Le carburant des longues sorties
Le cycliste bien assis sur son vélo peut dépenser jusqu’à 800 calories à l’heure1. C’est beaucoup quand on considère que l’individu moyen consomme entre 2000 et 2500 calories par jour sans trop bouger… Si se blottir dans le peloton diminue légèrement la demande énergétique, il n’en demeure pas moins que les longues sorties requièrent une préparation alimentaire adéquate.
Malgré l’abondance d’évidences scientifiques rigoureuses ayant mis en relief les effets bénéfiques des apports en glucides sur la performance dans les sports d’endurance, il semblerait qu’encore beaucoup de sportifs ont peine à en ingérer suffisamment2. L’hystérie collective autour du sucre et du gain de poids contribue assurément à entretenir certaines craintes envers les aliments riches en glucides comme le fameux trio pain, pâtes et pommes de terre. Mais ne mélangeons pas tout. Si la surconsommation d’aliments riches en sucres comme les boissons gazeuses s’avère néfaste à la santé, dans le cas de l’athlète d’endurance, les sources alimentaires de glucides sont vitales et devraient plutôt faire l’objet d’un certain culte, surtout lors d’efforts prolongés.
Quand le programme inclut une balade qui s’étire sur presque toute la journée, un repas complet et équilibré environ 2 heures avant le départ se révèle un investissement très payant en vue de contrer la fatigue musculaire et les baisses d’énergie. Un bol de gruau garni de yogourt grec, de noix, de sirop d’érable et de fruits séchés en est un bel exemple ; il procure une dose suffisante de glucides à faible charge glycémique qui préserveront les réserves de glycogène musculaire dans le temps, en outre de fournir protéines et lipides de bonne qualité. Quelques rôties tartinées de confiture et de notre beurre de pinottes national s’avèrent également un excellent complément quand les gros appétits sont concernés. Les aliments digestes et connus du sportif seront privilégiés aux plats copieux, qui ralentissent la digestion et favorisent les inconforts intestinaux.
Une fois les réservoirs internes bien remplis, l’eau suffit amplement au cours de la première heure sur la bécane. Transformer par la suite le maillot et la monture en garde-manger sera une stratégie gagnante ; en effet, il est démontré qu’un effort à intensité modérée d’une durée qui dépasse 2 heures nécessite un apport constant en glucides, pouvant aller jusqu’à 60 g à l’heure, soit l’équivalent de 2 gels, 1 ½ Gatorade ou 2 tranches de pain + confiture… toutes les heures ! Cela permet de soutenir la cadence3.
Et qu’en est-il des autres macronutriments comme les protéines et les lipides? Il semble que la combinaison glucidesprotéines soit optimale lors des épreuves et de l’entraînement en endurance, puisque ces deux macronutriments agiraient en synergie comme agents ergogéniques. Une recherche réalisée dans un contexte de duathlon (8 km de course à pied, 50 km de vélo, 8 km de course à pied) a montré qu’une consommation de 1500 ml d’une boisson contenant des glucides et des protéines retarderait l’apparition de la fatigue comparativement à une autre qui ne contient que des glucides4.
D’accord pour boire cette combinaison de nutriments, mais peut-on la manger? Tout à fait ! Les aliments solides riches en glucides et en protéines ont même l’avantage de favoriser la satiété, et donc de différer la sensation de faim. Les barres commerciales à privilégier sont celles qui renferment beaucoup de glucides et moins de 10 g de protéines et de lipides. Des collations maison comme des galettes de riz et l’incontournable tartine confiture-beurre de pinottes (encore lui) pourront également vous sustenter tout en gâtant vos papilles.
Finalement, ne nous laissons pas berner par les mérites des produits pour sportifs soi-disant miraculeux. L’expérience propre à chaque athlète doit être à la base de toute stratégie individuelle de ravitaillement. À preuve, une étude menée auprès de cyclistes de niveau élite a établi que la performance sur une course de 2,5 heures était comparable entre ceux qui avaient décidé euxmêmes de leur ravitaillement et ceux à qui on avait prescrit un ravitaillement basé sur les données scientifiques les plus convaincantes5.
Morale de l’histoire ? Bien qu’il importe de respecter certaines règles dans le but d’éviter la déroute pendant les longues sorties à vélo, ce sont l’expérience personnelle et les préférences alimentaires qui dictent les choix à privilégier. Ne vous laissez pas impressionner par votre voisin de peloton qui vante la qualité des produits alimentaires dernier cri collés un peu partout sur son cadre de vélo. Le gâteau aux bananes maison vous mènera aussi loin aussi vite !