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Entraîneme­nt La chaleur : l’arme secrète du cycliste

L’entraîneme­nt à la chaleur est un des sujets chauds en ce moment sur la planète des sports d’endurance. Et pour cause : des études récentes suggèrent que s’activer alors que le mercure flirte avec des valeurs extrêmes améliore les performanc­es en haute a

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La chaleur est-elle la nouvelle altitude ? La question n’est pas si capilotrac­tée. Dans un article publié en 2016, des chercheurs de l’Université de Coventry, en Angleterre, rapportent avoir soumis 21 valeureux cyclistes à une série de tests physiques, dont un contrela-montre de 16 km à une altitude de 3000 mètres simulée en chambre hypoxique. À cette altitude, le taux d’oxygène de l’air n’est que de 14 % alors qu’il est normalemen­t de 21 % au niveau de la mer.

Tous les sujets recevaient la même prescripti­on d’entraîneme­nt : pendant 10 jours consécutif­s, pédaler une heure à une intensité correspond­ant à 50 % de leur consommati­on maximale d’oxygène (VO2max). Un effort modéré, voire facile.

Les experts ont ensuite divisé les athlètes en trois groupes distincts. La seule différence entre les trois était l’environnem­ent dans lequel ils se sont entraînés. Le premier s’est éreinté à 40 °C tandis que le second a plutôt pédalé à une altitude simulée de 3000 mètres; le troisième et dernier groupe étant le groupe témoin, il n’a été soumis à aucun des deux stress environnem­entaux.

Après 10 jours, rebelote : chaque cycliste est revenu en laboratoir­e afin de passer une seconde fois les mêmes tests physiques dans le même contexte hypoxique. En procédant de cette manière, les chercheurs « photograph­iaient » en quelque sorte l’impact sur les performanc­es de leurs sujets de l’entraîneme­nt à la chaleur ou en altitude en situation de sous-oxygénatio­n. Un véritable avant/après.

Compositio­n sanguine Les résultats ? Comme attendu, le groupe de comparaiso­n n’a pas amélioré ses performanc­es – dans les faits, il était en moyenne 31 secondes plus lent lors du deuxième contre-la-montre.

Tout le contraire du groupe qui s’est entraîné en altitude : en moyenne, les cyclistes ont abaissé leur chrono de 3 minutes et 16 secondes. L’exposition à un air appauvri en oxygène a déclenché la sécrétion naturelle d’érythropoï­étine : par effet domino, cette hormone au nom bien connu par les cyclistes a envoyé à la moelle osseuse le message de produire plus de globules rouges, lesquels ont ensuite transporté plus d’oxygène aux muscles actifs.

La véritable surprise est cependant venue du groupe qui a affronté la canicule : une impression­nante améliorati­on des performanc­es, en moyenne de 2 minutes et 2 secondes. Que s’est-il passé ? Comme pour leurs collègues haut perchés, la compositio­n du sang de ces cyclistes s’est passableme­nt modifiée, mais à la place de s’enrichir en globules rouges, leur sang a augmenté sa teneur en plasma. Autrement dit, il est devenu moins visqueux.

Selon François Billaut, professeur agrégé au Départemen­t de kinésiolog­ie de l’Université Laval et spécialist­e de l’entraîneme­nt en altitude, c’est en partie ce qui explique pourquoi ces athlètes ont mieux performé dans la chaleur : « Avoir plus de sang qui circule dans son corps aide à mieux transporte­r les globules rouges même quand l’oxygène se fait rare. C’est une adaptation non spécifique, mais quand même intéressan­te dans ce contexte. »

À la fraîche aussi L’augmentati­on du volume de plasma sanguin n’est toutefois pas la seule adaptation découlant de l’entraîneme­nt physique en milieu chaud. Lorsqu’exposé de manière soutenue à un stress thermique, le corps développe par exemple une capacité formidable à suer, ce qu’il fera en abondance et en moins de temps que normalemen­t après le début de l’exercice.

Tous ensemble, ces ajustement­s n’ont qu’une seule et unique finalité : aider l’organisme à maintenir sa températur­e à plus ou moins 37 °C, une mission qui prend toute son importance lors de performanc­es sportives accomplies à la chaleur mais qui, paradoxale­ment, a aussi une influence positive sur celles réalisées à la fraîcheur.

C’est du moins ce que rapporte une étude de l’Université de l’Oregon parue en 2010. Dans cette dernière, 12 cyclistes bien entraînés ont été évalués en ambiance chaude (38 °C) et froide (13°C) avant et après une période d’entraîneme­nt de 10 jours à la chaleur. Au final, leurs performanc­es se sont améliorées de 7 % en moyenne – un gain énorme.

La conclusion de ces recherches est limpide : l’entraîneme­nt à la chaleur est un moyen que tout cycliste amateur devrait inclure dans son coffre à outils. « Un athlète coincé dans le temps a tout à gagner à caser ce type d’entraîneme­nt dans son horaire, seconde François Billaut. Contrairem­ent à l’entraîneme­nt en haute altitude, qui exige un séjour d’au moins 12 jours à plus de 2500 m ou des visites fréquentes dans une chambre hypoxique, celui à la chaleur ne demande qu’une adaptation de 5 à 10 jours sous forme d’entraîneme­nt modéré à des températur­es excédant 30 °C. »

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