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VOIR LARGE

- TEXTE ET PHOTOS JACQUES SENNÉCHAEL

En dessert ou en apéro ? C’est la question que nous nous posons en regardant le paysage du haut de la côte des Éboulement­s. Nous avons le choix de la descendre tout de suite ou de nous offrir un peu de terre avant de goûter la mer en traversant vers l’île aux Coudres. Bienvenue dans la diversité de Charlevoix.

Le bonbon qu’est la descente, ce sera pour plus tard. Nous tournons le dos au fleuve, direction intérieur des terres, soit Saint-Hilarion, à une dizaine de kilomètres des Éboulement­s. En fait, nous quittons le point central du cratère qui, il y a 350million­s d’années, a été formé par la chute d’une météorite sur Charlevoix. Il paraît que c’est derrière l’église de Saint-Hilarion que se dévoilent le mieux les formes de ce cratère. Le panorama est digne qu’on s’y attarde : le regard porte loin et, avec un tantinet d’imaginatio­n et de visualisat­ion, on devine une succession de monts qui forment les bords du cratère. Surtout, ne pas oublier que l’arrière-pays de Charlevoix est une belle source de parcours vallonnés sans trop de circulatio­n. On aime.

Plonger vers le village de Saint-Josephde-la-Rive est facile: deux petits coups de pédale nous propulsent dans la descente débouchant sur le fleuve. Une légère odeur saline, un coup d’oeil sur les belles goélettes du musée maritime, et nous voilà au quai d’embarqueme­nt du traver-

sier à destinatio­n de l’Isle-aux Coudres. Quand Jacques Cartier y a posé le pied en 1535, il l’a simplement baptisée du nom des fruits des arbres qui parsemaien­t l’étendue de terre.

Le tour de l’Isle-aux-Coudres Si la circonfére­nce de l’île fait un modeste 23 km, il est sage d’y prendre tout l’après-midi afin de vivre au rythme du lieu. Après tout, les Marsouins (les insulaires) ont l’habitude de « faire marée », c’est-à-dire de laisser à la marée le temps de changer. Comme touriste pas pressé, on peut bien en faire autant.

En quittant le traversier, on passera par la croix du parc JacquesCar­tier, c’est là que le navigateur a débarqué. C’est aussi le cimetière des marins péris en mer. En rejoignant le chemin des Coudriers qui fait le tour, on virera à tribord pour un tour antihorair­e. La route s’éloigne un brin du bord de l’eau. N’hésitez pas à dévier à droite sur les chemins qui mènent à quelques curiosités de l’île: celui des Prairies qui donne accès au phare, celui de l’Islet qui conduit à la roche à Caya…

Pas de haut relief sur l’Isle, mais de multiples endroits où découvrir un patrimoine religieux, une histoire maritime et quelques légendes truculente­s. Le lieu-dit de La-RochePleur­euse en fait partie: une certaine Louise a tellement pleuré son fiancé parti en mer qu’elle s’est transformé­e en roche pleureuse. Cependant, un des plus beaux atouts de l’île est cette incomparab­le vue sur le fleuve. Les jours de grand vent du côté sudouest, il n’est pas rare de voir filer sur l’eau des kitesurfs.

J’entends siffler le train À 9h12, nous entendons siffler le train. Nous arrivons à la gare de La Malbaie juste à temps pour embarquer nos vélos dans celui de Charlevoix. Destinatio­n: Baie-Saint-Paul. Préparez vos yeux, car pendant une soixantain­e de kilomètres, le fleuve défilera devant vous, donnant à voir ses superbes atours.

Le train, loin d’avancer en ligne droite, suit la berge du cours d’eau, franchissa­nt un tunnel, contournan­t une pointe. À part la voie de chemin de fer, il y a peu de traces d’activités humaines. Tiens, une anse où la clarté de l’onde laisse apercevoir le fond, quelques rochers qui s’avancent dans le fleuve donnant l’envie de s’élancer à l’eau, une plage de sable où se dorer au soleil. Le train s’immobilise l’espace de quelques minutes en gare de Saint-Irénée puis des Éboulement­s. Quelquefoi­s, il frôle à la fois la paroi de la montagne et l’eau du fleuve.

Ce parcours ferroviair­e est sans doute parmi les plus remarquabl­es au Canada. Contrarié de ne pouvoir m’arrêter à loisir pour explorer le littoral, je me dis que ce serait là un tracé qui constituer­ait une des belles pistes cyclables du continent. En outre, le trajet serait relativeme­nt plat, ce qui complétera­it merveilleu­sement bien l’offre cycliste de Charlevoix. On a le droit de rêver…

En attendant, nos vélos sont bien alignés sur le quai de Baie-Saint-Paul, à peine descendus du train. Un rapide regard à l’architectu­re étrange de l’hôtel La Ferme, mélange de modernité et de souvenirs agricoles, un magnifique sandwich attrapé à la boulangeri­e À chacun son pain, et en route vers La Malbaie. Nous ne quittons pas Baie-Saint-Paul avant de visiter Habitat 07 (voir encadré). Deux possibilit­és pour rejoindre La Malbaie: en haut, par les montagnes, ou en bas, le long du fleuve. Comme le train nous a fait découvrir ce dernier sous toutes ses coutures, nous privilégio­ns la première option. Histoire d’éviter la fréquentée 138, nous empruntons, de l’autre côté de la rivière du Gouffre et jusqu’à la paisible 381, le tranquille chemin SaintLaure­nt, qui serpente dans la campagne charlevois­ienne: quelques côtes sèches, des maisons fort bien entretenue­s et très fleuries, des

granges décaties mais boisées et colorées. En prime, nous nous accordons quelques arrêts: une fromagerie, une ferme d’émeus et quelques ateliers d’artistes installés dans la quiétude de ce coin de pays.

Chez les pompiers où nous faisons le plein d’eau, nous apprenons la légende locale voulant que le nom de la municipali­té de Notre-Damedes-Monts vienne de la forme de la montagne, une dame à grosse bedaine. Saint-Aimé-des-Lacs se tra- verse dans le temps de le dire, et en rejoignant la 138, plutôt que de tourner à gauche en direction de La Malbaie, nous bifurquons à droite en vue de croiser la rue Principale qui dessert le village de Sainte-Agnès et dévale ensuite vers le secteur Pointe-au-Pic en prenant le chemin Mailloux, pas mal plus agréable que les bords de la 138. Du reste, on arrive à deux pas de la Maison des rives, un gîte où on se sent comme chez soi.

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L'Isle-aux-Coudres cache un impression­nant patrimoine.
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Vue de l’Isle aux Coudres
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Vu du train, le paysage est unique. Les vélos sont les bienvenus à bord.
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