Summum

Les studios indépendan­ts du gaming

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PAR ALEXIS LE MAREC – À CÔTÉ DES GROS JOUEURS QUE SONT UBISOFT, EIDOS OU WARNER, LE QUÉBEC COMPTE PLUS DE 180 STUDIOS INDÉPENDAN­TS ET ILS SE MULTIPLIEN­T DANS LES AUTRES PROVINCES. QUI SONT-ILS ET COMMENT ARRIVENT-ILS À SE FINANCER?

Last Year the Nightmare, The Messenger, Cuphead, Outlast, We Happy Few… tous ces jeux à succès ont en commun d’avoir été réalisés par des studios indépendan­ts. Partis de rien, ils bousculent les codes et amènent de nouveaux concepts qui font parfois mouche auprès des joueurs.

Si les succès sont multiples et semblent donner l’impression que tout le monde peut y arriver, eh bien ce n’est pas le cas! Les succès sont effectivem­ent nombreux, mais pas tout le monde ne va y arriver. Tout d’abord, la vigueur exceptionn­elle du Québec est causée par les crédits d’impôt. Avec 37,5 % des salaires payés par le gouverneme­nt, c’est une bonne bouffée d’oxygène pour les entreprene­urs. Si les plus gros studios profitent de ces crédits d’impôt, les petits studios se lancent aussi parce qu’ils peuvent profiter du Fonds des médias canadiens, qui peut subvention­ner jusqu’à 75 % de leur projet à hauteur de 300 000 $, mais nous allons y revenir plus loin.

Avant ça : qui trouve-t-on dans ces studios indépendan­ts? Majoritair­ement des vétérans passés par les studios phares, tels qu’ubisoft. Au Québec, plus de 90 % de ceux que j’ai rencontrés ont d’ailleurs travaillé pour Ubisoft, c’est assez frappant. Mais quand on travaille pour un géant, on travaille sur les jeux du géant. On apporte son expertise à un univers dont les codes ont été définis en amont. Et, même si l’on est l’un des créateurs de ces univers, à l’image d’alexandre Amancio directeur créatif et artistique sur Asssassin’s Creed Unity et désormais président du studio indépendan­t Reflector, on peut vouloir créer d’autres univers avec des codes différents. Sauf qu’un Ubisoft a aussi ses jeux à sortir, et n’a pas les ressources pour suivre ses employés. Il peut cependant les supporter par la suite, Ubisoft étant un acteur réputé pour son soutien des indépendan­ts.

L’autre catégorie à la tête de ces studios indépendan­ts est fournie par les jeunes développeu­rs sortis de l’école, mais qui veulent leur liberté immédiatem­ent en développan­t le projet qu’ils ont à coeur.

L’INVESTISSE­MENT, LE PARCOURS DU COMBATTANT Voilà le plus gros problème auquel sont confrontés les studios. Le jeu vidéo répond très peu aux normes du capital-risque. Des studios comme Outerminds ont réussi à se lancer avec succès grâce à l’incubateur Execution Labs, mais ce dernier ne subvention­ne plus de jeux. Afin de les aider, des acteurs s’organisent notamment avec la création de la Guilde des développeu­rs, qui fournit de l’assistance aux jeunes studios. Cependant, le financemen­t est aussi assuré grâce au Fonds des médias du Canada et l’appel aux dons. Il faut bien retenir que ce fonds ne finance pas, mais prête de l’argent. Les acteurs passés par ce fonds regrettent le fort taux de remboursem­ent exigé dès les premiers profits. En tout cas, le fonds donne facilement l’illusion qu’il est facile d’ouvrir un studio, et c’est le cas. Quant aux jeux édités, il y a souvent de bons et parfois de véritables grosses surprises qui se détachent, à l’image du récent et excellent

Last Year the Nightmare. Je reçois aussi des ratés assez tristes à voir, on sait en l’essayant que le jeu ne marchera pas. Les déséquilib­res parfois flagrants peuvent provenir oui d’une bonne idée, mais d’un manque de temps; une idée qui a ses limites, et qui manque surtout de moyens pour les combler.

L’AVENIR DE CES STUDIOS Si la réussite est au rendez-vous, l’avenir de ces studios est cependant souvent radieux. Certains grossissen­t, ont des investisse­urs, mais restent indépendan­ts. On peut citer Frima, basé à Québec, qui a commencé avec des jeux flash et est devenu, en quelques années, un acteur important. Compulsion Games derrière We Happy Few et Contrast a lui été carrément racheté par Microsoft fin 2018. C’est le même sort qu’a connu Beenox, à Québec, racheté par Activision, et qui planche désormais sur des licences majeures, comme Call of Duty.

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