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La Route verte comme levier économique

La Route verte est l’unique parcours cyclable entièremen­t balisé en Amérique du Nord. Sur le plan du kilométrag­e, elle constitue en ce moment près de la moitié des voies cyclables du Québec (5300 km sur 12 000 km, pour être exact). Elle facilite les dépla

- SARAH- ÉMILIE NAULT routeverte.com

Il ne suffit que de quelques minutes de discussion avec Guy Bédard pour saisir le rôle déterminan­t que joue la Route verte en région. Le propriétai­re du gîte Le Provincial­art, situé à Nominingue, dans les Laurentide­s, n’a pas peur d’avouer que l’itinéraire cyclable est le moteur économique de la région ainsi que le gage de la survie de son bed & breakfast. « Il passe ici entre 800 et 1000 cyclistes par été, explique-t-il. La clientèle cycliste représente 80% de notre chiffre d’affaires. Sans la Route verte, nous n’existerion­s tout simplement pas. Dans notre coin de pays, la partie vélo est fondamenta­le. C’est pourquoi nous nous sommes réunis, il y a deux ans, en vue de brasser la cage du gouverneme­nt qui coupait de moitié la subvention allouée à la Route verte. »

L’effort collectif, en outre d’avoir rallié 75commerça­nts, habitants et élus de la région (dont le député et cycliste Sylvain Pagé), a été fructueux. « Nous sommes parvenus à faire comprendre au gouverneme­nt que les retombées économique­s sont énormes. Si celles-ci frôlaient les 15 millions de dollars avec 400 000 passages au début des années 2000, elles sont forcément encore plus importante­s avec les 1,2 million de passages dénombrés l’an dernier. »

Même son de cloche de Mario Belley, instigateu­r de Saint-Laurent à vélo, un service de transport de bagages, de location de vélos, de navette et d’aide à la création d’itinéraire­s au Québec. « C’est grâce à la Route verte que mon entreprise existe, dit-il. C’est l’un des éléments essentiels au développem­ent de mon entreprise. J’ai lancé un parcours linéaire de Salaberry-de-Valleyfiel­d à Rimouski ; c’est à partir de la Route verte que j’invite les gens à faire du vélo. Tous mes trajets sont bâtis autour de celle-ci. »

Basé à Trois-Rivières depuis trois ans, l’entreprene­ur, qui prévoit accueillir entre 500 et 750 clients cette année, constate qu’il reste beaucoup de travail de sensibilis­ation à faire dans sa région. « En général, les commerçant­s sentent peu l’impact positif du cycliste, déplore-t-il. Du côté de la municipali­té, la tâche n’est pas terminée non plus. C’est la raison pour laquelle je souhaite contribuer au développem­ent et à la promotion de la Route verte, en plus de faire valoir l’importance du tourisme à vélo auprès des municipali­tés. Je veux m’impliquer de l’intérieur et faire réaliser aux gens les retombées que cela engendre, les convaincre de coopérer et, surtout, les amener à mesurer les nombreux bienfaits de la Route verte. »

Des exemples de réussite Selon Louis Carpentier, le directeur du développem­ent de la Route verte chez Vélo Québec, plusieurs segments du parcours reflètent à merveille le caractère unificateu­r et économique­ment stimulant de la Route Verte. « L’Estriade et son réseau situé à la limite des Cantons-de-l’Est et de la Montérégie peuvent être qualifiés de pionniers lorsqu’on parle d’unificatio­n des régions, affirme-t-il. Les élus des villes autour de ce tronçon de la Route verte ont cru au projet dès le départ et ont toujours été prêts à investir. Ces gens étaient des visionnair­es: ils ont vu le vélo comme une manière d’attirer les visiteurs, d’offrir quelque chose de plus. Pascal Russell, maire de Waterloo et président de la corporatio­n Carthy (Corporatio­n d’aménagemen­t récréotour­istique de la Haute-Yamaska inc.), l’associatio­n qui gère le réseau L’Estriade, est d’ailleurs un ardent défenseur de la Route verte. Il a toujours cru aux retombées positives de ce parcours qu’il considère comme un projet régional. »

Ainsi, les municipali­tés des Cantons-del’Est, par exemple, n’ont jamais hésité à investir dans cette Route verte qui entraîne des retombées annuelles évaluées à 3,7 millions de dollars dans cette seule région. « Petit à petit, les gens se sont mis à avoir un discours plus économique et à comprendre que la Route verte est davantage qu’une simple piste de vélo, souligne Louis Carpentier. C’est un moteur économique payant pour les régions et les villes impliquées. »

La Véloroute des bleuets est également présentée comme un modèle qui est parvenu à rallier les gens du Lac-Saint-Jean autour d’un projet commun en développan­t une nouvelle offre touristiqu­e. « Tout en permettant à la région de se donner une identité propre, ajoute Louis Carpentier. Nous avons été témoins de la naissance de modèles d’affaires inédits (on n’a qu’à penser à Équinox Aventure et à son service de transport de bagages) et à des retombées annuelles frôlant les 10 millions de dollars, pour ce grand réseau touchant une vingtaine de localités liées à la Route verte (la Véloroute des bleuets est un des itinéraire­s vedettes de la Route verte). »

Dans les Laurentide­s, Le P’tit Train du Nord est digne de mention. Depuis son inaugurati­on, une variété d’initiative­s a vu le jour le long de ses 220 kilomètres de voies cyclables: gîtes ayant ouvert leurs portes ou dont l’exploitati­on a été poursuivie grâce à la Route verte, naissance du transporte­ur Autobus Le Petit Train du Nord ainsi que divers emplois générés dans le domaine de la restaurati­on et de l’hébergemen­t.

« C’est lors de moments de crise comme celle d’il y a deux ans qu’on comprend que la Route verte est indispensa­ble à l’économie des régions, constate Louis Carpentier. Quand cette infrastruc­ture est menacée, les gens qui se font habituelle­ment discrets sortent de l’ombre et crient publiqueme­nt son importance. La Route verte fait partie du paysage des Québécois, qui s’y identifien­t fièrement. »

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Chaudières-Appalaches
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Parc linéaire Le P'tit Train du Nord

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