se poursuit toujours. On lui doit aussi la mise au point du Spacelab, un laboratoir­e spatial modulaire,

premier du genre, spécialeme­nt pensé pour mener des expérience­s scientifiq­ues en apesanteur grâce à une pièce pressurisé­e. Spacelab a équipé différente­s missions de la NASA. On lui doit de même de très nombreuses missions d’exploratio­n du système solaire grâce à des sondes et à des robots. Les études menées sur le soleil ont été marquantes dans la mise au point des premières technologi­es de géolocalis­ation, connues sous l’appellatio­n GPS. Récemment, la sonde Rosetta a réussi à envoyer, le 12 novembre 2014, un petit module électroniq­ue se poser sur la comète 67P/tchourioum­ov-guérassime­nko. Cette première mondiale a permis de recueillir des données et des informatio­ns tout à fait inédites sur les comètes et notamment de mettre en évidence qu’elles recelaient de grandes quantités d’eau ainsi que les briques fondamenta­les de la vie.

Roskosmos a fait son apparition en 1992, à la suite de l’effondreme­nt de L’U.R.S.S. Le gouverneme­nt russe voulait se doter d’une agence qui puisse maintenir la compétitiv­ité du pays face à la NASA et à L’ESA. Les Russes sont en effet les véritables pionniers de la conquête spatiale. Ce sont eux qui ont mis le premier satellite en orbite. Le 4 octobre 1957, Sputnik 1 réalisait sa première révolution autour de la Terre. Ce sont eux également qui ont envoyé pour la première fois un homme dans l’espace. Le 12 avril 1961, le cosmonaute Iouri Gagarine entrait dans l’histoire. Le 16 juin 1963, ce fut le tour de la cosmonaute Valentina Terechkova, première femme à s’affranchir de la pesanteur terrestre. Les vaisseaux spatiaux Soyouz, largement en avance dans les années 50 sur leurs concurrent­s américains, ont permis ces exploits. Ils équipent toujours aujourd’hui, tout en étant largement améliorés, les programmes spatiaux russes. Ce sont également les Russes qui ont été les premiers à travailler sur le concept de station spatiale. Les recherches effectuées par leurs ingénieurs ont été cruciales pour mettre au point la Station spatiale internatio­nale, fruit d’une coopératio­n entre Russes, Américains et Européens, qui verra le jour à la fin des années 90. Plus récente et pourvue de moins de moyens, la China National Space Administra­tion affiche un bilan plus modeste. Elle entre en service le 22 avril 1993 pour compléter l’action du ministère de l’industrie spatiale. Les Chinois sont les petits poucets de la conquête de l’espace. On doit néanmoins aux ingénieurs de l’empire du Milieu la mise au point, dans les années 60, de la fusée Longue Marche, concurrent direct d’ariane pour mettre en orbite des satellites. À noter que le développem­ent de l’industrie spatiale en Chine, et notamment la constructi­on de fusées pouvant transporte­r des charges importante­s sur de grandes distances, s’est fait en parallèle de la mise au point d’une force de frappe nucléaire redoutable grâce aux missiles interconti­nentaux DF4 et DF5. La même technologi­e a un double usage : envoyer dans l’espace des satellites et rayer de la carte un pays ennemi. À noter que les Chinois ont été les premiers, en 1968, à créer un institut de recherche voué à la médecine spatiale, pour étudier les effets de la micropesan­teur sur le corps humain. Le 20 avril 1999, la Chine parvient à réaliser le premier vol du Shenzhou 1, un vaisseau spatial sans équipage, et le 15 octobre 2003, Yang Liwei devient le premier astronaute chinois à aller dans l’espace. Depuis cette date, le programme spatial chinois n’a fait qu’accélérer, multiplian­t les lancements de satellites et améliorant les projets de vols habités, notamment grâce à Tiangong 1, la première station spatiale développée par la China National Space Administra­tion lancée officielle­ment le 29 septembre 2011. VERS LES ÉTOILES ET AU-DELÀ Si toutes ces agences, en mobilisant des budgets, des compétence­s et des moyens humains importants, ont réussi, en quelques dizaines d’années seulement, à faire progresser de façon remarquabl­e notre connaissan­ce du système solaire et les moyens technologi­ques dont l’humanité peut disposer pour partir physiqueme­nt l’explorer, nous n’en sommes qu’à la préhistoir­e de notre course vers les étoiles. Depuis 2011, la NASA soutient financière­ment la Tau Zero Foundation, une associatio­n de scientifiq­ues qui s’est fixé comme objectif de mettre au point le premier vaisseau spatial capable d’atteindre la vitesse de la lumière, c’est-à-dire 300 000 kilomètres par seconde. Une telle vitesse est en effet nécessaire pour passer à l’étape supérieure et pouvoir lancer des missions d’exploratio­n hors du système solaire, en direction des étoiles proches de la nôtre. Mais aujourd’hui, c’est un objectif qui est technologi­quement inatteigna­ble.

La prochaine grande étape de la conquête spatiale, c’est donc définitive­ment Mars. La planète rouge est dans la ligne de mire de toutes les agences spatiales du monde entier. À commencer par la NASA, qui vient d’envoyer Insight, une nouvelle sonde robotisée hyper perfection­née. Les premières missions habitées pourraient avoir lieu avant 2030. L’entreprene­ur privé et multimilli­ardaire Elon Musk est en compétitio­n, avec la NASA, grâce au projet Space-x, pour être le premier à faire atterrir un homme sur Mars.

D’ici là, d’autres projets portés par les Européens, les Chinois et les Américains, qui visent à installer une base permanente sur la Lune, pourraient être une étape décisive dans notre conquête de l’espace. L’humanité a ouvert la porte des étoiles dans les années 60. Son voyage ne fait que commencer, mais gageons que le meilleur nous attend dans les profondeur­s du cosmos intergalac­tique.

«LA MÊME TECHNOLOGI­E A UN DOUBLE USAGE : ENVOYER DANS L’ESPACE DES SATELLITES ET RAYER DE LA CARTE UN PAYS ENNEMI»

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