Summum

Roof : l’humain derrière le comique

- PAR ALEX ROOF PHOTOGRAPH­E : FRANCA PERROTTO - WWW.FRANCAPERR­OTTO.COM remercieme­nt s : Restaurant gato matto laval - ww.gatomatto.ca

Je sais que j’ai l’air d’un jeune rockeur qui peut laisser croire que la dernière fois que j’ai dit « je t’aime », c’était à 15 ans en embrassant mon skateboard parce que je venais de réussir mon premier kickflip.

Ce n’est pas parce que j’ai déjà pissé sur une police après un show de Rage Against The Machine que j’ai les sentiments aussi froids que The Undertaker qui fait son entrée sur le ring.

À cause de ce que je dégage, on peut facilement croire que j’ai autant de sentiments qu’un bouncer du Radio Lounge. Les apparences sont parfois trompeuses et c’est particuliè­rement vrai mon cas. Derrière mon regard de player qui s’habille au DIX30 se cache un gars en pyjama de flanelette enroulé dans une doudou qui connaît toutes les répliques de Titanic par coeur. Je suis pas mal sûr que si j’avais été Jack, Rose m’aurait trouvé tellement romantique que c’est elle qui se serait sacrifiée pour moi à la fin du film.

Nous, les gars, vivons une pression sociale d’être « tough ». Cette pression ne vient pas de nulle part. Nous n’avons qu’à regarder l’histoire qui nous précède avec cette époque où l’on devait chasser le mammouth à mains nues. Si tu n’avais pas l’air « tough » devant le mammouth, c’est pas mal plus le mammouth qui te chassait. À vrai dire, il faisait de toi un repas complet : soit à manger sur place ou bien en take-out, c’est le mammouth qui décidait! T’avais l’air de Leonardo DiCaprio dans le film LeRevenant, mais sans aucune chance de survie et surtout, sans Oscar pour souligner ta performanc­e.

Mais aujourd’hui, les choses ont changé à travers les génération­s. Prenons juste la différence entre mon père et moi. Mon père a bâti lui-même la maison de mon enfance en plein hiver avec des engelures à ne plus sentir ses doigts : moi, je suis découragé si le mode d’emploi de mon meuble IKEA a plus de deux pages.

Et vous savez quoi? C’est bien correct comme ça. Enlevons-nous cette pression d’être physiqueme­nt et psychologi­quement toujours fort. Nous avons droit à nos faiblesses, et ce, sans en avoir honte. Allons droit au but puisque vous lisez SU MMUM et réfléchir n’est pas votre point fort : je suis un gars sentimenta­l. J’ai pleuré, je pleure, et je pleurerai. J’ai l’air fort, mais je suis aussi fragile que les pinces un peu faiblardes qui te font perdre systématiq­uement dans les machines à toutous lorsque tu essaies d’en attraper un.

En grande majorité, les gars détestent avouer qu’ils ont des sentiments. Mais soyons francs : tous les gars pleurent. Même le pire des douchebag de Laval, s’il se fait laisser par sa blonde, il va pleurer… presque autant que si le salon de bronzage était fermé.

En décembre dernier, j’ai vécu une solide peine d’amour. Au début, tout me faisait penser à elle : une toune à la radio, un bon resto... Je ne lui en voulais pas, cela ne fonctionna­it plus entre nous à ce moment précis de nos vies. C’est simple, nous n’avions plus les mêmes intérêts. Son but premier était de me rendre heureux, et mon but premier était d’être heureux. Il ne faut pas être un mathématic­ien renommé d’Harvard pour se rendre compte qu’il y avait quelqu’un d’oublié dans l’équation.

De mon côté, je ne pensais qu’à moi. Je suis enfant unique, je n’avais jamais eu de colocatair­es, et en plus, je suis humoriste : un métier où je me fais applaudir seulement pour avoir parlé. La meilleure expression pour me décrire était pas « Me, myself and I », mais plus « Alex, Alex, Alex ».

De son côté, elle avait de la difficulté à me faire confiance parce que son ex-copain lui avait été infidèle et je vivais par moments les répercussi­ons de ce traumatism­e. Je me sentais comme lorsque j’ai acheté ma première voiture : je devais souvent payer pour des problèmes causés par l’ancien propriétai­re qui l’avait scrappé!

Il n’y a pas de mode d’emploi quand tu es en peine d’amour ni de groupes de support du genre « Les Coeurs Brisés Anonymes ». Malgré que ce nom de groupe pourrait porter à confusion et attirer des gens qui ont déjà été victimes de crise cardiaque. Pourtant, il existe les Alcoolique­s Anonymes, les Gamblers Anonymes… il existe même - et ce n’est pas une blague -, les Dépendants Affectifs Anonymes! C’est clair que leurs rencontres sont interminab­les. Ils ne veulent jamais se quitter!

tous les gars pleurent ...

Mes amis n’étaient pas les meilleurs pour me changer les idées : ils m’invitaient aux danseuses. Cela ne m’était d’aucune aide, car la mère de mon ex travaille là! Évidemment, je rigole. Sa mère n’est pas danseuse. Mais faisons comme si c’était le cas afin que les filles dans le magazine se sentent moins seules.

Aujourd’hui, nous sommes à nouveau ensemble et tout se déroule très bien. Nous avons fait des démarches chacun de notre côté, tel que consulter un psychologu­e. À noter que nous n’avons pas fait appel à un « coach de vie ». Si cela avait été le cas, nous serions sûrement en train de vous convaincre d’entrer dans une entreprise de vente pyramidale afin de vous vendre des savons faits à base de graisse de babouin.

Parce qu’à mon humble avis, tous les « coachs de vie » c’est de la bullshit. Vous avez sûrement remarqué que j’écris « coach de vie » entre guillemets, tout comme si j’écrivais « aasdflkasj­fadslkfjad­sf ». Dans les deux cas, des guillemets s’imposent parce que c’est n’importe quoi.

Parlant de n’importe quoi, on m’a déjà dit : « revenir avec son ex, c’est comme ravaler son vomi ». Vous avez peut-être déjà entendu cette appétissan­te expression? On a osé me la dire en pleine face : commentair­e qui venait clairement d’une personne jalouse de mon bonheur, ce à quoi j’ai répondu sans lui accorder trop d’attention : « ça tombe bien, mon idole c’est Steve-O de Jackass, et il est devenu riche et célèbre à manger son vomi! »

Bon, il est aussi devenu célèbre en se brochant les testicules sur les cuisses, mais je garde cette réplique pour la personne qui osera juger ma vie sexuelle.

Je suis le Steve-O du romantisme! Je suis un rockeur en flanelette. Je suis ton « coach de vie » qui te dit : « Hey, mon gars, ce n’est pas grave si les gens te jugent parce que t’es sensible et que t’as de la peine. N’aie pas peur de vivre tes sentiments et de jaser à quiconque de tes émotions, car rassure-toi : tu n’es plus de l’époque où l’on chassait le mammouth à mains nues ».

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